Plaidoyer pour séparer le spirituel du temporel

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l En “sortant de la religion”, nous avons fermé la porte derrière nous. Puis nous avons perdu la clef. Telle est, selon Elie Barnavi, la situation dans laquelle l’Occident se trouve aujourd’hui. Elle nous laisse tout désemparés. Elie Barnavi, dont le premier travail d’historien porte sur nos guerres de religion, a rencontré, à la fin du XVIe siècle, un “Hezbollah”, “un parti de Dieu”, celui des catholique de la Ligue. Il sait donc mieux que personne ce qu’en ces temps-là “vérité” religieuse veut dire et ce qu’elle emporte de violence pour ceux qui ne s’y soumettent pas. Quatre siècles ont passé et les lumières ont inventé ce trésor improbable qu’est la laïcité. Sans doute le christianisme – qui distingue Dieu et César, le spirituel et le temporel – offrait-il, plus que les monothéismes juif et musulman, cette brèche qui permet de reléguer la religion dans le domaine de la croyance privée. Mais l’on aurait tort de croire que la forme la plus accomplie de cette libération, la laïcité à la française, s’obtint par la seule grâce de la raison. Voici enfin un historien qui ne nous sert pas cette baliverne présentant la loi de 1905 comme l’aimable compromis entre l’Eglise catholique et la République ! Mais ce “bonheur” de l’Occident européen qu’est la laïcité a son revers, nous ne savons plus vraiment ce qu’est une religion. Nous ne comprenons plus que sa peine naturelle est la violence la plus folle. Parce que le fondamentalisme chrétien a épuisé sa force propulsive, parce que le fondamentalisme juif ne s’exporte pas, nous avons du mal à désigner l’islamisme radical comme la grande menace totalitaire du XXIe siècle. Face à ce danger, le multiculturalisme et le “dialogue des civilisations” sont des plaisanteries de mauvais goût. Puisqu’il s’agit d’une guerre, et qu’il va de notre liberté, il faut de tout urgence “réapprendre” à la faire.

Idir Lounès

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