De Grenoble, Said Taleb
Le sixième président de la Ve République française sera connu ce soir aux environs de vingt heures. Le futur ou la future chef de l’Etat succèdera à Jaques Chirac qui a choisi, pour son dernier voyage officiel à l’étranger, cette semaine, l’Allemagne, où il était très ému au moment des embrassades échangées avec la chancelière Angéla Merkel.
La campagne du deuxième tour de cette élection présidentielle a connu, il faut le préciser, un important tournant le mercredi 2 mai, après le débat télévisé qui a été suivi par la quasi-totalité des Français, sans oublier les nombreuses chaînes étrangères qui se sont intéressées à ce duel télévisé.
Si les sondages donnent encore, à quelques heures du verdict des urnes, Nicolas Sarkozy comme futur locataire du palais de l’Elysée, les militants socialistes et tous ceux qui ont renforcé les rangs de Ségolène Royal, pour ce deuxième tour, tels que les militants de l’extrême gauche, voient que « rien n’est encore joué et qu’il faut attendre les dernières secondes qui mettront fin au suspense. Ségolène a surprit ce mercredi, elle peut encore le faire ce dimanche », nous ont déclaré les jeunes socialistes qui distribuaient des tracts vendredi dernier, officiellement dernier jour de campagne.
Au moment du débat télévisé du mercredi dernier, les rues étaient désertes et rares étaient les commerces ouverts. Même ceux qui ont voté pour Sarkozy, lors du premier tour, étaient surpris, eux qui s’attendaient à ce que leur candidat « écrase sa concurrente. Ségolène est meilleure lors des débats que lorsqu’elle prononce des discours.
Elle a prouvé qu’elle est à la hauteur d’être présidente de la République, mais notre candidat est mieux placé », pense Stéphane, un militant du Mouvement pour la majorité populaire (UMP).
Il faut dire que le suspense l’emporte jusqu’à maintenant. « Les sondages ne sont pas l’élection » comme l’a écrit le président du directoire du journal Le Monde, Jean-Marie Colombani, dans son édition de ce vendredi.
Samedi, 5 mai. La pluie a presque vidé les rues.
Les terrasses sont désertes au centre-ville. Il fait froid pour un mois de mai.
Aujourd’hui, comme tout le monde le sait, on n’a le droit ici que de parler du beau et du mauvais temps puisque nul n’a le droit de parler politique, sachant qu’après la clôture officielle de la campagne électorale, ce samedi est une journée de pause avant le dernier sondage des urnes, le vrai, de ce dimanche. Les traces des militants sont pourtant là. Ceux qui ont mené leur campagne d’affichage se sont couchés tard ce vendredi. Dans les tramways, des portraits de « la France présidente » de Ségolène Royal sont affichés sur les vitres. Des tracts sont laissés sur des banquettes et dans les boîtes réservées habituellement pour les informations et le plan de la ville. Il est utile de rappeler que Grenoble est la deuxième ville socialiste en France après Rennes, donc nul n’était étonné de voir partout que les tracts du Parti socialiste (PS) sont les plus dominants.
Dans les Abrisbus, où chacun cherche une petite place à l’abri de la pluie, les gens discutent de ce deuxième tour.
C’est le sujet de discussion à l’heure actuelle. Ici, à Grenoble, les socialistes ont mené une campagne avec une grande mobilisation.
Le Parti socialiste n’a pas oublié que c’est sa deuxième ville dans l’Hexagone où il a une majorité de militants et de sympathisants. D’ailleurs, ce sont « les grands éléphants du PS, comme on les appelle, qui se sont déplacés pour animer des meetings à Grenoble. François Hollande lors du premier tour et Dominique Strauss Kahn, pour ce second tour.
S’agissant de ce dernier, nous pensons qu’il est bien placé pour être le Premier ministre de Ségolène Royal si elle est élue présidente de la République », note Bertrand, un militant du PS.
A Pont-Claix, à la Place de la mairie, une plaque indique la direction du bureau de vote n° 1. Si cette plaque indique aux électeurs la direction à prendre pour aller voter, ce sont eux qui décident de la direction que va prendre la cinquième puissance mondiale.
Pour ce banquier, « les résultas sont connus : c’est Sarkozy qui sera élu, même s’il n’y aura pas un grand écart entre lui et la candidate socialiste. »
Sa collègue tient juste à dire que « ce ne sont pas toutes les femmes qui voteront pour Ségolène », avant de préciser que « cela fait longtemps que je suis militante de l’UMP ».
Quelles que soient les sensibilités des uns et des autres, aujourd’hui la France est encore devant un carrefour de son histoire. Quelle sera la direction qu’elle va prendre, cela dépendra des militants du centre auxquels François Bayrou a laissé le choix de voter pour qui ils veulent.
Lui, dans un entretien accordé au journal Le Monde, a déclaré qu’il ne « votera pas pour Sarkozy ». Ségolène Royal n’a d’ailleurs pas tardé à dire, à partir de Lille où elle était en déplacement, qu’elle « est prête à travailler avec le centre d’une manière générale et avec François Bayrou particulièrement ».
Alors, vers quel côté se penchera la balance ce soir ? Les Français ont toute cette journée pour le décider.
Le rendez-vous est donc pris pour ce soir à vingt heures (à dix-neuf heures en Algérie) pour connaître l’heureux (se) élu(e).
S.T.