Promesse détournée

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(2e partie et fin)

Pris de compassion pour ce pauvre paysan, le chacal lui propose une solution à la condition qu’il lui offre un agneau bien gras.L’affaire est conclue. Sous les conseils du chacal, le paysan se rend aux champs pour la quatrième fois après s’être saigné à blanc pour s’acheter un autre bœuf pour terminer les labours.Il se munit d’une grosse hache. Comme à l’accoutumé, au moment de déjeuner, le lion se présente à lui pour lui réclamer un bœuf.Se saisissant de la hache cachée derrière son dos, le paysan lui assène à la volée plusieurs coups sur la tête. Avant qu’il ne se rende compte de ce qui lui arrive, il git dans une mare de sang.Le chacal qui avait assisté de loin à la scène est très content. Ses conseils avisés ont permis au paysan de se débarrasser à tout jamais du lion qui l’avait presque réduit à la mendicité.Il réclame son dû. En arrivant chez lui, le paysans est heureux, il annonce triomphalement à sa femme que le lion qui le terrorise est passé de vie à trépas grâce aux conseils de Si Mh’amed. Pour tenir sa promesse, il égorge un agneau dodu, qu’il devra porter au chacal dans les bois ou aux champs. Sa famille se contentera des abats. Mais sa femme qui n’avait pas mangé de la viande d’agneau depuis plusieurs mois n’est pas de cet avis. A l’insu de son mari, elle subtilise la viande de l’agneau et la remplace par son lévrier, à qui elle demande de se lover à l’intérieur du plat qu’elle couvrira d’un tissu blanc.Son mari ne voit que du feu. Le lendemain en se rendant aux champs, il dépose le plat dans un coin et appelle le chacal qui rodait dans les environs. Il s’éloigne pour reprendre ses labours. Le chacal s’approche du plat en se pourléchant les babines. Dès qu’il se met à découvrir le plat, un grognement se fait entendre. Le lévrier se détend comme un ressort et lui saute dessus. Il n’eut la vie sauve que grâce à sa course éperdue.Après s’être mis à l’abri, tremblant de peur, le chacal dépité lance ces mots passés depuis en proverbe :-Irgazen d’ikhedaâenAh’lil ouid’ ithen itsamnen !(Les hommes sont des ingrats, malheur à ceux qui les croient !)Après avoir mis en fuite le chacal, le lévrier revient se coucher dans le plat. A la fin de la journée, le paysan est étonné que le chacal n’a pas touché à la viande qu’il lui avait ramenée comme promis. Il regarde de tous les côtés pour voir le chacal mais point d’animal.Il prend le plat et le ramène à la maison et dit à sa femme qui faisait semblant de tomber des nues.- Si Mh’ahmed our-d youssi araAk’soum our imecth araSoubbith iyidh a lalla !(Le chacal n’est pas venu, la viande n’a pas été mangée, prépare-là pour cette nuit !).Sa femme rit sous cape, son coup a réussi. Le chacal n’a rien mangé, à eux les morceaux d’agneau grassouillets.En préparant la viande, elle chantonne ces vers passés à la postérité.- Ay ar gaz ay amaghvounOk’essen d’i lekhla am sard’oun ! »Our kefount ethhoudjay inouOur kefoun irden tsemzine. As n-elaïd anetch aksoum tsh’emzine ama ng’a thiouanzizine. »(Mes contes ne se terminent comme ne se terminent le blé et l’orge. Le jour de l’aïd, nous mangerons de la viande et des pâtes, jusqu’à avoir des pommettes rouges et saillantes).

Benrejdal Lounes

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