L’Algérie reste à la traîne

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«Le développement des technologies et plus encore, leur mise en application, ne sont pas des processus linéaires. Ils sont déterminés par la technique, l’économie, le contexte politique et réglementaire mais aussi par leur perception par la société. »

C’est dans le sens de cette définition, occidentaliste en somme, qu’a tenu à développer M. José Bonyeme, consultant canadien et conseiller du ministre québécois des Ressources naturelles, sa conférence sur la prospective technologique, présentée samedi à l’INSIM (Institut international de management) de Tizi-Ouzou. « Faire de la prospective technologique, c’est dessiner, pour ceux qui ont à prendre des décisions, des images réalistes de quelques-uns des futurs possibles que l’avenir réserve au domaine technologique, que l’on dénomme « scénarios « », soutient-il. Et d’expliquer que « ce n’est pas pour autant  » prévoir  » ni  » deviner  » ce qui va se passer. La prospective n’est pas la prévision ni la divination. » S’appliquant également pour faire des prévisions économiques à long terme, la prospective technologique reste le parent pauvre des schémas de développement que tracent les gouvernements successives en Algérie. Une tare qui n’est pas, néanmoins spécifique à notre pays, dans la mesure où elle ne s’applique que dans les pays développés et dans de très rares pays en voie de développement.

Ainsi, hormis le Canada, les USA, l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la Finlande, la France, la Hongrie, l’Irlande, l’Italie, Malte, le Norvège, les Pays-Bas, le Portugal, la République Tchèque, le Royaume-Uni, la Suède, pour la zone Amérique du Nord et Europe et l’Inde, le Japon, les Philippines, la Chine, Singapore, la Corée du Sud, l’Australie et la Nouvelle-Zélande pour la zone Asie-Océanie, les continents africains et d’Amérique du Sud ne comptent que deux Etats qui appliquent de la prospective dans différents domaines. Il s’agit de l’Afrique du Sud et du Brésil.

Autant dire que l’Algérie, qui ne figure pas dans cette liste récemment actualisée par une agence américaine d’intelligence, ne semble pas pressée de figurer parmi les pays économiquement émergeents ! Il est vrai que la prospective est une science « ayant pour objet l’étude des causes techniques, scientifiques, économiques et sociales qui accélèrent l’évolution du monde moderne et la prévision des situations qui pourraient découler de leurs influences conjuguées », si l’on s’en tient à la définition universelle du terme, sa maîtrise requièrt, à en croire M. Bonyeme, la disponibilité de trois principes indéniables. Il s’agit de la liberté, du pouvoir et de la volonté pour mieux se situer dans l’avenir. Car celui-ci, explique le Canadien, n’est pas déjà fait ni prédéterminé.

Si le postulat du pouvoir s’impose au même titre que la liberté, c’est parce que « L’accélération des changements accumule les urgences et les décideurs sont privés de marge de décision. D’où la nécessité de l’anticipation », insiste le conférencier en soulignant que «l’exercice du pouvoir suppose l’existence d’une raison motrice, le développement d’une vision et aussi l’élaboration de projets. » En d’autres termes, sa réussite dépend surtout du respect de la démarche qui intègre les ruptures.

La prospective qui n’est ni prophétie ni prévision, souligne M. José Bonyeme, est une approche globale mariant le quantitatif et le qualitatif en prenant en compte les ruptures (avec le passé) en se sens qu’elle invite à considérer le futur comme à faire, à bâtir. Contrairement à la prévision qui est une approche sectorielle qui privilégie le quantifiable et se base sur le principe de la continuité.

Peut être que c’est cette dernière approche qui constitue la méthode utilisée par les gouvernements algériens qui se sont succédé depuis 1999 dans l’exécution des deux programmes de relance économique, où la quasi-totalité des projets traînent, étrennant avec eux les ambitions du Président et les milliards de dollars qui leur sont alloués. Il est dit qu’une bonne prospective, quant elle existe, doit être « transparente, neutre et collective. » Revenant explicitement sur « la prospective technologique », le conférencier estime que « dans un monde de plus en plus incertain, la prospective technologique devient indispensable. » D’où, enchaîne-t-il, un regain d’intérêt pour cette science à partir des années 90, dès lors que l’importance de la technologie pour le développement économique s’est imposée d’elle-même.

M.A.T.

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