Le dernier hurlement du vieux loup

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La chronique de Slimane Laouari

« Symbole de la France qui veut travailler plus  » selon les propres termes de Nicolas Sarkozy qui a consenti à lui obtenir une dérogation auprès de la très stricte Ligue nationale du football français en vue d’un ultime contrat professionnel au sein du club de Lens, Guy Roux vient de remettre le tablier. Après un début de saison dont les résultats sont peu reluisants, l’emblématique entraîneur français a tiré sa révérence.

Dans une déclaration émouvante de sincérité, Guy Roux avoue qu’il manque d’énergie,  » cette capacité à hausser le ton au moment opportun qui fait les grands entraîneurs « .

Mais Guy Roux n’est pas seulement le symbole de la France qui veut travailler plus, il est aussi l’incarnation d’une France qui veut travailler mieux, donner le meilleur de soi-même, mériter son salaire, obtenir des résultats et surtout se retirer quand tout cela n’est plus possible. Pourtant, on ne peut pas dire de cet homme sur lequel circulent les plus succulentes blagues à propos de sa légendaire avarice qu’il n’aime pas l’argent.

Cependant l’avare tient surtout à son argent, alors que l’austérité de Guy Roux, il a toujours commencé par l’imposer dans son environnement professionnel, c’est-à-dire chez ceux qui le paient, ce qui lui a parfois valu quelques déboires. A Auxerre, son club de toujours, il a préféré une culture du football et de modestes structures fonctionnelles et intégrées aux budgets faramineux des grandes équipes dont les résultats n’ont pas toujours été à la hauteur des investissements. Face aux recrutements de stars à des prix qui donnent le vertige, il a fait venir d’illustres inconnus d’Afrique et de Navarre, formé des jeunes du cru et donné une chance à ceux dont on a dit qu’ils n’en ont aucune. Aux colossaux budgets de ses adversaires, il a opposé la rentabilité maximum de ses moyens et imposé intra- muros une rare rigueur de gestion.

Les résultats n’ont pourtant pas manqué et même s’ il n’a pas réussi à hisser son club au sommet de la hiérarchie européenne, il a pu bâtir un club et l’élever au rang d’une institution respectée et respectable parce que portée par des valeurs. Guy Roux quitte les terrains de foot après un ultime coup de gueule crié à la face de ce sponsor qui croyait imposer son diktat à un homme qui n’ a pas la réputation de se laisser marcher sur les pieds. La toute-puissante Nike qui a pourtant mis dans sa poche les plus grands en a eu pour ses frais en voulant imposer son sigle sur la poitrine du vieux loup. La célèbre firme d’habillement sportif, consciente de la popularité de l’homme et de ce qu’elle peut en tirer comme dividendes publicitaires avait menacé de résilier le contrat qui la liait au club de Lens, mais n’ a fait qu’arracher à Guy Roux son dernier cri de colère.

ça tombait bien pour quelqu’un qui a avoué quelques jours après qu’il ne pouvait plus hausser le ton.

S. L.

PS : Brillant économiste, il voulait faire de la politique en faisant son métier, pas en en faisant un métier.

Sans doute, il n’a pas fait une  » carrière  » à la mesure de son immense talent, mais il a forcé le respect. Pas de tous et c’est bien ainsi pour celui qui a eu ce cri aussi émouvant de sincérité que l’aveu d’impuissance de Guy Roux :  » Mais qui vous a dit que je voulais être populaire” Raymond Barre vient de décéder à l’âge de 83 ans.

salimlaouari@yahoo.fr

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