Dieu m’a donné la foi

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La chronique de Slimane Laouari

« Ils ont Ronaldinho et nous avons la foi », a tout bonnement déclaré le footballeur algérien Rafik Saifi à la veille du match contre le Brésil. On savait que ce joueur a plus squatté les murs et les terrains vagues de Bab Ezzouar que sa toute proche université, mais on pensait naïvement qu’après des années de professionnalisme en France, il y avait quand même un espoir de le voir mettre un peu de rationalité dans la caboche. A son corps défendant, Saifi nous rappelle pourtant une vérité : on ne voit pas ce que la sélection algérienne peut convoquer, en dehors de « la foi », contre son illustre adversaire, parce que dans la foulée, et sans y prendre garde, il nous dit que l’Algérie n’a pas de joueur digne de ce nom. Il se trouve cependant que, non seulement, cet aveu manque de sincérité, mais en plus il est associé à une énormité. Les Brésiliens devraient ainsi selon notre dribleur-philosophe se contenter d’avoir Ronhaldino puisque, logiquement, ils ne peuvent prétendre à la foi, chasse gardée de la sélection d’Algérie.

Kakà doit doublement apprécier, si, par miracle, la déclaration de Saifi lui parvenait, lui qui, en plus d’être nettement mieux coté que Ronaldinho sur le marché du foot est un religieux à la limite de l’intégrisme, puisqu’il se raconte même qu’il verse un dixième de son salaire à son Eglise. Conclusion évidente : l’équipe nationale de foot ne peut pas rivaliser avec le Brésil ni sur le terrain, ni au-delà, du côté des cieux, ce qui devrait amener Saïfi à plus de réalisme. Gagner en Gambie par exemple, là où il a des chances au moins sur le terrain.

Quant à la foi, c’est tout de même une autre histoire. Plus loin dans l’Histoire du foot algérien, on se rappelle la fameuse victoire de l’Algérie sur l’Allemagne, en Coupe du monde, en plein Ramadhan. Ce jour-là, les joueurs algériens n’avaient pas jeûné. Rassurés par une courageuse fetwa parvenue d’Alger, et emmenés par un entraineur auquel la rigueur scientifique a appris comment les matchs se gagnent, ils ont surclassé un monstre sacré du foot. Ils avaient certes la foi comme Saïfi, mais ils jouaient surtout mieux au foot.

Ce n’est pas parce que Breitner, l’un des meilleurs joueurs allemands, était un anarchiste athée que la  » RFA  » avait subi sa plus cuisante humiliation ce jour-là non plus, mais parce que les Algériens avaient… foi en la victoire et ils l’ont arrachée sur la pelouse de Gijon. Ils n’ont pas convoqué le ciel occupé en cet après-midi de juin 82 à tomber sur la tête des Allemands.

S.L.

PS : Rapidement gangréné par l’islamisme triomphant du début des années 90, on sait ce qu’il est advenu du handball algérien, un sport qui nous a valu beaucoup de satisfactions. Aziz Derouaz, entraîneur émérite, tout aussi scientifique que Mahieddine Khalef, en sait quelque chose.

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