Les saisies sporadiques du sable ne manquent pas, de même elles sont parfois importantes, mais les récidivistes, les truchements aussi, sont légion et avérés comme «les privilégies», dit-on. Ainsi, c’est le tohu-bohu général qui caractérise le trafic de ce matériau de construction, coté et soumis aux spéculations sur les places de l’oued et de ses côtés en défiant les interdictions. «Nous saisissons quotidiennement des quantités de sable, et nous arrivons à arrêter en moyenne deux à trois camions par jour» indiquera le commandant du groupement de la gendarmerie de Boumerdès. En définitive, le phénomène se permanise, et quoi que l’on puisse dire de cette entreprise toute vénale, la destruction des côtes et le sabotage des nappes phréatiques s’installent inexorablement, et cela en dépit de toutes les mesures coercitives mises en avant par les pouvoirs publics.Nombre d’observateurs n’y voient là, qu’effets et symptômes de la corruption qui gangrène les différentes institutions de l’Etat, donc le bon sens aurait voulu que le traitement soit appliqué à la racine du mal.Ceci dit, que ce soit à Zemmouri-plage, à Baghlia du côté de l’oued Sebaou, ou encore à Cap Djinet, le vol du sable se fait au su et au vu de tout le monde.Plus particulièrement à Cap Djinet, notamment, la plage Bounoua sise à 3 km du chef-lieu, une véritable destination de tous genres de camions tous tonnages confondus.Pour constater de visu ce qui se mijote, il n’y a qu’à se rendre dans cette localité sise sur la borne de la RN 24 à quelques encablures à l’ouest de la ville de Djinet, et distante d’à peine 2 km de la brigade de la gendarmerie. Dieu et la nature ont doté Cap Djinet de 8 km de côtes, mais par Dieu ! quel usage fait-on ? L’état des lieux au niveau des 4 plages autorisées dont Bounoua est rudimentaire, les accès ne sont pas encore aménagés à ce jour. Cependant, l’accès à cette dernière est déblayé et bien débouché où traces et sillons pneumatiques dûs aux déboulements incessants des engins, sont désormais indélébiles. Outre que les eaux constituent un véritable tout-à-l’egout, présentement s’ajoutent les dépotoirs sauvages de déchets et détritus, entreposés à même le sable. Une bourgade illicite émerge en pleine zone d’extension touristique. Elle est constituée de nombreuses habitations érigées en infraction totale avec les règles de l’urbanisation et la loi protègeant le littoral.Un peu plus loin sur la plage, des jeunes visiblement exténués par la nuit particulièrement laborieuse et agitée, se laissent affaler sur le sable. «La somme à debourser pour le chargement dépend du tonnage de votre camion, elle est négociable. Vous savez, mais enfin généralement c’est à partir de 1500 DA, la somme qu’on partagera entre nous» indique d’un seul coup.Par la suite, selon quelques indiscrétions, tout se négocie à l’intérieur de quelques caféterias qui se sont du reste bizarrement multipliées. Après quoi, tout compte fait toutes les parties impliquées dans ce fléau retrouveront leur part de dividendes, sauf bien sûr l’utilisateur final du sable dont les prix se sont exagérément flambés ces derniers jours.Aussi, les pilleurs du sable en connaisseurs, nous conseillaient plutôt d’opter pour le sable mouillé tous près du rivage. Il serait meilleur que le sablon fin des dunes un peu éloignées. Un parc grand ouvert à tout camion, poids lourd, est bien sûr a la ville de Cap Djinet. «Allant du tracteur jusqu’au semi-remorque, ils se pointent par ici depuis la matinée, et au fur et à mesure que El Maghreb s’approche, la ville est déjà saturée et plonge dans la perturbation de la circulation», indique-t-on.Après le chargement des bennes à tour de rôle, suivant l’ordre d’arrivée sur les lieux, chacun ou chaque groupe choisit l’itinéraire à suivre tandis que quelques-uns contournent par la route d’El Ardja, les autres prennent la RN 24. Toutefois, si pendant la journée, les barrages fixes des services combinés de sécurité prennent position au niveau de chaque carrefour, aussi bien sur la RN 24 que le long de CW 18, il ne demeure pas moins que la nuit tombée, c’est la levée du siège au grand bonheur des pilleurs du sable qui s’approprient les routes à leur guise.
Saïd B.