Qui n’a pas souvenance de la fameuse révolution agraire des années 70 imposant une autosuffisance à la wilaya en matière de produits agricoles ? Les fellahs, notamment ceux situés en zones rurales, ne vivaient que du produit de la terre. Ils se retrouvent du jour au lendemain à la merci des fameuses CAPCS qui achetaient leurs produits sur la base des mercuriales définies par les services agricoles de la wilaya.
Les fellahs témoignaient qu’avec les prix fixés par la tutelle, ils n’arrivaient même pas à couvrir les frais culturaux. Cette situation désastreuse a mis beaucoup de fellahs en faillite qui, malgré eux, ont abandonné l’agriculture pour s’investir dans le travail de l’usine sans aucune qualification professionnelle. Dans la région d’Ath Aidel, le relief accidenté a fait que nos aïeux ont opté pour la culture de l’olivier, un arbre résistant et centenaire qui produit des olives utilisées en l’état après conservation ou triturés pour l’extraction de l’huile d’olives. Cet arbre très répandu sur le pourtour de la méditerranée occupe une place de choix chez les Aït Aidel aux côtés du figuier et du caroubier. Les autres arbres fruitiers sont presque insignifiants. Et là où le regard se pose, on y voit que des rameaux d’oliviers.
Cette interdiction de vente du produit en dehors de la wilaya a fait que les fellahs se retrouvent avec des stocks exorbitants d’huile d’olive et il fut un temps où la récolte était abandonnée dans les champs par faute de moyens de stockage et de débouchés. Plus grave encore, cette situation qui a perduré a laissé place à un état d’abandon des champs qui auparavant étaient bien soignés. Voilà comment les vivriers d’antan étaient abandonnés à leur sort et gagnés par le maquis, la jachère et la broussaille.
La nature verdoyante et nourricière a cédé la place à une nature sauvage et les champs offrent un visage de désolation. Pour le moins que l’on puisse dire, la chèvre est remplacée par un sachet de lait, le germier (akoufi) par un sac en jute de semoule, le bois sec de chauffage par une bouteille de gaz, etc. D’autres problèmes de tailles sont venus couronner cette débâcle. Il s’agit de l’interdiction de vente des terrains agricoles et l’expropriation des propriétaires jouissant de grandes superficies suivant un seuil de tolérance fixé par la loi. Autre facteur qui a détourné les agriculteurs de leur vocation : l’embellie financière résultant de la nationalisation des hydrocarbures des années 70 a fait que les pouvoirs publics ont entamé l’industrialidation du pays d’où la prolifération des usines qui ont absorbé toute la main d’œuvre agricole.
Voilà comment a eu lieu l’exode rural massif des populations montagnardes vers les villes, notamment la capitale où l’industrie algérienne est concentrée. Le choix d’une industrie industrialisante n’a pas tenu plus d’une décennie et les fermetures en chaîne de ces usines s’en suivirent avec la mise au chômage des travailleurs. La misère noire s’installa alors dans nos campagnes avec la ??? de toute l’économie algérienne. Il aura fallu attendre les années 2000 avec la montée des prix du pétrole et du gaz pour voir une redynamisation de l’économie enclenchée par l’Etat mais optant cette fois pour la libéralisation et la création de petites unités de production par le privé. L’agriculture a eu aussi sa part du gâteau par les aides octroyées au paysan. Aussi, l’Etat a facilité les accès aux champs par des moyens carrossables avec l’ouverture des pistes agricoles. Aujourd’hui, les champs ont été nettoyés, labourés et bêchés et pas un pouce n’a été négligé.
Durant les cinq dernières années, le parc des oliveraies a ostensiblement doublé, voire triplé par le système de greffage et de plantations de nouveaux oliviers. Ce qui préoccupe le plus les agriculteurs en ce moment, ce sont les bouleversements des conditions climatiques. La faible pluviométrie des deux dernières années était à l’origine des maigres productions de l’huile d’olive. On parle déjà des prix faramineux du litre d’huile d’olive qui oscillent entre 250 à 350 dinars.
L. Beddar
