La wilaya de Médéa s’apprête à organiser la deuxième édition du Festival national du théâtre comique, qui se tiendra du 27 octobre au premier novembre prochain, et cela après la réussite de la première édition organisée l’année passée. Pour cette édition, la ville de Médéa s’apprête à rendre un hommage post-mortem à l’un des piliers du 4e art algérien, le défunt Mohamed Touri. Cet hommage vient après le vibrant hommage rendu l’année dernière aux regrettés Abdelkader Ferrah et Sirat Boumediène, cette deuxième édition sera entièrement dédiée à la vie et au parcours artistique de l’un des plus talentueux comédiens algériens.
L’artiste qui a marqué en or son passage sur la scéne théâtrale est né le 9 novembre 1914 à Blida. Mohamed Touri Benamara fréquenté très tôt l’école coranique de la ville des Roses, laquelle était dirigée alors par cheikh « Berboucha », il poursuivit son cursus à Constantine dans une autre école coranique supervisée par l’association des Oulémas algériens. En 1929, Touri retourne dans sa ville natale et rejoint la troupe théâtrale des Scouts musulmans algériens (SMA), El-Amel, sous la direction de l’artiste Khedaoui Moussa. Fort de l’expérience acquise au sein de cette troupe, il tente une autre aventure artistique pour mieux enrichir son parcours et son personnage en adhérant, dès l’année 1933, à l’association de musique andalouse de la ville de Blida, conduite à l’époque par cheikh Mahieddine Lakhal. Cette transition lui permettra de rencontrer et de travailler avec de grands maîtres de l’andalou, à l’exemple des regrettés Cheikh Dahmane Benachour et Mohamed Benguergoura.
Son immense amour pour le théâtre le poussait, peu de temps après, à fonder sa propre troupe théâtrale et à s’imposer sur la scène nationale, grâce à des œuvres artistiques, des sketches et des satires, inspirées de la vie quotidienne des citoyens. Mohamed Touri se qualifie et se singularise par son talent vraiment magistral, ses créations ont été toutes des succès, bien qu’à cette époque, il n’était pas facile de créer ou de produire, vu le joug colonial qui pesait sur les Algériens qui étaient privés de tous leurs droits, et soumis au colonialisme, cela ne les pas empêché de produire et de défier cette situation difficile. Les productions de Mohamed Touri faisaient l’objet d’une grande réussite, les salles de théâtre arboraient toutes ses affiches et ce dans plusieurs villes d’Algérie, tel que El-Kilou (le clochard), qui est restée à l’affiche durant plusieurs jours à l’Opéra d’Alger, Oran et Constantine elle marque le début d’une réussite artistique flamboyante, qui fut suivie, par d’autres œuvres, saluées par les critiques et le public, telles que Zaite Maite oua Neguaz El-Hith, Debka oua Debk et Bouhadba (le bossu).
En 1942, il intègre la troupe théâtrale de la Radio, que dirigeait feu Mahieddine Bachtarzi, et signe, aux côtés d’autres maîtres du 4e art, comme Mustapha Kateb, Djelloul Bachdjerah, Allel El-Mouhib et Rouiched, des œuvres mémorables lesquelles, soixante ans après, connaissent toujours le même succès. Le talent de Mohamed Touri ne se limite pas uniquement à la musique et au théâtre, bien au contraire il s’étalera sur d’autres arts, tel que le cinéma où il entama au début des années 50, une courte carrière cinématographique sanctionnée par la réalisation de plusieurs films, dont le fameux Marouf le cordonnier. Il est contraint, en 1956, de renoncer au cinéma, puisqu’il sera arrêté et emprisonné à la prison de « Serkadji » d’où il sortira, trois ans après, très affaibli et décédera peu de temps après, le 30 avril 1959, à l’âge de 45 ans des suites d’une longue maladie. C’est ainsi que cette illustre et incontesté artiste nous quittera à jamais en laissant derrière lui une scène orpheline de son talent, mais également une base bien solide pour les jeunes qui lui succéderont. Enfin, il est important de dire que ces artistes qui ont bien servi et tracé le chemin culturel de notre pays, au moment où il était impossible de le faire, ils ont relevé le défi et ont lutté pour nous léguer ce patrimoine dans nous sommes tellement fiers. Ils méritent d’être ressuscités, remémoré, honorés pour tenter de le minimum de ce qu’ils continuent à nous offrir.
Kafia Aït Allouache
