Balade à Tunis

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De Tunis Aomar Mohellebi

Il est quinze heures en ce jeudi pluvieux. La pluie tombe pour la première fois depuis la fin de l’été et les touristes affluent encore sur Tunis. C’est le Boulevard Bourguiba qui est le plus convoité, particulièrement cette place. L’endroit est pratiquement squatté par les Algériens. Il y a d’abord la station des fraudeurs vers Annaba ou Constantine. “En été, plus de deux cent navettes sont enregistrées par jour vers Annaba”, nous dit Djamel, à bord de sa Laguna. Il transporte des vacanciers algériens depuis dix ans. Un simple calcul fait ressortir qu’un millier d’Algériens par jour se rend à Tunis durant la saison estivale, en comptant bien sûr la quarantaine d’autres fraudeurs qui assure la ligne Constantine-Tunis, mais sans prendre en compte ceux qui viennent à bord de leurs propres véhicules, dans les avions et dans le cadre des voyages organisés. A partir d’Annaba, le trajet coûte 1200 DA, en plus de 300 dinars, le prix d’une quittance que tout voyageur doit acheter au guichet des contributions. En cas d’omission, il suffit d’informer le chauffeur pour que ce dernier règle le problème en un clin d’œil mais en déboursant deux cent dinars de plus. Le chauffeur du véhicule décuple ainsi sa course et peut empocher 5 600 DA au lieu de 4 800 DA. Ceci dans le cas où le véhicule ne tombe pas dans un barrage de gendarmerie. Même quand cela arrive, comme c’est le cas lors de notre déplacement, il suffit au fraudeur de remettre la modique mais néanmoins salvatrice somme de deux cents dinars au gendarme qui l’a arrêté pour que tout rendre dans l’ordre. Le chauffeur avise les voyageurs avant de s’arrêter à un point de contrôle près du pont de Oued Kebir ( El Kala) : “Vous dites que nous allons à El Kala”. Ce scénario semble être un rituel puisque le conducteur n’a pas été du tout pris de panique.Aux abords des pompes à essence et des restaurants des villes frontalières, les vendeurs de devises sont nombreux”. A peine le véhicule est arrêté que l’un d’eux surgit avec une liasse de billets. “Aux postes frontaliers, l’attente pouvait durer des heures il y a quelques jours, nous informe le conducteur”. Mais en ce 11 septembre, la procédure prend environ une heure entre les deux postes. Celui de l’Algérie est bien aménagé avec une dizaine de guichets et deux entrées, mais le poste frontalier tunisien est joignable après cinq minutes de route. Il est très exigu avec seulement deux guichets. Le conducteur rassure que les choses vont se muer positivement très bientôt puisque les travaux d’un nouveau poste, de loin meilleur, sont en voie d’achèvement. Dans le véhicule, un médecin de Skikda part pour passer dix jours de congé. Il a loué un appartement pour dix jours. Et c’est une habitude chez lui de venir à Tunis pour se reposer. Un couple se déplace pour effectuer les formalités d’émigration. Dans le «taxi», la discussion entre les voyageurs n’est entamée qu’après avoir traversé les frontières. Subitement, les langues se délient. Mille et un sujets sont abordés. “Est-ce que c’est vrai qu’en Kabylie, on ne paye pas l’électricité, Tamazight est enseigné dans combien d’écoles, les femmes portent-elles ou non le voile, C’est vrai que les Kabyles s’énervent beaucoup ?” Sont, entre autres, les questions étranges que posent les voyageurs comme si la Kabylie était située sur un autre continent. Il n’ y a que le médecin qui connaît un peu la wilaya de Tizi Ouzou puisque dans le cadre de son travail, il a l’habitude de se rendre à Mekla. La première ville qui accueille le visiteur est Tabarka, l’une des nombreuses cités touristiques que compte le pays d’Abou El Kacem Echabi. Quelques touristes européens sont reconnaissables. La majorité est d’un certain âge. La Tunisie est choisie par les européens principalement à cause du taux de change de l’Euro qui leur permet de s’offrir des vacances dans des hôtels classés avec un prix moindre. Ceci offre aussi l’opportunité à la Tunisie de faire du tourisme sa première source de devises. Le pays offre toutes les conditions nécessaires à un touriste, notamment la principale : la sécurité. A Tunis, une femme parée de bijoux, son portable collé à l’oreille, peut circuler toute seule à minuit sans encourir aucun danger. La sécurité est totale.

A.M.

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