Le Fonds de la steppe mis à contribution

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Articulée autour du décret exécutif 02-248 du 23 juillet 2002 fixant les modalités de fonctionnement du compte d’affectation spécial intitulé FLDDPS (Fonds de lutte contre la désertification et du développement du pastoralisme de la steppe) et des textes d’application y afférents (décision 305 et 308), la nouvelle orientation du développement rural en milieu steppique a pour ambition de revitaliser ces vastes étendues, de valoriser leurs potentiels naturels et de désenclaver les hameaux et bourgades qui y sont implantés. À ce dispositif de soutien que gérait auparavant le HCDS (Haut commissariat au développement de la steppe) est venu se greffer le nouveau schéma des PPDRI (Projets de proximité de développement rural intégrés) discuté lors de la réunion walis-président de la République au début du mois en cours dans le cadre du Plan de soutien au renouveau rural (PSRR).

Wilaya de l’intérieur, Bouira est, sur son flanc sud, considérée comme un territoire steppique. La ville de Sour El Ghozlane, située à peine à 32 km du chef-lieu de wilaya, est la porte des Hauts-Plateaux du Centre à partir de laquelle s’ouvrent les horizons ocres et plats de la vastitude steppique.

Le col de Dirah, haut de presque 1100m d’altitude, marque nettement la limite entre le Tell et la Steppe. Hormis les poches de pinèdes issues des reboisements réalisés pendant les années 1980, la végétation se réduit de façon drastique à partir de cette latitude. Quelques buissons par-ci, quelques petits vergers enfoncés dans les berges de l’Oued Djenane par-là, parsèment de grandes étendues de terres où les agglomérations sont trop dispersées pour apprécier sur-le-champ l’importance de la présence humaine.

En tout cas, la plus vaste commune de Bouira, à savoir Taguedite qui s’étale sur 261 km, n’abrite que 13 000 habitants. Les quelques hameaux qui composent ces contrées sont dissimulés derrières quelques buttes rocailleuses. Mais souvent, l’habitat reste isolé. Il n’est pas rare de rencontrer deux maisons perdues dans la plaine et dont les toitures, vues de loin, se confondent avec les pâturages herbacés qui leur sont attenants.

Ce qui, en revanche, marque sa présence physique de la manière la plus rituelle c’est bien le cheptel ovin dont les troupeaux sont disséminés sur toute l’étendue des parcours steppiques.

Les communes les plus méridionales de la wilaya de Bouira s’étendent comme un croissant steppique de Ridane à l’ouest (frontalière avec la wilaya de Médéa) jusqu’à Taguedite à l’est (frontalière avec les wilayas de BBA et M’sila). Au centre, on rencontre successivement Maâmora, Dirah et Hadjra Zerga. Ce territoire dépend administrativement des daïras de Sour El Ghozlane et Bordj Okhriss.

L’économie locale est caractérisée par un élevage intensif d’ovins et la culture des céréales. Ce pastoralisme, auquel s’ajoute un certain semi-nomadisme, s’exerce de la façon la plus anarchique en matière d’exploitation des parcours. La végétation steppique ne cesse de recevoir les coups de boutoir d’une exploitation effrénée du capital végétal au point de susciter les plus grandes inquiétudes des techniciens en la matière et des pouvoirs publics.

Le problème ne se situe pas au niveau d’une ‘’coquetterie intellectuelle’’ qui s’appelle la défense de la biodiversité- une préoccupation noble et sérieuse au demeurant-, mais surtout sur le plan de l’offre fourragère qui a dangereusement diminué et sur le plan de la stabilité des sols qui a reçu un terrible coup du fait des surpâturages qui ne font que s’aggraver.

Les éleveurs pensent qu’ils n’ont pas d’autre choix que de continuer à faire paître leurs bêtes sur les collines dénudées et les berges chétives de Taïcha, Dhrabnia et M’hezzem. Ils ne se rendent pas compte tout de suite de la menace qui pèse sur leurs propres troupeaux.

Quant aux pouvoirs publics, et par l’intermédiaire du HCDS, des services des Forêts et de l’Agriculture, des actions de renforcement et de repeuplement de certaines zones steppiques ont été initiées par le passé, mais les résultats ne sont guère brillants. A peine les chantiers de plantations déguerpissent des lieux, les plantations sont détruites par les troupeaux. Les quelques espaces plantés par le Service national dans le cadre du barrage vert et les périmètres réalisés par le HCDS au début de cette décennie en atriplex et figuier de Barbarie ont connu un sort funeste ; ils ont été broutés bien avant maturité.

Déjà malmenés par la sécheresse qui a inauguré le nouveau siècle et soumis à une pression intolérable des troupeaux ovins, les espaces steppiques de la wilaya de Bouira s’appauvrissent chaque jour davantage. Au vu de cette menace de désertification qui pèse sur une bonne partie du territoire de la wilaya, un plan d’action plus rigoureux tendant à réglementer les parcours, à en enrichir la teneur et à améliorer la condition de vie des habitants qui y vivent serait fortement souhaitable.

Depuis l’été dernier, les actions de développement menées par le HCDS sont renforcées par le nouveau dispositif des projets de proximité de développement rural (PPDR) initié par la Direction générale des Forêts. Cette dernière compte, sur la base du financement par le biais du FLDDPS, initier de nouveaux projets dans les deux daïras de Sour El Ghozlane et Bordj Okhriss. Seront concernés les activités agricoles et artisanales, les ouvrages hydrauliques (petites retenues, abreuvoirs, canaux de dérivation, captages de sources), les actions de protection du sol (reboisements, corrections torrentielles, fixations de berges) et du développement de l’offre fourragère par l’amélioration des parcours (installations de nouveaux pâturages qui concordent avec l’écologie de la région). Notons que la zone sud de la wilaya de Bouira est déjà ciblée par le programme complémentaire des Hauts-Plateaux décidé par le président de la République lors du Conseil des ministres du 27 février 2006. Ce programme comprend toutes les actions de développement, de diversification des activités, d’amélioration de niveau de vie et de désenclavement qu’auront à piloter pratiquement toutes les directions de wilaya (travaux publics, agriculture, éducation nationale, santé, culture,…). La première tranche de ce programme est déjà inscrite au niveau de la DPAT de la wilaya. La seconde le sera au courant de l’année 2007. En outre, le Projet d’emploi rural (PER2), cofinancé par la Banque mondiale pour une période de cinq ans, est en phase de réalisation depuis décembre 2005.

Amar Naït Messaoud

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