C’est un beau spectacle que nous offrent ces interminables processions de petits bambins pépiant, palpitants de joie et qui se dirigent vers le savoir. Ce sont eux aussi qui animent aussi bien les artères de nos villes que les sentiers battus de nos campagnes. Qui ne se souvient pas de sa première rentrée ? Qui ne se souvient pas aussi de cette première phrase de Fouroulou ? “Je me souviens, comme si cela datait d’hier, de mon entrée à l’école. J’étais seul face à la casserole pleine de lait, les yeux pleins de sommeil…”, raconta Mouloud Feraoun dans son roman “Le fils du pauvre”. Ces petits potaches comme des nuées colorées tendant leurs bras vers un avenir serein bon et beau. Mais que leur réserve ces “temples du savoir ?”En tout cas, c’est une autre année qui commence. une quatrième de la refonte d’un système tant décrié car il a engendré des séquelles dans des générations après une jeunesse jalonnée de misère sur les bancs de l’université pour décrocher ce fameux “sésame ouvre-toi !” pour venir grossir à la fin ces rangs d’universitaires dont les vêtements sont usés à force de soutenir les murs avec leurs dos.Le constat est fait : l’école algérienne est sinistrée. De replâtrages en replâtrages, rien n’augure un avenir meilleur même si bien avant que la “vraie réforme” n’arrive à terme pour une génération, on parle de satisfaction. La réforme réelle n’apporte de résultats qu’après des années. Alors cessons de nous tromper : les résultats obtenus en juin pour les examens du bac et du BEF ne sont qu’une norme ou un satisfecit car, dans les pays développés, le nombre de points gagnés dans les taux de réussite vont crescendo, c’est-à-dire en progression continuelle, d’année en année et non de façon décroissante et sporadique.Si dans notre cas, on dit que c’est pour la première fois que le taux d’admission au BEF est le meilleur depuis l’indépendance, pourquoi alors le remplacer par le BEM ? La réforme entame sa quatrième année… Cependant, les pédagogues et ceux chargés de l’encadrement des enseignants ainsi que ces derniers ne doivent aussi oublier que c’est une réforme appliquée à “la sauvette” pour ne pas dire de manière clandestine, parce que depuis sa mise en place, les élèves allant au cycle primaire traînent derrière eux les carences de l’école fondamentale. A titre d’exemple, les élèves de la quatrième année moyenne font une année de plus que leurs aînés de l’ex-9e AF qui n’ont fait que trois ans au collège, ceci d’une part. Quant aux programmes qu’ils ont suivis, il ne leur conviennent aucunement quand les enseignants savent que les programmes actuels sont destinés en principe aux enfants qui feront leur quatrième année au primaire, cela d’une autre part.En tout cas, en dépit de toutes ces remarques, laissons tout de même nos élèves rêver. Ces sept millions de chérubins ont-ils les mêmes chances de réussite ? La réponse ne serait-elle aussi que relative ? Cette dernière ne se limite pas seulement à la démocratisation où l’école obligatoire pour tous, mais d’autres facteurs rentreront en jeu dès le premier pas à l’école. Certains n’auront pas de moyens. Il ne suffit pas de voir que le nombre d’élèves qui bénéficient de la prime de scolarité destinée aux nécessiteux : ils sont plus de trois millions chaque année. Ce facteur est déterminant quand on sait que ces derniers sont confrontés à de multiples problèmes durant toute la scolarité, allant du manque de moyens pédagogiques tels les manuels qui voleraient à leur secours quand il assimilent moins vite en passant par le manque de restauration dans les coins les plus reculés jusqu’au transport scolaire qui lui aussi fait défaut dans les régions déshéritées. Même si d’autres arrivent tout de même à aller plus loin dans leurs études, l’espoir de dénicher un hypothétique emploi relèverait du parcours du combattant. Mais quelle issue ou quelle échappatoire pour casser ce cercle de misère qui se resserre sur nos diplômés qui, pourtant, font les beaux jours des pays développés quand ils traversent les mers pour s’installer ailleurs ? Il faudrait avant tout revaloriser la mission de l’enseignant du primaire jusqu’à celui de l’université car ce sont avant tout ceux-là qui sont l’incarnation de la noblesse. Cela étant écrit, ne soyons pas tout de même pessimistes afin que nos disciples pénètrent dans nos écoles du bon pied. Bonne année scolaire à tous ces potaches aux joues vermeilles qui gesticulent sur les chemins de l’école…
H. N.