Un démocrate acharné, «minoritaire» dans son patelin, mais pas pour autant désespéré, avait décidé de marcher pour la démocratie dans sa localité acquise alors, en long et en large, à l’islamisme. Cela se passait à Aïn Laloui et au fort moment de la mainmise intégriste. Notre démocrate ne réussit à rassembler autour de son projet qu’une dizaine de citoyens plus ou moins acquis à ses idées.Sachant que battre le pavé avec 10 citoyens ne fait pas de bruit, il eut une idée «géniale» : il remet les banderoles à ses comanifestants et, tous ensemble, attendaient en ce jour de vendredi devant la mosquée la fin de la prière. La «salat el djoumouaâ» finie, la dizaine de manifestants déploient leurs slogans et se mettent à la tête des fidèles qui sortaient de la mosquée donnant ainsi l’impression que Le-Tout Aïn Laloui marchait pour la démocratie.Ce qui s’était passé à Aïn Laloui n’est pas loin de se reproduire ce mercredi 20 avril par ces autres délégués qui jurent par phraséologies interposées de marcher pour « La mémoire et l’espoir » et surtout, en filigrane, pour dénoncer le dialogue.A moins que le temps ne se soit arrêté au 20 avril 2002, pour les ambitions qui continuent à se cacher derrière Ulac smah ulac, la présomption de drainer foule pour scander un mot d’ordre politique prête à… sourire. Mais dans un pays où les anachronismes ont usé la rate, il se trouvera toujours un entrefilet pour dire à peu de chose près que «les citoyens ont répondu à l’appel des archs». Ces citoyens qui, comme il est de tradition à chaque Tafsut, sillonnent les artères de Bouira, pourraient pour cette fois-ci refuser de se laisser «récupérer». Il n’est pas exclu qu’ils s’abstiennent de battre le pavé. De toute façon, la population est agacée par les prétentions des uns et des autres de faire le printemps. Un jeune hurlera ce jeudi à la place des Martyrs : « Edjet tafsut trankil (laissez le printemps tranquille) !».Les autres délégués, ceux de la CCCWB en l’occurrence, appellent à un meeting à la place des Martyrs et à un recueillement pour le 18 devant la tombe de Massinissa Guermah. S’agissant de la traditionnelle marche du printemps, ces délégués expliqueront qu’ils marcheront «avec les citoyens et non à leur tête». Quoi qu’il en soit, marche ou pas marche Tafsut sera honnêtement fêtée par tous ces jeunes que les serments politiques n’amusent plus.
T. Ould Amar