Mohamed Mechai né le dix novembre 1933 à Tafoughalt dans le douar des Ath Yahia Moussa, il grandit dans une famille animée d’esprit révolutionnaire très précoce. Etant déjà adolescent, il assista aux réunions que tenait le premier noyau du mouvement national du village représenté par Rabah Oumedour, Lounès Djebara, Mouhouche Menas, Mohamed Belaouche Da Si Moh Oulhadj, Djemaâ Salemkour et bien d’autres. Selon des témoignages, il était présent à la réunion tenue en 1953 et incitait les jeunes du village et des villages voisins à préparer la lutte armée.
Malheureusement, cette rencontre s’était déroulée sous l’œil bienveillant d’un futur harki qui le dénonça aux gendarmes. A partir de cet événement, son père, Si Saïd, fut soumis à un interrogatoire. Son père fut libéré en l’absence d’aucune preuve sur les activités politiques de son fils. En dépit de cela, Mohamed participa toujours aux réunions du parti à l’instar de cette tenue à Ath Atella dans la maison de Amer Lounas. On raconta que Krim Belkacem et Si Moh Nachid étaient présents à ce conclave auquel, avaient participé les villages de Tafoughalt, d’Ighil El Vinde, Tizra Aïssa et d’Iâllalen… La décision prise était de passer à la lutte armée. Bien avant la date du déclenchement de la Guerre de libération nationale, Mohamed se trouva recherché par l’armée française car ses actions étaient suivies de près par la même personne qui l’avait dénoncé.
Ce jeune activiste échappa aux mailles des filets. Cependant, son père fut arrêté pour une seconde fois en pleine Zaouia des Ath Abdellah. Il fut interné durant une semaine à Tizi Gheniff avant d’être relâché. Entre temps, Mohamed poursuivit ses activités au sein de l’organisation.
Depuis la réunion d’Ath Atella, si Mohamed gardait sur lui d’importants documents. Il fut alors un ardent activiste jusqu’au premier novembre. Vingt huit jours après le déclenchement, les troupes coloniales encerclèrent la maison familiale. C’était pour capturer le jeune fellagha Mohamed. Le lieutenant chargé de mener cette opération coup-de-poing ordonna à ses soldats de le ramener vivant. Des centaines de militaires participèrent à cette recherche. Des hélicoptères de combat ratissèrent Lamsala, Idararèn et Ath Rahmoune, Mohamed s’enfuit vers le village des Ath Mouh Oussalem Na Melkheir, une vieille du village lui remit une robe kabyle pour traverser la zone encerclée.
Mais, ce jeune moudjahid se rappela qu’il avait oublié les documents dans la maison de ses parents et qu’il fallait les récupérer pour éviter des ennuis à son père. Il revint sur ses pas, et les récupéra. Il prit ensuite la route vers Ath Abdellah.
Il échappa, mais se trouva pris au piège à Assif n’Chakour où était posté un important dispositif de l’armée française au lieu-dit Idararen. Sachant que la mort proche de la prunelle de ses yeux n’était pas loin, la courageuse mère délesta un militaire de son arme, elle cria pour empêcher les soldats de tirer sur lui : “C’est mon fils”. Au moment où Mohamed montait de la rivière vers Idararèn, il fut criblé de balles. Il s’écroula du haut de la pente pour se retrouver la tête dans l’eau. Grièvement blessé, il secomba. Un harki, le même, s’approcha pour sortir le corps de Mohamed de l’eau. On raconta qu’à ce moment là, le lieutenant lui dit en plein visage : “Tu l’as dénoncé, et tu essaies maintenant qu’il est mort de l’aider !” Devant cette fin prématurée de ce vaillant chahid, la population atterrée avait été forcée de se regrouper à Assif n’Chakour pour transporter son corps. Le lieutenant exhorta la foule à reconnaître le corps. Le père Si Saïd se dévoila et reconnut le corps de son fils. Désespéré, il pleura son fils.
Il fut arrêté, emprisonné à Tadmaït, puis à Berrouaghia durant deux ans. A sa libération, il rejoint le maquis pour tomber au champ d’honneur en 1958, quatre ans après la mort de son fils. Mohamed Mechai est le premier martyr qui tomba sous les balles assassines des forces de Bigeard, vingt-huit jours après le premier novembre laissant derrière lui sa famille, sa femme Yamina et sa toute petite fille Fatma. Il n’avait que vingt et un ans.
Amar Ouramdane
