Des passeurs dans une passoire

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Depuis le début de l’année en cours, les unités du GGF implantées sur la trace frontalière ont réussi, à avorter de nombreuses actions de la contrebande.

Effarantes statistiques Les chiffres avancés par un responsable de GGF de Maghnia font état de 257 opérations de saisie, dont 178 dans l’exportation illicite. Les carburants sont les plus convoités. Le nombre de litres saisies et qui s’élève à 49 740 de gazoil et 1 444 d’essence confirme amplement que ce produit est prisé par les contrebandiers car, dit-on, il rapporte d’énormes bénéfices au Maroc ou des stations-services ont dû fermer boutique étant donné que le carburant est proposé à des prix beaucoup moins chers que ceux affichés dans les stations.La drogue figure également parmi les convoitises des contrebandiers. Pas moins de 2,060 kg de kif traité ont été récupérés depuis janvier dernier. Tout cela sans parler des boissons alcoolisées qui occupent un lot remarquable dans les produits saisis. Ainsi, cette année, précise un responsable du GGF n°1 de Maghnia, 834 bouteilles de Ricard, 140 de Whisky et 2 472 canettes de bière ont été récupérés. Par ailleurs, l’immigration clandestine est, durant cette dernière décade surtout, devenue monnaie courante dans l’ouest du pays. 212 personnes de nationalités différentes (marocaine, indienne, turque, yéménite) ont été refoulées du territoire algérien, et ce, après leur traduction devant la justice.Tandis que 174 autres arrêtés pour le même motif ont été remises aux gardes frontaliers. En somme, les ressortissants étrangers interpellés sur les frontières sont, pour la quasi-totalité, des Africains, des Maliens, des Sénégalais, des Camerounais…

Les contrebandiers opèrent de nuitSi dans la journée Maghnia semble beaucoup plus inerte, durant la nuit, par contre, la région se réveille de son sommeil. C’est à partir du crépuscule que le mouvement de contrebande se fait sur les frontières algéro-marocaines. Des jeunes, des moins jeunes, et parfois même des femmes tentent, par de divers moyens, de dissuader la vigilance des éléments du GGF pour faire accomplir leur “boulot”. Des astuces différentes d’un endroit à un autre et même d’une personne à une autre. Certains utilisent des chariots, des mulets et des motocyclettes pour transporter la marchandise. “Ils sont très bien organisés. Ils disposent de tous les moyens. Les contrebandiers utilisent généralement des percusseurs qui guettent avec des éclaireurs. Il y a même des enfants de 10 à 16 ans auxquels est confiée la mission de conduire les mulets et de s’enfuir une fois la présence des éléments du GGF est susceptibles», nous a expliqué le chef d’état major du 1er groupement de la garde frontière de Maghnia qui estime, par ailleurs, que l’ampleur du phénomène est motivée par le fait que la population, notamment les riverains des habitations qui longent le tracé frontalier souffrent d’un manque criard de postes d’emploi. Notre interlocuteur précise, en outre, que la densité des habitations sur le tracé frontalier rend énormément difficile le contrôle des éléments postés dans les postes d’observation et d’interception.Il citera comme exemple et pour illustrer ses dires, les familles qui possèdent des maisons et des terres sur les territoires algérien et marocain, mais sur une distance de 200 m seulement. Donc, selon lui, des habitations servent de lieu de stockage de marchandises. “Une fois que le contrebandier a franchi le tracé, on a pas le droit de l’arrêter ou de procéder à la saisie puisqu’il est rentré dans le territoire marocain”, a-t-il ajouté.

Deux Marocains racontentArrêtés par les éléments du GGF du poste implanté au lieudit tlemcani, deux jeunes marocains âgés respectivement de 25 et 28 ans avouent qu’ils s’adonnent quotidiennement à l’importation illégale du carburant. “On n’a pas d’emploi et face à un chômage endémique qui frappe de plein fouet la jeunesse notamment. Nous n’avons trouvé mieux pour subvenir à nos besoins que de braver les risques de tout genre pour exercer notre “travail”. On a l’habitude d’acheter du carburant chez des Marocains près de Oujda mais, cette fois-ci, on s’est trompé de route pour atterrir dans le territoire algérien”, raconte-t-il avant de révéler que le marché du carburant rapporte d’énormes bénéfices aux revendeurs puisque ces derniers proposent le gazoil à 9,5 dirham le bidon de 30 litres, alors que la même quantité est cédée à 20 dirham dans les stations-services.

Six Sénégalais arrêtés au village LotfiEn destination vers l’Espagne, six ressortissants sénégalais, dont un adolescent de 17 ans, ont été arrêtés au poste Lotfi. Ces derniers, sans papiers, affirment avoir été dupés par une personne à laquelle ils ont remis 1 000 euros pour les faire passer. “On a été arrêtés par la police marocaine à Marrakèche puis on a été refoulés vers l’Algérie. Mais moi, je suis sûre, j’atterrirai coûte que coûte en Espagne. On a quitté notre pays parce qu’il y a une misère atroce. Il n’y a ni emploi ni conditions de vie descentes. C’est pour cela que nous avons préféré prendre la tangente pour vivre sous d’autres cieux plus clément.Mais, avant d’y arriver, il faut bien souffrir dans la vie. C’est pour cette raison que je vous dis qu’un jour j’atterrirai en Espagne”, dira Toumani, 25 ans à peine.

Oued Laâouinia ou “le village africain”Comme son nom l’indique, le village africain situé aux frontières algéro-marocaines, est habité par plus de 10 000 ressortissants africains issus de l’immigration clandestine vivant dans des barques érigées sur le flanc du oued, les Africains, établis à Laâouania depuis plus de dix ans, pour la plupart, sont souvent employés par des Algériens dans les travaux d’agriculture et de construction. Il y a même des pères de famille qui vivent avec leurs enfants.

A. H.

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