… les Dezdeg reçoivent le premier invité du sacré mois. Il s’agit de Moumouh, un cousin plus ou moins éloigné, venu du village retirer sa carte d’assurance à Alger. Les jeunes Dezdeg ne connaissent pas le lien de parenté qui les lie à leur hôte. C’est un cousin, c’est tout. De toute façon, tous les gens du village sont, d’une manière ou d’une autre, cousins. Et puis quelqu’un du village est toujours le bienvenu. Ça change un peu de l’ambiance yakhotiste qui distingue la famille algéroise. Et pour casser cette ambiance y a pas mieux que Moumouh, Moumouh Lboulitik, comme on l’appelle di taddart pour le distinguer des autres Moumouh. Il a fait les onze métiers et adhéré à soixante partis politiques. Il n’y a qu’une seule chose qu’il n’a jamais faite de sa vie : travailler. D’ailleurs le père Dezdeg se demande comment daâwessu-agi a réussi à avoir sa carte d’assurance. Mais bon, “yezmer i kulec”, finit-il par admettre. Il n’a pas tort Chaâbane. Moumouh est capable de tout. Il peut même apprendre à jouer aux dominos à un chimpanzé. Après les embrassades et les “amek tella yemma-k, baba-k…”, tout le monde s’installe dans le salon. Tous sont accrochés aux lèvres de Moumouh Iboulitik. Le vieux Rezqi s’est même séparé de son ameqful. C’est dire !- Aha a Momouh, raconte amek akken larac-nni, la Kabylie-nni ?- Et ben, figurez-vous que pas loin que ce matin, j’étais en communication avec tous les délégués n larac… j’ai même contacté si H’med.- Ihuh…!-… ih, il n’y a pas que lui, j’ai appelé daghen Da l’Hocine, Ferhat, Benyounès, Sadi, BRTV, JSK, Rebrab… nnigh-asen ad nemlil di stade n 1er Novembre pour un conclave extraordinaire. Il faut que ça change !!- Ihuh…!Au moment où il allait développer, l’adhan invite à la rupture du jeûne. Moumouh s’arrête sec et change de ton : “Ahay tura ad necc taleqimt, après ad as-n-qesser un coup”.On n’entendait plus, pendant plus d’une heure, que le bruit des fourchettes, cuillères, et de temps en temps le “awi-d kan ifelfel-nni!”
T. Ould Amar