Par N. Nait-Salem
Ryma, machinalement, farfouilla dans son sac à main en daim marron et poussa un cri si strident que tout le monde sursauta. Une jeune dame s’était même convertie en écho et hurla aussi sans trop savoir.
– Qu’y a-t-il ? demanda le receveur de l’autobus en se levant de son siège.
– Mon portefeuille ! On m’a volé mon portefeuille ! répondit Ryma en sanglotant.
– C’est lui qui a pris mon portefeuille de mon sac! »
– Vous en êtes certaine ? lui demanda une voix derrière elle.
Elle se retourna et lâcha à la face du jeune homme qui venait de lui parler :
– C’est vous qui l’avez pris, hein ? Oui, c’est vous ! J’en suis certaine ! Depuis tout à l’heure, vous n’arrêtez pas de gesticuler derrière mon dos !
Des ricanements fusèrent d’un peu partout sans que leurs initiateurs ne tentent de les étouffer ; ce qui gêna énormément le jeune homme qui rougit intensément.
– Vous ne savez pas ce que vous dites, mademoiselle ! tenta-t-il de riposter. Qu’insinuez-vous en affirmant que je n’arrêtais pas de gesticuler derrière votre dos ?
– Vous m’avez très bien comprise. Rendez-moi mon portefeuille !
– Mais ça ne va pas chez vous ! Je n’ai jamais vu votre portefeuille !
– Ah ! C’est malin ! Vous procédez tous de la même manière ! Celui qui pique les portefeuilles, ne les garde jamais sur lui ; il les confie toujours à quelqu’un d’autre qui se trouve loin de la victime pour être loin des soupçons. Et je suis certaine que votre complice est déjà descendu. Mais ça ne se passera pas comme ça !
Elle se tourna vers le receveur.
– S’il vous plaît, faîtes quelque chose ! Je suis certaine que c’est lui qui a pris mon portefeuille de mon sac!
Le receveur s’écria alors en direction du chauffeur :
– Abdellah ! Direction, le poste de police le plus proche!
Tous les passagers furent fouillés sans que le portefeuille de Ryma ne soit trouvé.
Cette dernière poursuivit le parcours qui lui restait à pied. Chemin faisant, elle essaya de se rappeler ce que contenait son portefeuille : sa carte d’identité nationale, sa carte d’assurance, un chèque postal et un billet de deux cents dinars.
Dès qu’elle fut entrée dans son bureau, Latifa, sa collègue lui apprit qu’on l’avait appelée de la maison.
– Oh ! Mon Dieu ! Ce matin, j’ai laissé ma mère un peu fatiguée ! J’espère que ce n’est pas elle qui… qui…
– Non… rassure-toi ! C’est elle qui a téléphoné et je peux te dire qu’elle avait l’air en pleine forme.
Elle téléphona à la maison et elle eut sa mère au bout du fil :
– Maman… C’est moi, Ryma ! Tout va bien ?
– Ma fille où as-tu ta tête ? Tu as oublié ton portefeuille!
– Ce n’est pas vrai ! Et moi qui ai accusé quelqu’un de me l’avoir volé !
– Tu devrais lui présenter tes excuses !
-Tu veux que je te le fasse parvenir par le biais de ton frère ? Fayçal n’a pas cours ce matin…
– Non, maman… Je n’en ai que faire… Garde-le bien au chaud.
– D’accord.
– Au revoir, maman.
Elle déposa le combiné, s’assit derrière son bureau et son regard s’en alla bien au-delà de la fenêtre et des nuages qui du haut du firmament, annonçaient l’imminence d’un orage.
– Qu’est-ce qui ne va pas? lui demanda Latifa.
– J’ai commis une bêtise.
– Tu as perdu ton pucelage ? Tu sais, à vingt-quatre ans, ce n’est pas trop tôt !
Quand elle eut narré à sa collègue l’incident du bus celle-ci soupira :
– C’est une grosse bêtise, en effet !
– Si tu avais vu la tête du pauvre gars quand je l’ai accusé de gesticuler derrière mon dos !
– Et il avait l’air de quelqu’un de frustré au point où il serait un adepte de ces… pratiques ?
– Maintenant, avec le recul, et en essayant de me le rappeler, je me rends compte que je me suis comportée en véritable idiote.
– Tu devrais lui présenter tes excuses !
– Je veux bien ! Mais où le trouver ?
N.N-S
( à suivre…)