Encore un Jeudi 14 Juin !

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Il y a six ans jour pour jour, c’était un jeudi pour ceux qui s’en souviennent, près de trois millions de citoyens s’étaient rendus dans la capitale pour remettre une plate-forme de doléances au Président Bouteflika. Cette marche grandiose qui aurait due s’inscrire dans les annales de l’histoire comme une leçon de pacifisme et de civisme du peuple à ses dirigeants n’aura malheureusement pas eu la chance d’aboutir.

La répression sanglante par les forces de l’ordre et le boucan médiatique de l’ENTV, montrant des images de marcheurs présentés comme des voyous venus mettre Alger à feu et à sang, avaient compromis toute chance de trouver une solution à une crise survenue le 18 avril 2001, lorsque l’assassinat du jeune Guermah avait été interprété par le ministre de l’Intérieur comme étant une bavure commise à l’encontre d’un jeune voyou.

Les émeutes faisant rage aux quatre coins de la Kabylie, des représentants des wilayas de Tizi-Ouzou, Bgayet, Bouira, Boumerdes, Sétif, Bordj Bou Arreridj, Alger et le Comité collectif des Universités d’Alger se sont réunis le 11 juin de la même année au niveau de la Maison de jeunes Mouloud Feraoun d’El Kseur pour rédiger une plate-forme de revendications. De cette réunion, 15 revendications ont été retenues pour, en premier lieu arrêter l’effusion de sang et, ensuite, dénoncer ‘’ la politique de clochardisation dont était victime le peuple algérien ’’.

Année après année, de conclaves de wilaya en conclaves interwilayas, d’exclusions de délégués, en retrait de confiance à l’adresse des interlocuteurs ayant pris attache avec la chefferie du gouvernement, le mouvement citoyen a, peu à peu, perdu de sa crédibilité et de son aura auprès d’une opinion publique qui lui était auparavant plutôt favorable et qui l’a longuement soutenu. Les aârchs issus d’horizons divers, mais plus précisément des deux formations politiques fortement ancrées dans la région kabyle, s’étaient assignés la mission de l’encadrement des jeunes manifestants. Mais cette mission s’est vite estompée, au profit de calculs d’apothicaires de certaines structures partisanes qui voulaient accompagner le Mouvement citoyen.

En accompagnant ainsi ce mouvement à l’essoufflement, un parti politique mal intentionné voulait, avant tout, faire figure de représentant exclusif et de porte-parole de la société algérienne. Depuis, le Mouvement citoyen s’est séparé de ses sympathisants. Ces derniers, sans nul doute déstabilisés par le non aboutissement des promesses, fatigués d’assister à des déchirures et des querelles de chiffonniers auxquelles se sont adonnés les délégués, ont, à leur manière, réitéré leur cri de désespoir et de désillusion collective qui frappe la société algérienne. Un cri qui s’est encore fait entendre lors de l’échéance électorale du 17 mai dernier.

En effet, les déceptions consécutives et les désillusions successives endurées depuis 2001 ne sont pas étrangères à l’origine du taux d’abstention historique, car jamais un scrutin n’a enregistré une aussi faible participation depuis l’indépendance du pays.

De l’essoufflement de la dynamique des aârchs, en passant par le discrédit des partis politiques, l’Algérien aura jugé ses pairs sur des principes fondamentaux contenus dans la plate-forme d’El Kseur. Même si la date exacte des futures élections APC- APW n’a pas encore été révélée, les leaders politiques de tout bord devront se pencher avant le prochain scrutin sur ce manque de popularité dont ils sont atteints. Sauront-ils convaincre ? Rien n’est moins sûr, à moins d’une prise de conscience sur les objectifs et les impératifs de l’heure qui sont essentiellement d’ordre socio-économiques. Amen.

Hafidh Bessaoudi

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