Zohra sublimée par la mémoire

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Il est toujours pénible d’évoquer une des personnalités du monde de notre culture à l’image de Zohra, fauchée à la fleur de l’âge, mais qui a eu le temps de laisser son empreinte indélébile et heureuse dans le panorama artistique kabyle.

Elle l’a embelli, elle l’a enrichi et l’a consolidé par une certaine détermination à tenter d’épuiser le sens des mots, du moins les exploiter à l’hypostasie. A partir de problèmes personnels, Zohra rend compte d’une situation partagée non pas seulement par sa communauté kabyle mais aussi par une commune situation humaine, sachant que le drame de la femme n’a pas de frontière.

C’est terrible combien ces chansons se terminent toutes par une note d’optimisme, comme pour empêcher que la rigueur de la déception ne terrasse le faible espoir auquel s’accrochent ceux qui ne se résignent pas à s’affranchir du destin.

Ensemble, ils l’affrontent en preux. Zohra, le regard vers le ciel et d’une voix ferme et douce à la fois, proteste contre son sort dans ce qui est convenu d’appeler sa chanson cheville : Ayen ayen.

De son temps déjà Si Mouhand s’est plaint ainsi à Dieu de son triste sort. Lui que tant de souffrance et tant d’abattement ont fini par user. C’est justement ce destin tragique que Zohra dénonce avec comme témoin la société.

D’ailleurs, même les filles de son âge Tizyiwin-is n’avaient guère plus de chance qu’elle dans un monde farouche alors que tout juste naissait une indépendance déjà fragile qui allait emporter dans son lot de fragilité, d’incertitude et de désenchantement toute une société laminée et dont faisait partie Zohra naissante.

La mort étant horrible mais l’oubli l’est encore plus.

Il est abominable car la pire des disparitions est celle que la mémoire efface. Voilà pourquoi, et grâce à l’assocition “Assurif” de Boumahni, à Aïn Zaouia, le monde artistique, des humbles gens, des amis rendent un vibrant hommage à notre grande petite Zohra.

Abdennour Abdesselam

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