S’il y a un chanteur kabyle qui mérite d’être connu, reconnu et écouté sans modération, c’est bien Hadi Aouaghlis. C’est un classique de la chanson kabyle en France mais méconnu dans son pays. Il a à son actif plus de 100 chansons contenues dans 6 CD et proposées à la vente par l’éditeur France-Afrique de Paris sous forme de deux jolis coffrets, l’un de 4 CD qui reprennent la carrière du chanteur de 1980 à 2005 et l’autre de 2 CD (2006 – 2008) qui totalisent 22 chansons. Pour l’Algérie, le coffret de 4 CD est repris en exclusivité par les Editions Ifri-Music d’Akbou sous forme de 4 CD individuels. Le 5e CD, intitulé Tavri yefrene, les éditions Ifris-Music l’ont mis en vente dans le courant de la semaine passée. Quant au 6e CD (2006-2008) qui est en cours de montage, il comprend 12 clips et c’est sur l’insistance de l’auteur que l’éditeur a accepté de le sortir en VCD (son et image) ; le produit sera mis incessamment sur le marché. Issu de la lignée directe de Slimane Azem et d’Akli Yahiatene, Hadi Aouaghlis chante comme eux les choses de la vie sans jamais se départir des limites traditionnelles de la pudeur kabyle. Les textes de ses chansons, qui traitent de la vie, de la mort, de l’amour, de la haine, de la trahison et de la maladie, sont d’une grande beauté littéraire et poétique et sont tous à écouter avec attention et surtout, à méditer. A l’image d’Aït Menguellat, dont il est un grand admirateur et dont il a beaucoup hérité, sa musique, aux notes bien dites et bien rythmées, accompagnant les paroles, ne se prête pas beaucoup au déhanchement, car elle est faite pour être appréciée et écoutée avec ravissement. Certains ont relevé avec bonheur que si sa musique s’apparente par moment à celle d’Aït Menguellat, sa voix en revanche rappelle parfois, surtout dans les préludes (istikhbar), celle de la diva Nouara.La première chanson Assa Del Djemaâ où il raconte les fêtes kabyles et les femmes avec leur henné, il l’a enregistrée en 1978 aux éditions Kiosque Orphée à Paris, il avait alors 20 ans. Il fait des chansons comme Akli Yahiatene — qu’il dit être son maître de toujours et qu’il chantait à tue-tête — Aït Messlayene, de Matoub Lounès et Aït Menguellat. Ce dernier, pour qui il a beaucoup d’estime, lui rendait alors de fréquentes visites à son salon de coiffure qu’il tient d’ailleurs toujours à Paris, car, affirme-t-il, la coiffure, qui est aussi une forme d’art et la musique, sont ses deux passions et dont il ne peut se passer.Bien qu’il ait quitté son village natal à l’âge de 10 ans, et qu’il en a aujourd’hui 54, et que depuis, il n’y faisait que des brefs séjours au moment des vacances, à l’entendre chanter, on croirait qu’il n’a jamais quitté ses pénates tant ses textes collent à la réalité et reflètent le quotidien des siens. Ce fait, il l’explique par l’éducation qu’il a reçu de sa famille et qui lui permet, bien que vivant 11 mois sur 12 à l’étranger, de garder toujours dans son cœur ses amis et le village qui l’a vu naître. D’ailleurs, concernant son inspiration, il soutient que c’est à partir de son village de Chemini qu’il reçoit des flashes. Et quand, ces flashes se font de plus en plus fréquents et intenses, ils se transforment en chansons qui ne peuvent que refléter la réalité de sol où elles ont émergé. S’agissant de galas, si en France, il en a animé plus d’une centaine et dont beaucoup en seule vedette, en Algérie par contre, le seul vrai gala auquel, il a participé remonte à 1992 en compagnie d’Aït Menguellat, à l’occasion de la collecte des fonds pour la construction d’un château d’eau à Barbacha. Son souhait reste de venir spécialement de France pour animer à titre gracieux une grande soirée au profit des jeunes qui en sont privés.
B. Mouhoub