Ali Sayad, natif d’Ath-Yeni au village d’Ait-Larbaâ, appartient à cette race d’hommes qui investissent le savoir. Anthropologue, de sa double formation administrative et universitaire, il enseigna à l’université. Il est auteur de plusieurs ouvrages de recherche et de littérature. A l’exemple de “Premier agenda berbère” en 1982,”Le bulletin d’études berbères”, ”La narratrice”, “La rage dedans”… rencontré durant la commémoration de la résistance de 1857 à Ait-Yeni, M. Ali Sayad a eu l’amabilité de nous accorder cet entretien.
M. Sayad, comment expliquez-vous pourquoi il aurait fallu tant d’années pour commémorer la résistance de 1857 en Kabylie?
Comme tant de monde la sais, le pays étais longtemps dirigé par un parti unique. Le FLN qui gouvernait avec une main de fer, ne laissant apprendre qu’une partie de l’Histoire. Surtout qu’il n’admettait pas l’existence d’une République en Kabylie. Bien que c’était une force que la France s’est donné la peine à la faire soumettre. Et puis les grands événement se célèbrent au cent ou cent-cinquantième anniversaire
D’après votre réflexion, qu’est-ce que laisse la résistance en Kabylie, à l’exception de Fatma Nsoumer, à la marge des programmes scolaires
Je préfère vous répondre par les mots de cheikh Mohand Ou Lhoucine. Un jour que les Ath-Yenni étaient allés le voir, se plaignant de la France qui veut construire ses écoles sur leur terre. C’était une menace sur leur culture et leur personnalité. Il leur répondit : “ Prenez-lui les graines et laissez lui l’ivraie”.
Concernant la fiabilité des références françaises au sujet de la résistance, particulièrement en Kabylie
L’histoire est rapportée par les Français eux-même. Ils ont leurs écrivains et leurs peintres, ils racontent leur version. Nous, nous n’avons que l’oralité. Il faut refaire l’histoire. C’est à l’intellectuel de réveiller les consciences. S’il n’assure pas cette il tâche serait négatif.
Si on parlait de l’apparition de l’école d’Ath-Yenni ?
Ath-Yenni était entre les premières régions qui eurent des écoles. La première fut l’école des Frères congréganistes en 1873, pour devenir en 1881 l’école des Frères Blancs. Cette dernière étais en concurrence avec l’école laïque Emile Macrory, édifiée en 1883. Un gouverneur français, pour montrer la ténacité des Ath-Yenni, disait “ Si je francise Beni-Yenni, je francisai la Kabylie ”.
En ce 25 juin, qui rappelle également l’assassinat du Rebelle Matoub Lounès, quelle est votre impression ?
A.S: Matoub je l’ai connu à Paris à l’Auberge du Michoui en 1978. J’ai aussi fait la traduction de certains de ses poèmes vers le français. Il est à dire que Matoub-Lounès n’appartient pas uniquement à la Fondation. C’est un martyr comme tous les autres, ils nous appartient à tous.
Vous prévoyez créer un Fondation qui aura pour nom La Gué. Faites-nous connaître cette Fondation, et à ce propos, pourquoi ce nom?
A.S : La Gué c’est le passage d’une rive de rivière à une autre. C’est la passerelle qui permet la transmission entre une génération à une autre, d’une civilisation à une autre. Elle rendre hommage à Mammeri et à tous les intellectuels algériens.
Vous avancez le nom de Mammeri, pourquoi, d’autant plus que même à Ath-Yenni, il y a des hommes à l’instar de Arkoune Mohamed
A.S: Si Mammeri n’existait pas, je ne serai pas là. C’était mon maître, mon directeur au CRAP ou j’étais SG. Et de plus,je compte placer le siège de la Fondation, ici, à Ath-Yenni, pour la relève et encourager le développement rural.
Autre chose à ajouter…
A.S: Je prépare aussi un travail sur le premier importateur de luths en Algérie, le grand chef de la musique kabyle que j’ai connu en 1965, Chérif Khadam. Je compte l’appeler “Chérif Khedam ou le dire par doigt”.
Propos recueillis par Mina A.
