“Le film doit être restitué à la population”

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La dépêche de Kabylie : Lounis Ait Menguellet, vous vous êtes impliqué de plain-pied, dans la réalisation du premier film en kabyle La colline oubliée. Il se trouve malheureusement qu’on a tendance à oublier ce fameux bijou en langue kabyle, qui constitue une légende attachée au défunt écrivain et chercheur Mouloud Mammeri, le public kabyle se trouve frustré par l’absence de ce film kabyle sur nos écrans au même titre que les autres films, qu’en dites-vous ?

Aït Menguellet : C’est vrai que cela fait belle lurette qu’on ne l’a pas vu sur nos écrans. des personnes ont tout donné et se sont sacrifiées pour la réalisation de ce film, et maintenant le grand point d’interrogation, qui est le producteur qui bloque ce film ? C’est une question à laquelle je ne peux répondre. En parlant du film La colline oubliée, le jour où Abderrahmane Bouguermouh est venu pour la réalisation de ce film, on a monté une association pour réunir les fonds et on a tout fait pour aider et sensibiliser les citoyens en général, qui ont répondu spontanément pour la réalisation de ce film. Mais aujourd’hui, on ne le voit pas. Je ne sais entre quelles mains le film se trouve. A cette question, il faut savoir qui est le producteur et pourquoi il le bloque. Voilà, c’est une très bonne question qu’il faut poser et mettre sur la place publique.

Selon le réalisateur Abderrahmane Bouguermouh, le film est pris en otage par son coproducteur en France, parce que ce dernier ne veut pas du dinar algérien. Alors que le film est à 85% de réalisation algérienne et destiné au public algérien …

Je suppose que le produit est tombé chez un producteur qui n’a aucune sensibilité et qui se dit travailler pour la cause juste kabyle, alors qu’il n’a rien à voir en réalité avec le kabyle. Maintenant, s’il ne vise que ses propres intérêts, il est en France et il ne veut pas de dinars. Effectivement la question reste posée. Ce film, doit bien sortir au grand public.

L’on apprend à travers les médias que BRTV songe à prolonger ses programmes pour atteindre les 24/24 heures, alors qu’avec les programmes existants déjà, la chaîne souffre du manque de qualité des programmes proposés, qui ne répondent pas à la demande des téléspectateurs, qu’en pensez-vous ?

C’est malheureux que l’on continue à persister dans la médiocrité, jusqu’à ce qu’elle fasse autant de dégâts. C’est l’éternel sentiment de regret qui revient à chaque fois. Dans le meilleur des cas, on essaye de prévenir, avant que l’on n’arrive au malheur, mais en approchant la vérité des choses, l’on se retrouve seul contre tout le monde, alors on se résigne au silence. Si l’on veut arrêter la médiocrité, on se fait des ennemis, sans pour autant que l’on sache faire la différence entre la raison et la déraison. On vous dit pourquoi vous êtes contre ceci et pourquoi vous êtes pour cela. Cela a toujours été ainsi.

Il y a aussi le projet de lancement d’une autre chaîne en kabyle en Algérie…

Sincèrement, je fonde beaucoup d’espoirs sur une chaîne en langue kabyle, chez nous ici en Algérie, proche de la réalité quotidienne. Par contre, une chaîne kabylo-française ne m’interpelle pas. Mais une chaîne en langue kabyle en Algérie, avec une gestion de qualité et ouverte sur la société, cela ne pourra qu’apporter un plus pour le pays.

Justement, pour réussir une chaîne en langue kabyle, quelles sont les grilles et programmes qui peuvent répondre aux besoins du téléspectateur pour être à la hauteur de ses attentes ?

Une télévision doit être riche dans ses programmes et variations. Pour cela, je pense que l’on peut faire quelque chose de respectable dans ce sens.

Nous avons de très bons réalisateurs, comédiens, chanteurs et scientifiques, il faut mettre les moyens à leur disposition. Justement, l’on parle de la chaîne kabyle en France. N’oublions pas que c’est une chaîne privée qui nous prive de tout. C’est à nous tous d’être à ses côtés, pour qu’elle soit mise entre de bonnes mains.

Lounis Ait Menguellet est-il optimiste pour l’avenir de la langue tamazight, que ce soit dans l’enseignement, la production intellectuelle, scientifique et productive en générale ?

Bien sûr et heureusement. Il y a un potentiel extraordinaire, qu’il faut savoir gérer, si l’on veut sortir de la médiocrité.

Chacun dans son domaine, il faut bien que toutes nos potentialités soient exploitées dans le sens du développement et la promotion du produit de qualité surtout. Sinon, on ne fait que tourner autour du passé,sans pouvoir nous débarrasser du carcan du sous-développement. Rien n’empêche de construire l’avenir, si on le prépare sur les bases d’un consensus fiable et efficace.

A. C.

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