Par : F. Papi
Salim était rond, très rond, adipeux même, il habitait une vieille maison du côté de Baïnem, il chassait les chats car,lui a-t-on dit, les Chinois aimaient les chats et payaient 300 DA la pièce! Qu’en faisaient-ils ? Dieu seul le sait et les Chinois le savaient, ils les empaillaient ? Ils les élevaient ? Ils leur apprenaient à parler chinois? Je ne sais pas !
Salim ne s’arrêtait pas de chasser les chats, même les chats huants, oiseaux de nuit, après en avoir attrapé, il allait derrière la maison et ne réapparaissait qu’avec un sac de toile de jute qu’il mettait sur une vieille carriole et se dirigeait vers la ville…
Il passait chaque fois devant la maison de Farida, une bonne à tout faire qui vivait chez une tante, elle était tellement blonde Farida !… Salim regardait son regard… juste son regard et se mettait à rêver… rêver qu’ils chassaient ensemble les chats, rêver qu’elle habitait avec lui dans la petite pièce du fond entre cour et jardin, rêver tellement qu’il trébuchait à tous les coups ce qui faisait rire Farida. Il baissait alors la tête et continuait son chemin….
Le soir, Salim revenait, sa carriole vide avec une roue décalée si bien qu’elle grinçait à chaque tour, ce qui l’agaçait croyant que les grincements allaient faire fuir les chats ou bien ne pas plaire à Farida…
Salim avait une peur panique que Farida s’aperçoive qu’il chassait les chats.. ce n’était pas bon de chasser de si bonnes bêtes, mais il voulait ramasser assez d’argent pour demander Farida en mariage…
Un jour, levé à l’aube il partit chasser… aucun chat ne rodait dans les parages, il rentra bredouille, il alla s’asseoir derrière la maison quand Farida apparut, un paquet sous les bras…elle s’assit à côté de Salim,mit le paquet par terre et l’ouvrit, la carcasse d’un chat fraîchement dépecé s’étalait devant lui….Farida regarda Salim qui ne regardait que le regard de Farida… il se leva mit le chat dans le sac, le sac sur la carriole, et s’en alla vers la ville, la roue ne grinçait plus…arrivé en ville, on lui dit que les Chinois étaient partis….
Il revint chez lui, s’enferma dans sa chambre pour ne ressortir que la nuit tombée, il se dirigea vers la maison où habitait Farida, l’appela tout doucement quand elle apparut, il lui donna un morceau de chat grillé pour son dîner….
F. P.
