Pendant que des anachronismes suivent avec dédain le parcours de l’enseignement de tamazight, on suggère alternativement le tifinagh et la graphie arabe comme supports. N’en ayant cure, enseignants, inspecteurs et autres pédagogues continuent, eux, de marquer des avancées considérables sur le terrain pédagogique.
Ce saut qualitatif est rendu possible grâce à la détermination des uns et des autres de faire avec » tamâamrit « , en cours depuis près d’un siècle, de ne prêter oreilles à aucun ‘’bruit idéologique’’ et de tenir compte, uniquement, de la dimension scientifique de la question.
Cette attitude semble être adoptée par quasiment l’ensemble des intervenants dan l’univers de l’enseignement de tamazight. Chose qui n’a pas été le cas au tout début de l’aventure où, sans aucune assise et livré à lui-même, l’enseignant faisait dans l’improvisation. Il confondait même entre enseignement d’une langue et enseignement de l’histoire. Cette improvisation sera vite rattrapée par des formations cycliques organisées par divers intervenants. Ainsi, tamazight s’est peu à peu débarrassé du leitmotiv » anerrez wala aneknu » et surtout des considérations politico-partisanes. Aujourd’hui et à la faveur de la nouvelle approche que l’on dénomme, la pédagogie de projet, même l’enseignement purement grammatical parait désuet. Cette nouvelle méthode qui semble avoir les faveurs du corps enseignant consiste, en résumé, à valoriser l’élève qui n’est plus ce sujet qui subit » taseftit » et autres fadeurs grammaticales, mais un élément du triptyque inspecteur-enseignant-apprenant qui a son mot à dire et surtout sa sensibilité à faire valoir dans l’élaboration du projet. Cette nouvelle méthode permet l’acquisition implicite des éléments de la langue que le projet intègre. L’élève devient en quelque sorte ce Monsieur Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir. Mais, au-delà de l’apprentissage de la langue, cette pédagogie de projet nous semble être une approche qui permet de hisser haut l’élève, ce petit citoyen qui un jour deviendra adulte. Cela nous l’avions compris, lundi dernier, en rendant visite aux enseignants en séminaire. Chrifa, Mmis l’hadj, Djamal, Nacer, Ramadane, Yahia, kahina, Xalti… (C’est ainsi qu’ils s’interpellent) ne sont plus universitaires, inspecteurs et enseignants détenteurs de savoir, mais des ressources s’enrichissant mutuellement.
Nous avons assisté à un forum –fonctionnant comme une thérapie de groupe – qui avait pour thème générique l’évaluation. Chacun des intervenants faisait part de son expérience et ou de son appréciation.
Une enseignante parlera de son élève de 20 ans, handicapée. Son témoignage émouvra l’assistance. Secondée par son enseignante, cette élève prendra part à l’élaboration du projet décidé de commun accord.
Il s’agissait de produire un conte que son handicapée, qui n’en sera pas une dans ce contexte, illustrera par des dessins. Et c’est peut-être ceci la pédagogie de projet : surpasser handicap de quelque nature qu’il soit.
T.Ould Amar
