Des directeurs d’OPGI ont perçu 1% des placements

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Le tribunal criminel près la cour de Blida est passé à une étape supérieure dans le procès de l’affaire Khalifa dans son volet relatif à la caisse principale. Cette fois-ci, les directeurs et les gestionnaires, impliqués de près ou de loin sont mis en cause pour les placements des fonds des différentes OPGI dans la banque Khalifa. hier, Khierddine El Walid, directeur général de l’OPGI de M’sila, Aïn Témouchent, Oran et Constantine mais surtout actuel directeur de l’AADL, est cité sous les chefs d’inculpation de corruption, abus d’influence et perception d’avantages et d’intérêts. Il dit avoir été approché par une délégation représentant la banque Khalifa composé de Ighil Meziane, consultant en sports à Khalifa Bank, Belaid Kechad, directeur de l’agence de Blida, et d’une troisième personne dont il dit ignorer l’identité pour le convaincre de mettre les avoirs de l’OPGI d’Oran dans la banque Khalifa en contrepartie d’un taux d’intérêt de 12%. «On avait déposé une partie de notre argent en 2002. Par rapport au contexte, rien n’indiquait qu’on courait un risque», explique-t-il. La présidente lui demande d’expliquer la présence de Ighil et de Kechad dans la délégation. L’accusé : «Kechad était un technicien. Ighil était un accompagnateur. Ils s’étaient présentés comme représentants de la banque Khalifa. On avait discuté beaucoup avec Kechad mais aussi avec Ighil». Mme Fatiha Brahimi, présidente de la cour, lui demande si le conseil d’administration (CA) s’était réuni, à quoi il répondu : «le CA avait avalisé par la suite le budget y compris la décision des placements. La tutelle était au courant des dépôts à travers la fiche de synthèse. Même le nom de la banque Khalifa y figurait». L’accusé estime les pertes de l’OPGI d’Oran à 100 milliards de centimes. La juge insiste auprès du directeur général de l’AADL de s’expliquer sur les écritures bancaires selon lesquelles il avait reçu des commissions de 2.5 millions DA puis de 5 millions DA l’inculpé s’en lave les mains : «On l’avait su au niveau de la gendarmerie nationale», note-t-il. Mme Brahimi l’interrompt pour lui signifier que des collègues responsables des certaines OPGI, comme Bouchefra, directeur par intérim de l’OPGI de Constantine, avaient affirmé avoir reçu une somme d’argent correspondant à une commission de 1% pour les dépôts placés auprès de la banque khalifa. Mieux encore, la juge lui fait savoir que Hakim Guers, directeur de l’agence bancaire d’Oran affirmait que c’était des commissions. Kheireddine El Walid affirme avoir rejoint l’OPGI de Constantine en mars 2002 il avait entendu dire que son directeur général, Bouchefra, avait fait un placement de 142 milliards de centimes. Il dit avoir trouvé un compte DAT et un compte courant alimenté de 20 millions de centimes au nom de l’OPGI de Constantine, issus de la vente de locaux. Un montant déposé, selon lui, par ses soins auprès de la banque El Khalifa. L’accusé nie avoir reçu de commissions suite à ce dépôt. Au sujet des avantages, le prévenu soutient avoir fait une demande officielle en tant que directeur de l’OPGI pour bénéficier d’une carte de voyage de gratuité reçue par l’intermédiaire de Belaid Kechad, qu’il aurait utilisé à trois reprises dans le cadre de ses missions sur la ligne Alger-Constantine. La magistrate lui demande comment expliquer que les autres fonctionnaires de l’OPGI n’avaient pas reçu ce genre de cartes. L’accusé reste coi.

Des correspondances ministérielles encouragaient les dépôts…

Le procureur général estime les pertes de l’OPGI de Constantine à 162 milliards de centimes. Peu avant lui, Nourdine Boucenna, directeur financier et comptable de l’OPGI d’Oran poursuivi pour corruption, abus d’influence et perception d’avantages, soutient que l’OPGI d’Oran avait fait deux dépôts dans l’agence d’Oran. Le premier placement était de 420 millions DA. Il a été effectué le 26 février 2001 alors qu’un second dépôt de 600 millions DA a été placé pour un taux d’intérêt de 12%. Il rappelle, en outre, que le taux d’intérêt à la CNMA était de 9.25%. L’accusé reconnaît qu’il avait reçu une note ministérielle encourageant les OPGI à faire fructifier les excédents dans les banques privées. Il tient les même propos que Kheireddine El Walid, selon lesquels Ighil Meziane et Kechad Belaid s’étaient déplacés à Oran pour leur proposer des marchés financiers. S’agissant des commissions qu’il aurait touchées, Boucenna nie en bloc ses faits. «Je l’ai su le première fois à la Gendarmerie nationale. J’étais surpris». La juge revient à la charge : «Qui en a bénéficié ?», i’interroge-t-elle. La réponse ne vient pas. Barka Benachir, chef de service administratif et des finances de l’OPGI de Relizane, accusé de corruption, abus d’influence et perception d’avantages est appelé à son tour à la barre. Il indique d’emblée, que les avoirs de l’OPGI étaient placés à la BDL pour un taux de 5% avant de les transférer dans la banque Khalifa pour un taux d’intérêt de 10.25%. «Des gens de Khalifa s’étaient présentés pour nous proposer des taux d’intérêts avantageux. La convention a été signée par Bacha Saïd, le DG de l’OPGI, avec Guers Hakim, directeur de l’agence d’Oran”. D’après lui, le premier dépôt était de 80 millions DA. Il avoue que le CA ne s’était pas réuni durant cette période puisque son mandat avait expiré en mars 2002. L’accusé révèle que l’unité de Relizane rattachée à la direction générale de L’OPGI- mère, avait fait également un placement de 30 millions Da à l’agence d’Oran. La juge lui demande si la tutelle était informée du dépôt. Boucenna : «On avait signalé le dépôt dans notre rapport d’activités mensuelles».

«Un sous-compte est ouvert à notre insu….”

Il rapporte une révélation pour le moins surprenante. L’inculpé avoue qu’il avait un compte DAT d’une année. Jusque-là, rien de problématique. Toutefois, il affirme que l’agence d’Oran leurs avait ouvert un sous-compte dont ils ignoraient l’existence. «Le sous-compte avait été ouvert à notre insu», note-t-il. La présidente de la cour l’interroge au sujet de 300 000 DA dont il aurait bénéficié. L’accusé est formel : «Jamais». Mme Brahimi revient à la charge derechef : «il y a des écritures comptables prouvant ceci. Le directeur l’agence d’Oran affirme vous avoir donné cette somme». Boucenna : «il n’y avait pas de commissions. J’en ais entendu parler devant le juge d’instruction». De son côté, Bencetta Ali, comptable de l’unité de Relizane, accusé lui aussi, rappelle que la somme de 30 millions de DA avait été déposée dans l’agence d’Oran le 5 novembre 2002 pour une période d’une année. L’inculpé révèle que la convention du dépôt avait été signée par Bacha Ahmed et Guers Hakim. Il estime qu’il n’avait pas pu récupéré l’argent. Par ailleurs, Ouaai Hamid, inculpé pour corruption, abus d’influence et perception d’avantages, directeur de l’unité de Relizane, n’arrive pas à s’expliquer sur le sous-compte et les commissions de 1% du dépôt.

130 milliards de centimes placés par l’OPGI de Béjaïa à Khalifa Bank

Le tribunal cite à la barre Saïd Bacha, directeur général de l’OPGI de Relizane. Il est poursuivi pour corruption, abus d’influence et perception d’avantages.

Auparavant, il occupait les postes de chef de service et celui de directeur adjoint respectivement dans les OPGI de Tizi Ouzou et de Béjaïa. Bacha déclare qu’après son installation à l’OPGI de Relizane, une délégation de la banque Khalifa s’était présentée pour lui proposer de mettre les fonds en contrepartie d’un taux de 10.25%. L’accusé : «c’était moi qui avais signé la convention avant de l’envoyer vers la direction générale. On avait ouvert un compte à terme». La juge : «comment expliquer qu’ils vous avaient ouvert un compte courant ?», demande Mme Brahimi. Pas de réponse. La juge revient à la charge : «Et le 1% de commissions. J’ai des documents. Quel est votre avis ?» Bacha répond que ce n’était pas en son nom. Le procureur lui demande quel était le montant que l’OPGI de Bejaia avait placé dans la banque khalifa. L’accusé dit ne pas être au courant. Le représentant du ministère public apporte la réponse : «130 milliards de centimes», dit-il. L’accusé affirme avoir saisi le ministère de tutelle, à savoir celui de l’Habitat et de l’Urbanisme. Mme Brahimi lui brandit deux documents dans lesquels sont consignés les montants des commissions de 1% du montant de 30 millions DA. Bacha dit n’avoir rien perçu.

5 millions DA dans une boîte en carton… comme prêt!

La juge appelle l’accusé Miloudi Benyoucef, DG de l’OPGI de Ain Témouchent pour s’expliquer sur le dépôt de 100 millions DA. De prime abord, Miloudi évoque les noms de Meziane Ighil et Belaid Kechad, lesquels lui avaient proposé de faire des placements dans la banque Khalifa en contrepartie de taux d’intérêts aguichants. Il souligne avoir signé la convention avec Hakim Guers, directeur de l’agence bancaire d’Oran d’El Khalifa Bank, en avril 2001 pour une durée d’une année. Une autre convention portant un montant de 5 milliards de centimes a été signée le 3 juillet 2002. Mme Brahimi l’interroge sur les

500 000 DA qu’il aurait perçus comme commission en juillet 2002. Le prévenu récuse les faits. Il dit avoir entrepris des démarches pour récupérer l’argent déposé, en vain. La valse des directeurs des OPGI continue et le tribunal cite à la barre Ahmed Bouchefra, directeur par intérim de l’OPGI de Constantine. Les griefs retenus contre lui sont le triptyque corruption, abus d’influence et perception d’avantages. Il estime que des DAT se trouvaient déjà dans la banque Khalifa pour un taux de 10%. «Des gens de Khalifa, dont Omar Mir et Belaid Kechad, et le directeur de l‘agence de Constantine s’étaient présentés pour me proposer de faire le renouvellement des dépôts. C’est alors qu’on avait signé une convention de 142 milliards de centimes le 17 février 2002 pour une année», raconte-t-il. A la juge, il répond avoir demandé un prêt de 5 millions de DA auprès de la banque Khalifa. «J’avais envoyé un fax et signé une convention de prêt”, dit-il. La présidente intervient pour lui dire qu’il n’y avait ni garantie ni passage par le notaire pour l’établissement du prêt. La juge : «Est-ce que vous vous étiez entendus sur le taux de remboursement ?» Bouchefra, sans trop convaincre, répond : «Le taux devait paraître dans l’échéancier. Je devais payer 14 000 DA par mois». Mme Brahimi lui fait savoir qu’il faut au moins 28 ans pour inclure les intérêts. Elle lui fait rappeler ses déclarations devant le juge d’instruction selon lesquelles cette convention ne comprenait pas d’intérêt. Le procureur intervient pour lui demander pour l’ultime fois : «Est-ce que c’était un prêt ?». A ces propos, l’accusé a eu cette réponse : «c’est un prêt et Dieu m’est témoin». Pour tirer au clair ce brouillamini, le magistrat en appelle à Belaid Kechad et Omar Mir pour une confrontation. Ces deux derniers nient avoir donné la somme de 5 millions de DA à Bouchefra. La juge réagit avec véhémence : «Quel intérêt a-t-il à divaguer ? Il dit que c’est vous qui lui aviez remis l’argent» Bouchefra, dans un face à face avec Kechad, qu’il désigne du doigt, affirme que c’était ce dernier qui lui avait donné les 5 millions de DA dans une boîte en carton. Le procès reprend aujourd’hui avec l’audition d’autres responsables d’OPGI.

Hocine Lamriben

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