De Draâ El Mizan à Ifri

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C’est en fin d’après-midi du samedi 19 août que la décision est prise de rejoindre la localité d’Ouzellaguene.Mais, qu’à cela ne tienne, aux environs de 17h33, nous nous pointons devant la fontaine publique “Les pins”, sur la RN 30 pour faire de l’auto-stop.Avant de reprendre notre souffle, que déjà un véhicule de marque Peugeot 504 s’arrête devant nous et le conducteur nous invite à monter.

Départ de Draâ-El-Mizan Pensant avoir affaire à un quelconque clandestin, nous n’hésitâmes pas à monter. Ce n’est qu’alors que nous reconnûmes l’automobiliste qui n’était que l’ex-directeur de ce que furent les fameuses galeries algériennes.Confidence pour confidence, nous lui apprîmes notre destination alors que la sienne est son village natal à M’chedallah.Quelle chance de faire déjà près de deux tiers du trajet d’une traite, l’ex-directeur de déclarer aussitôt que nous atteindrons Maillot à 19 h comme le ferait un commandant de bord avant le décollage de son avion.Ayant toujours conduit à vitesse très réduite, nous conseillâmes à notre ami d’aller tout doucement car nous avons tout le temps devant nous et qu’il pouvait mettre en marche sa radiocassette avec choix, de nous faire entendre Matoub Lounès et nous laisser à notre évasion.La circulation à cette heure de la journée est très dense sur la RN 5 avec notamment des camions de gros tonnages.Il est 19 h et nous sommes à Raffour me dit Saïd, l’ex-directeur des galeries algériennes en s’arrêtant pour me déposer à l’entrée du village pour qu’il puisse revenir sur M’chedallah que nous avions dépassé.Les fourgons de transport de voyageurs ainsi que les bus sont très rares à la tombée de la nuit.Par expérience, la meilleure place pour faire de l’autostop est de se mettre devant une station-service ou devant l’un des multiples dos-d’âne qui ne manquent pas, surtout à Raffour.C’est la dernière solution que nous choisîmes et il n’a fallu que quelques minutes pour trouver un bienfaiteur en la personne d’un jeune Belcourtois qui se rendait à Melbou chez ses amis.Le trajet entre Raffour et Ighzer Amokrane malgré l’obscurité qui ne permettait pas d’admirer la beauté de la vallée de la Soummam a été plaisant avec cet Algérois qui n’a pas arrêté de nous parler de la mal-vie des jeunes de son quartier et des problèmes, tant du chômage que de l’emploi avec biensûr ceux qui profitent de l’embellie financière ou qui ont tiré profit de la situation chaotique du passé récent.Ne connaissant pas l’itinéraire, le jeune Belcourtois tenta de me dissuader de descendre à Ighzer-Amokrane pour que nous puissions l’accompagner jusqu’à Béjaïa mais ce n’était pas possible vu que nous avions fait la promesse de rejoindre en cette soirée l’université d’été des archs.

Arrivée à Ighzer-AmokraneC’est donc à Ighzer Amokrane qui avait revêtu ses plus beaux atout pour accueillir cet important événement que nous descendîmes.Peu importait le lieu, que ce soit au siège de l’APC, de la daïra ou autres.C’est sur fond d’une sonorisation que nous demandâmes au chauffeur de s’arrêter avant de le remercier avant de lui donner rendez-vous devant la pâtisserie du Kabyle qui fait “lamhadjab”.Eblouis par les lumières, nous traversâmes la chaussée pour nous retrouver devant le siège du FFS où se déroulait une projection-vidéo sur grand écran à l’aide d’un datachow.Sans aucune présentation, si ce n’est les salutations d’usage, nous demandâmes aux militants de Da-Elho qui étaient sur les lieux s’il nous était possible de monter sur Ifri.En guise de réponse, ils me confièrent que j’avais raté la conférence du docteur Youssef El Khattib qui venait de se terminer peu avant mais que nous n’avions pas à nous en faire pour l’hébergement et qu’un véhicule arrivera dans quelques minutes pour nous conduire vers le lieu d’hébergement.En attendant, nous continuâmes à suivre la vidéo qui retraçait l’itinéraire du fondateur du parti FFS avant que nous soyons invités à monter dans un véhicule et prendre la direction de la montagne du côté de la commune de Chemini en compagnie d’un autre citoyen d’El Goléa alors qu’un autre véhicule d’une grande marque nous suivait.

Route vers Thijounane Au cours du trajet, nous fîmes connaissance du chauffeur qui n’était autre que l’hôte qui avait mis à notre disposition sa demeure.Il s’agit de M. Rachid Naraoui qui se retrouve sans aucune étiquette politique après un long passage au FFS où il fut l’un des principaux responsables au niveau de la Fédération de Béjaïa.Sa collaboration n’est donc q’un devoir de citoyen dont celui de l’hospitalité émane d’une culture ancestrale.Notre hébergement fût des plus exemplaires, rien ne manquait et notre hôte avait tout préparé pour l’accueil de ses éventuels invités et la chance conjuguée à la providence a été de notre côté.

Notre compagnon d’El Goléa Mohamed Saïdat, tel est le nom de notre compagnon de ce soir. Agé de plus d’une soixantaine d’années, cet homme du Sud vit dans une oasis située à quelques 18 km de Méniaâ (El Goléa). C’est un fellah qui a beaucoup investi dans l’agriculture mais malheureusement ses déboires avec les autorités locales n’ont finissent pas.Lui ayant conseillé de toucher les membres de leur APW ou un de leurs députés, M. Saïdat nous confie que l’un d’entre eux lui a sans aucune honte demandé un bakchich.Par ailleurs, selon les confidences de notre compagnon, son village qui a bénéficié de plusieurs projets toujours pas réalisés mais purement et simplement détournés.Pour ce citoyen qui a parcouru plus de 1 000 km pour se rendre à Ouzellaguène, la célébration du Congrès de la Soummam est pour lui une aubaine pour rencontrer de hauts responsables de l’Etat et de leur présenter de vive voix ses doléances d’autant plus qu’il était question de la présence du président de la République.Comme M. Saidat, beaucoup de citoyens que nous avons rencontré ou qui nous ont contacté, sont venus de toutes les wilayas du pays pour régler leurs problèmes de dossiers liés aux rentes au niveau du ministère des Moudjahidines.

Cérémonie de recueillement à Ighzer Amokrane Après avoir passé une bonne nuit à Toujnait, c’est de bonne heure que nous rejoignâmes Ighzer Amokrane après avoir remercié M. Rachid Naraoui pour son hospitalité.A la terrasse du café situé en face du siège de l’APC, alors que nous nous apprêtions à prendre le deuxième café de la journée, nous dûmes assister à une prise de bec peu diplomatique entre un citoyen et un membre de l’APC locale du parti du docteur Saâdi, le RCD.En fait ce citoyen n’arrivait pas à comprendre pourquoi le RCD ne s’est pas impliqué dans la célébration du cinquantenaire du congrès de la Soummam et il reprochait également à ce militant du RCD de surcroît membre de l’APC de n’avoir pas accepté une alliance avec le FFS pour faire barrage au FLN.C’est encore une banale dispute qu’il nous faudra supporter tout en ajoutant plus de sucre à notre café qui est devenu par la force des choses plus amère.Quelque temps plus tard, nous traversâmes la chaussée pour demander à n’importe quel membre de l’organisation de nous trouver un moyen de transport pour rallier Ifri.Un fonctionnaire de l’APC nous rassura tout en nous demandant de patienter un moment jusqu’à la fin de la cérémonie de recueillement.

Dépôt de gerbes de fleurs A Ighzer-Amokrane, les autorités locales ainsi que Mme Souad Bendjaballh, ministre déléguée à la recherche scientifique, qui était arrivée peu avant, ont d’abord déposé une gerbe de fleurs sur les tombes des martyrs du Printemps noir, à savoir Kamel Makhoukhem, Farid Chilla, Saïd Akli, Saddek Ibrahim, Nadir Haddad, Nordine Haya.Le cortège précédé des scouts s’était ébranlé en direction du cimetière des martyrs de la révolution 1954 – 1962 située à une centaine de mètres plus loin où fut aussi déposée une gerbe de fleurs ainsi que la lecture de la Fatiha.En sortant du cimetière, nous entrâmes dans le local des anciens moudjahidine pour prendre une bouteille d’eau fraîche.Juste en quittant ce bureau, nous vîmes un bus qui amorçait la montée et nous lui fîmes, signe de s’arrêter et s’exécuta.Surprise des surprises, c’était celui de l’APC de Draâ El Mizan ! Ce n’est qu’en prenant place que la mémoire nous est revenue car le fonctionnaire que nous avions chargé de nous trouver un véhicule doit nous chercher.L’ascension commença. La route a été refaite avec un nouveau tapis. Il n’y a rien à dire, c’était la preuve la plus tangible que tout a été prévu pour une visite présidentielle.La circulation est dense. Plusieurs jeunes font le trajet à pied tout en tentant leur chance en faisant de l’autostop.Tout le trajet est sécurisé avec les éléments de la Garde communale et de la gendarmerie.

Arrivée à IfriPlus qu’à Ighzer-Amokrane, le village d’Ifri est en ce jour-anniversaire aussi beau qu’un jouvenceau qui convole en justes noces ou une nouvelle mariée avec toute sa belle toilette et ses bijoux scintillants de mille feux.Les gendarmes ont du mal à régler et surtout faire garer les dizaines de véhicules qui ne cessent d’arriver au fur et à mesure alors que les aires de stationnement font défaut.Nous dûmes descendre pour laisser la chauffeur du bus aller plus loin trouver une quelconque place de libre pour se garer.L’unique rue qui mène au musée, toute ornée, est déjà pleine de visiteurs de tous les âges et des deux sexes.Les gradins aménagés lors de la cérémonie de 1984, présidée par Chadi Bendjedid et où la grande chanteuse Warda avait entonné pour la première fois “Biladi Ouhibouki” sont surchargés. C’est vraiment beau et magnifique !

D’Ighil-Imoula à IfriSi les anciens moudjahidine et ceux de la grande famille révolutionnaire étaient là comme s’il s’agissait de faire un forcing, d’autres plus anonymes ont également voulu être de la fête.C’est ainsi qu’une banderole sur laquelle est inscrit “d’Ighil-Imoula à Ifri même combat pour l’indépendance nationale”, brandie par un groupe de jeunes attira notre attention.Ceci, ce n’est pas tant par cette singularité par rapport à cet événement mais tout simplement que pour nous en évoquant Ighil-Imoula ce n’est plus encore la déclaration du 1er Novembre mais simplement le souvenir de Da Ali (Feu Ali Zamoum, un novembriste, décédé le 28 août 2004).Ainsi, le comité du village, loin de toute manipulation, avait délégué ce groupe pour rendre hommage aux congressistes du 20 Août 1956 et pour transmettre le message dont le contenu reste bien sûr l’écriture authentique de l’histoire de notre révolution.

“Y a la Dépêche !”En faisant les va-et-vient, nous renconnûmes plusieurs figures qui étaient d’anciens responsables au niveau de l’Etat, les anciens maquisards arboraient leurs médailles et se congratulaeint !”Alors que nous regardions vers les deux minuscules pièces qui avaient abrité les congressistes dont l’accès est interdit, une voix venant de derrière nous se fit entendre : “Y a La Dépêche !”C’était Si Saïd que nous avions rencontré il y a quelques jours et qui nous avait donné rendez-vous en ce lieu pour nous faire goutter les vraies figues et la vraie eau d’Ifri comme en 1956.Après les salutations, nous nous trouvions près de la maquette du projet de construction du nouveau mémorial.Nous lui demandâmes de nous suivre vers le cordon de sécurité qui était placé. Faisant un signe pour passer, deux agents nous refusèrent gentiment l’accès.Voyant la mine de notre petit vieux Saïd, alors que nous n’avions ni ordre de mission, ni carte de presse, ni badge ni même une carte d’identité ou un quelconque papier à la main, nous murmurâmes à l’oreille d’un des agents que nous étions de la presse en précisant “la Dépêche de Kabylie” et sésame s’ouvrit !Nous fîmes un tour à l’intérieur du musée qui sera pris d’assaut par des centaines de citoyens un peu plus tard alors que nous avions le privilège d’en faire la visite tout à notre pendant alors que les équipes de la Télévision d’apprêtaient à faire leur travail.

Essaïd N’Ait KaciA suivre

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