Le tribunal criminel près la cour de Blida a auditionné, hier, Hamid Foufa, expert judicaire, au 23e jour du procès Khalifa dans son volet relatif à la caisse principale. Il rappelle que sa mission a débuté le 12 mars 2005. Elle consiste à vérifier les écritures entres sièges comme étant des transferts de fonds. Selon les résultats de l’enquête lue par Foufa devant le tribunal, il relève des anomalies dans l’agence de Blida où les sommes de 1000 DA, 45 000 FF et
16 000 euros n’ont pas été trouvées dans la caisse principale alors qu’un chèque de l’ordre de 10 000 Da n’a pas été encaissé dans l’agence de Chéraga.
Pour ce qui est de l’agence des Abattoirs, le préjudice été de 517 millions DA avec 102 écritures non justifiées. Un autre retrait de 14 millions DA était injustifié dans l’agence de Koléa tandis qu’un montant de 485 millions de centimes n’a pas été trouvé dans l‘agence d’El Harrach dont 11 écritures non justifiées. S’agissant du préjudice de l’agence d’Oran, il s’élève à 74 millions DA dont 35 écritures en dinars et 3 écritures en francs français. Foufa estime le préjudice total de toutes les agences à 1,092 milliard de DA.
Pour lui, ce montant est loin de refléter la réalité, puisque, dit-t-il, il faut attendre la liquidation pour avancer un chiffre exhaustif. La magistrate intervient pour lui demander de s’expliquer au sujet de l’EES trouvé dans le compte de Meziane Ighil. Foufa répond qu’il y a une volonté de dissimuler la destination des fonds. Dans son exposé, l’expert donne l’exemple de l’agence d’Oran où les fonds de certaines entreprises n’ont été trouvés ni dans les comptes de l’entreprise en question ni dans la caisse principale. D’après lui, cela est une «sortie inexpliquéede fonds». Le procureur lui demande d’expliquer la demande de crédit sur un simple bout de papier sur lequel est griffonné le montant du prêt. Foufa répond que c’est une «opération inconsciente» et d’ajouter que les EES sont utilisés pour justifier le trou financier.
Avant lui, c’était Meziane Ighil qui avait répondu aux questions du procureur général. Avant-hier, Ighil affirmait que la direction du sport était dirigée par Maamar Djebbour, actuellement journaliste sportif à la radio Chaîne III, qu’il aidait dans sa misssion. Le procureur lui demande pourquoi le club qu’il dirigeait n’avait pas de convention contrairement aux autres clubs de football. L’accusé : «Moumen Khalifa était un fan du club. Ce n’était pas un sponsoring mais un parrainage. Il prenait en charge l’équipe à 70%».
Le procureur lui demande quelle était sa mission. Ighil répond qu’il était sollicité pour des informations concernant le mode de fonctionnement et d’organisation des clubs. Le procureur l’interroge s’il n’avait pas dépassé le cadre de ses prérogatives. «Il m’a donné une mission. Je lui avais fourni les informations nécessaires», estime-t-il. Il affirme avoir vendu du matériel sportif à certains clubs. Meziane Ighil révèle que le sponsoring de Khalifa touchait non seulement des clubs de DI et II, mais aussi des jubilés d’anciens joueurs nationaux. Mme Brahimi prend la parole pour l’interroger si le chèque couvrait les 4 millions DA. L’accusé : «Je crois qu’il les couvrait». La juge lui fait savoir qu’un EES a été trouvé dans son compte avec une somme de 2,8 millions de DA. L’ancien entraîneur de l’équipe nationale dit ignorer ce fait. «La gestion des comptes, ce n’était pas moi», dit-t-il. La juge : «Est-ce que les présidents de clubs accompagnaient les directeurs d’agences pour encourager les entreprises à mettre leurs fonds dans la banque Khalifa ?». L’accusé : «Je ne sais pas».
L’omniprésence de Didine…
Le tribunal fait appel à Badredine Chachoua, alias Didine, chargé du réseau à la banque Khalifa. Me Brahimi exhibe une série de documents et interroge l’accusé sur les tenants et les aboutissants des sommes du document en question dont des chèques et des conventions. Badreddine soutient avoir détenu deux comptes. L’un en dinars et l’autre en devises. La juge lui fait savoir qu’il avait retiré 47 000 FF. L’accusé : «C’était une attestation qui coïncidait avec mon départ vers Paris». La juge : «Un mois après, vous aviez retiré 70 000 FF». Il répond que c’était son propre argent. «Et les 1,8 milliard de DA ?», demande la magistrate. L’inculpé répond qu’il l’avait retiré de son compte en dinars. L’accusé garde le silence lorsque la juge lui montre un document portant le retrait d’un montant de 140 000 FF. N’ayant pas reçu de réponse, la magistrate lui fait savoir qu’il manipulait beaucoup d’argent. Le frère de Hafidh Chachoua nie avoir reçu un policier envoyé par Khalifa pour lui acheter une voiture de type Yaris.
Toutefois, il confirme avoir passé la commande pour l’achat de 30 voitures au profit de KRC avant d’indiquer que la voiture de Mokadem Tahar était le bien propre de ce dernier. La juge lui demande en quelle qualité il faisait ce travail. L’accusé : «Javait reçu un ordre de la direction générale». Il récuse le fait d’avoir acheté les biens de Moumen Khalifa. Badreddine dit ignorer que Baichi Fouazi avait acheté une villa à Dar Dhiaf. Le procureur intervient pour lui dire que Amghar Mohand-Arezki avait affirmé que c’était lui qui achetait les voitures. L’accusé se défend «j’avais acheté les 30 voitures. C’est tout.» Le ministère public lui demande des explications concernant l’opération de distribution du couffin de Ramadhan et durant laquelle des sommes à donner le vertige ont été déboursées. Badreddine : «Le financement avait été fait par la direction générale. La distribution avait été faite avec le concours des directions de l’action sociale et le Croissant-Rouge».
Le procureur exhibe un document trouvé dans la demeure de l’inculpé une facture signée par le notaire Omar Rahal pour un montant de 41 millions de centimes. L’inculpé bafouille et dit qu’il devait la faire parvenir à la direction générale. Le procureur lui demande d’être plus explicite au sujet du virement de 5 millions DA pour l’achat de matériel audiovisuel. L’accusé répond que c’est la direction générale qui l’avait fait. Mme Brahimi fait remarquer qu’il était présent partout.
« Un coup monté… »
Par ailleurs, la cour a appelé à la barre, Nadjib Bourayou actionnaire dans une société hispano-algérienne de manutention ce dernier est accusé des chefs d’inculpations d’escroquerie et usage de faux. Il dira que Hocine Soualmi, directeur de l’agence d’El Khalifa Bank des Abattoirs l’avait contacté à Oran, pour lui proposer des crédits. «J’avait demandé 30 millions DA et convenu de 15 millions DA pour la réalisation d’une unité de production», raconte-t-il. Et d’ajouter : «Il nous avait demandé d’hypothéquer l’usine à 44 millions de DA sans le matériel». la juge : «Vous aviez discuté des modalités de remboursement ?». Bourayou dit que ce n’était pas clair. Mme Brahimi lui fait savoir que Soualmi avait affirmé qu’ils s’étaient rebellés contre la banque. L’accusé : «Il y avait des lenteurs et des pressions. La dette de 5 milliards a généré 7 milliards. Soualmi nous faisait des arrêts de saisie.».
Il estime qu’à ce moment, la banque était condamnée à mort. A la question de savoir si Soualmi leur avait dit que la somme de 52 millions était un dépôt à terme et n’arrivait pas à couvrir la dette, l’inculpé répond par la négative. Me Bourayou rappelle qu’il avait proposé une reconnaissance de dette. La juge : «Au profit de qui ?». La réponse ne vient pas. Il dit néanmoins qu’il avait payé une somme de 750 millions de centimes avant la signature du contrat pour couvrir la dette. La magistrate demande quel était le document qui pouvait justifier cette démarche.
L’accusé élude la question. Il avoue que Soualmi lui avait donné la main-levée le 23 février 2003 de l’agence des Abattoirs sans pour autant l’utiliser. Bourayou soutient avoir arrêté de payer jusqu’au versement de Fouda Adda de son argent dans son compte commercial. Mme Brahimi lui fait remarquer que le contrat n’a pas été appliqué sur le terrain comme il fallait. L’accusé : «Foudad n’avait pas respecté le contrat.» La juge constate que la main-levée a été utilisée dans l’arrêt de saisie. Elle lui demande quelle a été sa réaction lorsqu’il n’avait pas trouvé l’argent dans son compte. L’accusé réplique que c’était «un coup monté».
Hocine Lamriben