L’eau : les raisons de la colère

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“Le feu, ça brûle, et l’eau, ça bout : tous les citoyens tremblent de rage”. Cette particule d’un refrain appartenant à un groupe de boys français sied admirablement à la situation actuelle que vit la population du village Tifra. Si pour le feu, depuis le début de la saison estivale, seulement quatre départs de feu sont enregistrés sur le territoire de la commune, l’eau, par contre, ne cesse de constituer un sujet qui fâche à telle enseigne que certains bavent de rage sur les autres rien qu’à entendre prononcer le mot “eau”. Ce mécontentement général a fait dire à un enseignant de la région, friand de jeux de mots : “Quand j’entend parler d’eau, je sors mon pistolet à eau !!!”.On bavarde, on dénigre, on offense, on se plaint… que n’a-t-on pas fait pour la question de l’eau à Tifra ? Et les raisons de tout ce brouillamini hydrique sont multiples. Il y a d’abord lieu de signaler la vétusté du réseau de distribution, réalisé de façon bâclée sous les yeux bienveillants des “contrôleurs de la commune”. Déjà, les premiers essais de ce réseau, effectués dans les débuts des années 90, n’étaient pas probants. Certains avaient de l’eau en abondance et d’autres n’ont que dalle. Et l’APC, au lieu de mettre en demeure l’entreprise ayant réalisé le projet de réajuster son travail, est allée elle-même prendre en charge les centaines de doléances des citoyens par son “service d’eau” installé dans la précipitation. Et c’est la course au piquage anarchique, à l’installation immodérée des vannes d’arrêt… et tout le tintouin. Et le tableau ne cesse de noircir. Les différents exécutifs qui se sont succédés depuis n’ont fait que compliquer davantage la situation. En dépit de l’augmentation de la quantité d’eau avec l’arrivée de l’eau “Edemia”, la situation est restée la même. Au plus fort de l’hiver, il faut attendre une semaine et plus pour voir l’eau arriver dans le robinet. En saison estivale, il faut avoir la patience de Job car l’eau des foyers est aussi rare qu’un merle blanc.En sus du réseau foireux, les deux sources d’alimentation “Tabarant” et “Alma n’Louh” sont soupçonnées d’être manipulées. Elles ne donnent pas ce qu’elles doivent donner au village Tifra, alors que tout le monde parle de leur abondance surtout pour Tabarant. Les agents de distribution sont eux aussi dans le collimateur de la population qui les soupçonne de ne pas faire correctement leur travail. On parle aussi de l’utilisation de pompes aspirantes par des citoyens qui sont à côté de leurs pompes. Avec l’existence de quelques privilégiés qui ont de l’eau deux à trois fois par semaine depuis la mise en fonction du projet Edemia et la répartition énigmatique des eaux “El Hammam” et “Edemia” pour Takhnaqt et “Tabarant” pour le reste du village, le décor d’une révolte hydrique est bien planté. N’aurait été l’implication des comités de village qui ont intervenu pour mettre de l’ordre dans ce foutoir, on aurait certainement assisté à des scènes de violence. D’ailleurs, il a fallu de peu pour que les jeunes du village, galvanisés par un rassemblement tenu à Azellal, n’aillent exprimer leur colère devant l’APC. Réunions sur réunions entre eux ou avec les responsables de l’APC, les quatre comités de village ont, au bout d’un mois et demi de travail, réussi à donner un certain sens de justice à la distribution et à inventorier tous les problèmes liés à la question d’AEP. Ils ont mis devant leur responsabilité les responsables (APC, Edemia et Subdivision hydraulique) et ont mis fin au règne de l’anarchie et des privilèges dans la distribution.L’Edemia, pour sa part, doit fournir au village les 1 200 m3 promis par semaine promis, car pour l’instant, même pas la moitié, selon les prélèvements effectués par le comités, n’est fournie. Et curieusement, c’est uniquement le village Tifra qui ne prend pas sa part. S’il y a crise, ses effets doivent être partagés par tout le monde, sinon où est le sens de la justice. S’il est vrai que le problème d’eau, pour l’instant, n’est pas totalement réglé, il n’en demeure pas moins qu’il est moins intense. Tous les foyers ont de l’eau une fois par semaine, et c’est une première dans l’histoire du village. C’est vrai qu’il reste toujours quelques privilégiés, ceux notamment qui sont branchés directement à la conduite principale, mais leur “cas” est sérieusement pris en charge. Le vœu des comités, c’est d’arriver à une égalité parfaite dussent-ils comme l’a promis le P/APC, Mouloud Ramoul, demander la réfection totale du réseau. Mais, on n’est pas encore là, l’heure est au règlement des problèmes individuels et collectifs et au contrôle des quantités d’eau qui arrivent. Il faut rendre hommage à ces membres du comité, notamment Lahlou Mouaci, Mouloud Arezki, Mohamed Nouri, Nafaâ Bouzebal, Mourad Madi… qui se sont investis corps et âme pendant tout cet été pour alléger un petit peu la souffrance de la population.

Boualem B.

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