Sidi Saïd dans l’œil du cyclone

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Avocate de Ahmed Mir, Mouloud Toudjane et Yacine Ahmed, respectivement inspecteur général adjoint, directeur général chargé de la comptabilité à Khalifa Bank et P-dg de Digromed, maître Ouali rappelle que Ahmed Mir est poursuivi, selon le réquisitoire du procureur général, pour défaut de contrôle, voyage avec l’ancien golden boy et double nationalité.

Elle s’interroge si le voyage avec Moumen Khalifa constituait une association de malfaiteurs. «1,8 % de la population ont une double nationalité. Le colonel Bencherif a affirmé que des ministres dans le gouvernement actuel ont une double nationalité», explique-t-elle et d’ajouter que cela n’a jamais été un crime. Au sujet des 500 millions de centimes qu’il avait ramenés à Moumen Khalifa, l’avocate estime que son client était le premier à avoir signé une décharge chez Akli Youcef. «D’autres agences avaient agi de la même manière. Sans accuser personne, nous voulons être traités de la même manière. Il n’y a rien qui prouve que Mir Ahmed est dans une association de malfaiteurs. Les 500 millions de centimes, il ne les a pas pris en catimini», dit-il. Concernant Toudjane Mouloud, contre lequel le parquet a requis une peine de 10 ans de réclusion criminelle, Me Ouali soutient que l’accusation de Toudjane est le résultat des déclarations de l’expert Foufa, en précisant qu’il était un témoin avant de devenir par la suite un prévenu. «Mon client n’a jamais été présent à la réunion avec Akli et Nekkache. Il n’a jamais eu connaissance des 11 EES. Même après la faillite de la banque Khalifa, il a continué à travailler avec l’administrateur et le liquidateur jusqu’au 6 janvier dernier. Même le juge d’instruction ne lui a pas posé de questions sur la comptabilité», indique-t-elle. Passant à Yacine Ahmed, contre lequel le procureur général a requis la peine de 15 ans de réclusion, Me Ouali déclare qu’il avait mis l’argent d’une manière régulière dans la banque Khalifa. Elle s’interroge comment le juge d’instruction n’a pas convoqué les enseignants et les étudiants qui avaient suivi un stage de formation. «Il a été payé régulièrement. Il n’avait pas pris l’argent sous la table. Je regrette le travail du juge d’instruction qui avait affirmé avoir fait une confrontation avec Aziz Djamel», note-t-elle. Me Ouali réclame la relaxe des clients.

«On a voulu briser Digromed»

De son côté, maître Benouaret, plaidant pour le PDG de Digromed, rappelle que son client avait, à maintes reprises, saisi la Chefferie du gouvernement dans l’espoir, en vain, de faire cesser les «provocations» de la direction des impôts. Il fait remarquer que le ministère des Finances avait demandé à l’entreprise de règler ses charges avec la direction des impôts. Selon l‘avocat, la seule solution pour sauver l’entreprise était de faire des dépôts dans la banque Khalifa pour des taux d’intérêt de 10%. Me Benouaret déclare que si le juge d’instruction avait fait son travail, son client ne se trouverait pas ici dans le box des accusé. Il s’en prend aussi à l’arrêt de renvoi pondu par la chambre d’accusation, lequel, dit-il, n’est pas à la hauteur de cette affaire.

L’avocat révèle que la chambre d’accusation a rendu sa décision en l’espace d’une semaine, ce qui est, à ses yeux, trop précipité. Pis encore, il dénonce la décision de la Cour suprême qui avait rejeté les pourvois en cassation. Il revient sur les contrats de formation, lequel, selon lui, avaient été signés régulièrement. Plaidant pour le même accusé, maître Abdelmadjid Akbouche précise que le parquet n’apporte aucune preuve allant dans le sens des accusations portées contre son mandant. Il soutient que la direction des impôts, en gelant les avoirs de l’entreprise, avait des plans «pour briser» Digromed.

Non-assistance à personne en danger

Il dit que toutes les accusations n’ont aucun fondements. Abondant dans le même sens que son confère, au sujet de la formation pilotée par Ahmed Yacine, Me Akbouche affirme que ce dernier avait été contraint de payer des frais de la formation de son propre argent puisque la banque Khalifa n’avait pas honoré l’engagement de faire une avance de 50% du montant de la formation. «Il n’a été payé que 7 mois après», précise-t-il. Agissant pour le compte de Mohamed Chebli, caissier principal et Lynda Benouis, directrice chargée de la monétique à la banque Khalifa, maître Belloula s’est montré durant son intervention un va-t-on guerre contre le procureur général. Il dit qu’il a entendu des contrevérités de la bouche de ce dernier. «Il faut que les accusés sentent que justice leur sera rendue même après leurs condamnations. Nous assistons offusqués, effarés de voir des témoins d’un nouveau genre. Ils reconnaissent avoir commis des faits répréhensibles et demerent des témoins», s’exclame-t-il. A ce titre, l’avocat cite les noms de Rachid Saâdi, inspecteur de police à l’aéroport d’Alger qui a bénéficié d’une voiture, Sidi Saïd, secrétaire général de l’UGTA et le fils d’un magistrat. Il estime qu’il y a deux catégories d’absents dans ce procès. Ceux en fuite, comme Moumen Khalifa et consorts et ceux absents des procédures. «Des poursuites auraient dû être déclenchées en même temps. La machine judiciaire a broyé ces gens (les accusés). On ne pourra rendre justice dans ces conditions. Je demande que le jugement soit un exemple. Il faut que le procès aille au-delà des jugements des personnes», estime-t-il. Me Beloulla conteste la constitution de la Banque d’Algérie en tant que partie civile. «La Banque d’Algérie, c’est beaucoup plus qu’une tutelle. Sinon pourquoi ne pas avoir retiré l’agrément avant ?», dit-il en soulignant que lorsque l’Etat ne voit rien et ne fait rien, cela est considéré comme non-assistance à personne en danger. Me Beloulla estime que l’incurie et la gabegie ont de tout temps étaientt derrière les catastrophes, à l’instar de «l’affaire du “Bechar”», bateau battant pavillon national, où 18 marins ont péri dans la baie d’Alger. Revenant au cas de Mohamed Chebli, l’avocat affirme qu’il n’avait pas bénéficié d’avantages ni de relations avec Moumen Khalifa pour être accusé d’association de malfaiteurs. Il dit que son client n’avait pas fait de marchandage auprès des entreprises nationales tout comme il n’était ni actionnaire ni complice dans la banque Khalifa.

Pour ce qui est de la falsification des écritures bancaires, l’avocat note que Chebli n’était pas au courant des raisons qui ont motivé l’établissement des 11 EES. «Il n’était même pas présent à la fameuse réunion. Sa signature n’avait pas d’impact ni de préjudice. Le dossier de Chebli est vide», conclut-il.

Tirs croisés sur le procureur général

Concernant Lynda Benouis, Me Belloula rappelle que sa cliente avait bénéficié d’un prêt spécial de la part de Moumen Khalifa pour l’achat d’un appartement et cela pour des raisons de santé. «L’argent venait du compte de Moumen Khalifa. Le prêt a été remboursé auprès du liquidateur en trois tranches», fait-il savoir. Il s’attaque frontalement, sans mâcher ses mots, au représentant du ministère public pour son «acharnement» répété contre sa mandante. «J’ai remarqué que l’instruction a été à charge. Vous vous êtes, monsieur le procureur général, dangereusement écarté de l’arrêt de renvoi», lance-t-il.

Auparavant, Me Beloulla dit qu’il y a une tentative de dénaturation des faits, puisque le juge instructeur n’a pas entendu les propos de Lynda Benouis et s’est contenté d’écouter celui qui lui a vendu l’appartement. Intervenant, le procureur général dira que l’avocat est en train de dénaturer par ses propos les faits. Mme Brahimi demande instantanément au procureur de ne pas interrompre la plaidoirie de Me Beloulla. Ce dernier dit être convaincu qu’il y a violations des droits de la défense. Les plaidoiries reprennent pour les autres accusés relevant de la criminelle.

Hocine Lamriben

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