Les esquives de Mohamed Terbache

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Tout au long de son audition, le ministre, entendu en qualité de témoin, ne faisait que décliner sa responsabilité dans cette affaire, en invitant, notamment, les avocats de la défense à poser leurs questions à l’actuel ministre des Finances, Mourad Medelci. La présidente du tribunal, Mme Fatiha Brahimi,interroge l’ancien ministre au sujet du rapport envoyé par la Banque d’Algérie, par Ali Touati, le 18 décembre 2001,et dans lequel ont été consignées de graves infractions et anomalies sur les opérations de commerce extérieur. Terbache rappelle qu’il n’était pas encore désigné en tant que ministre durant cette période. Mme Brahimi lui a demandé, alors, quelle a été la première fois qu’il a eu à entendre parler du dossier en question. « J’ai reçu une communication du directeur de cabinet du chef du gouvernement me demandant quelle suite a été donnée à ce rapport. Après vérification, j’ai remarqué que c’était un dossier envoyé par la Banque d’Algérie. J’ai demandé au secrétaire général, Abdelkarim Lakhal, un topo sur la teneur du rapport. Il s’est avéré qu’on l’avait reçu. Je lui avais demandé de mettre sur pied une commission d’inspection pour répondre à l’interrogation de directeur du cabinet », explique-t-il. L’ancien argentier du pays ajoute que ce dossier ne remplit pas les conditions nécessaires permettant au ministre des Finances de déposer une plainte contre Moumen Khalifa. Sur ce, la magistrate intervient pour lui rappeler que Abdelkarim Lekhal a soutenu que Ali Touati, vice-gouverneur de la Banque d’Algérie, avait rédigé le rapport avant de l’envoyer au secrétaire général du ministère. « Le rapport devait logiquement arriver à son destinataire », fait-t-elle remarquer, avant de lui demander : « Comment se fait-il que ce même rapport ne soit pas arrivé chez vous ? ». Terbache répond qu’il a été obligé de demander une autre copie au vice gouverneur devant l’inexistence du rapport envoyé par Ali Touati. « Au niveau des enregistrements, y avait-il ce qui prouvait que le rapport était

arrivé? » l’interroge la juge. L’ancien ministre rétorque qu’il y avait un reçu d’enregistrement. Mme Brahimi l’interroge au sujet de la lettre de rappel envoyée par le vice-gouverneur de l’époque, Mohammed Leksaci, dans laquelle était demandée la suite à donner au rapport de la Banque d’Algérie. « Je ne l’ai pas reçu », lâche Terbache. A la question de savoir s’il avait demandé des explications sur la perte du rappel, l’ancien ministre répond par l’affirmative. Voulant aller au fond des choses, Mme Brahimi l’interpelle sur les dispositions qu’il a eu à prendre après avoir demandé et reçu la copie du rapport. « J’avais installé une commission présidé par le secrétaire général, lequel a rédigé et convoyé un rapport au chef du gouvernement le 11 décembre 2002.Ce rapport imposait au ministre des Finances de déposer une plainte », relate-t-il. Auparavant, il avait déclaré ne pas avoir des inspecteurs assermentés pour déposer et interpeller la justice sur ces violations. Irritée, la juge lui rappelle que cela n’était pas une excuse. « La loi 90-10 relative au crédit et à la monnaie habilite la Banque d’Algérie à prendre les dispositions nécessaires », a-t-elle estimé. Mohamed Terbache a affirmé, qu’après l’assermentation des agents de la Banque d’Algérie, il a été procédé au dépôt de plainte auprès du Procureur général près le tribunal d’Alger. Non convaincue par les réponses de l’ancien ministre, Mme Brahimi souligne que le fait d’avancer l’alibi de l’inexistence d’agents assermentés, ne constituait en aucune manière un écueil pour déposer une plainte, d’autant plus que la loi ouvre le champ à d’autres organismes afin de mettre en application la loi. « Le texte relatif à l’assermentation des experts est facile », renchérit-elle. A cette précision, Terbache demeure de marbre. « La question reste posée », a constaté Mme Brahimi. Les avocats de la défense ont pris le relais pour assaillir Terbache de questions pertinentes et surtout gênantes. Celui-ci a invité, avec flegme et à maintes occasions, les avocats à poser leurs questions à l’actuel argentier du pays, Mourad Medelci. A de rares exceptions, il bredouillait quelques réponses laconiques. La question de Me Méziane était relative aux violations liées au transfert des changes consignés dans le rapport il demande si elles relèvent des structures du ministre des Finances ou d’autres structures. Terbache relève que les transferts sont du ressort de la Banque d’Algérie, alors que les dépassements sont du ressort du ministère des Finance, lequel est habilité à saisir la justice. De son côté, Me Bourayou a tenté de savoir quelle a été sa responsabilité après le départ de Abdelwahab Keramane, au moment où cinq rapports avaient déjà établi des infractions à la loi du change. Là encore, l’ancien argentier refuse de répondre et préconise à l’avocat Khaled Bourayou de poser cette interrogation à Mohamad Leksaci, gouverneur de la Banque d’Algérie. Un autre avocat a pris la parole pour lui demander s’il a bénéficié de gratuité auprès de Moumen Khalifa. Négatif, répond Terbache. L’intervention fort attendue du ministre des Finances, Mourad Medelci, sera-t-elle l’occasion de nouvelles révélations ? Attendons pour voir.

Hocine Lamriben

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