Il est des habitudes, des comportements qui ont la peau dure et qui résistent à tout, même à l’usure du temps. Comme cette propention à doper les prix à l’approche et pendant les premiers jours du carême. Le marché des fruits, calme pendant tout l’été, a brusquement fait une embardé. Aucun produit de la terre n’est épargnée par les hausses que rien ne saurait justifier, pas même les explications éculées des charognards qui sévissent dans nos marchés. La pomme de terre, légume majeur et incontournable de notre ordinaire est passée, en un laps de temps infinitésimal de 18/20 DA à 50 DA ! On aurait voulu mettre K.-O les petites bourses qu’on ne se serait pas pris autrement. Le reste des légumes, comme de juste, a suivi la même courbe ascendante. Ainsi, la courgette qui d’ordinaire ne sert pas à grand chose et est même considérée comme un légume sans intérêt est offerte à partir de 70 DA. Quant à la tomate, de qualité souvent médiocre, elle est cédée à 50 DA. Le choux, le vil choux, lui, flirte avec les 70 DA ! Tous ces légumes et ce n’est sûrement pas le fruit du hasard, entrent dans la composition des plats incontournables que le Ramadhan impose. Il serait plus juste de dire que l’homme s’impose ! La frénésie des achats, le besoin irrépressible de dépenser font en vérité le lit des spéculateurs dont le seul trait d’intelligence est celui de bien connaître les comportements et us de leurs compatriotes. Tout sens de la mesure est relégué aux oubliettes pendant ce mois, censé être pourtant celui des sacrifices, du don de soi et du partage. Un furtif coup d’œil aux poubelles suffit à nous convaincre du contraire : elles regorgent de victuailles de la veille, car celui-là même qui s’oblige à emprunter, histoire d’atteindre un certain standing, ne peut se sustenter de restes ! Suprême frénésie, il n’est pas rare de voir des morceaux de viande dépasser des sacs-poubelles. De même, la zalabia, ignorée tout le reste de l’année, doit dès le premier jour trôner en bonne place sur la table. Avant de prendre le chemin de la poubelle… Curieuses habitudes alimentaires que les charognards exploitent à fond, au mieux de leurs intérêts.
Mustapha Ramdani