Après deux ouvrages consacrés au Maroc, le journaliste Jean-Pierre Tuquoi, se penche, à travers son nouvel essai Paris-Alger, couple infernal, réédité en Algérie aux éditions Sedia sur les relations passionnelles entre l’Algérie et la France. Jean-Pierre Tuquoi pose un regard lucide, équilibré et honnête sur les relations qu’entretiennent les deux pays.
Dans ce livre, le point dominant, selon l’auteur, est « la loi du 23 février » à laquelle il consacre un chapitre remontant à sa formation, les réactions qu’elle a suscitées tant en France qu’en Algérie et de ses effets sur le Président Bouteflika, pris à partie par les radicaux nostalgiques de l’Algérie française, lesquels ont tenté de saper sa participation au 60e anniversaire du débarquement de Provence. Le Quai d’Orsay a réagi ainsi : “Les autorités françaises sont heureuses que le Président Bouteflika ait accepté au nom de l’Algérie de participer à ces cérémonies”. Bouteflika a gagné ainsi cette manche, d’autant que, comme le souligne Tuquoi, “le Président de l’Etat algérien était bien informé, il avait une vue objective de ce qui se passait dans les partis politiques français. Bouteflika savait tout. Quelques jours après la promulgation de la loi, l’ambassadeur d’Algérie à Paris a transmis une note détaillée au ministère des Affaires étrangères qui a prévenu à son tour la Présidence. Il faut bien dire et noter que rien de ce qui se passe sur les abords de la scène politique française et mondiale n’échappe à Bouteflika : ni la fronde des historiens ni les empoignades entre partis politiques. Le chef de l’État algérien suit toutes les affaires, piaffe d’impatience, mais préfère se taire, convaincu que son ami Chirac va réagir”, écrit Tuquoi. Chirac fera plus tard intervenir le Conseil constitutionnel français pour abroger l’article 4 de la loi du 23 février 2005 qui glorifiait la présence coloniale française. Cet essai de Jean-Pierre Tuquoi permet de comprendre pourquoi les relations entre Alger et Paris sont à ce point conflictuelles. Des exactions commises par les troupes du maréchal Bugeaud, en 1845, aux accords d’Evian, l’histoire entre les deux peuples est tissée de douleur et de ressentiment, de fierté et d’incompréhension. S’ajoutent à cela des problématiques plus contemporaines, parmi lesquelles la montée de l’islamisme radical et les juteux contrats gaziers. Au cœur de ce drame passionnel : « L’impossible Monsieur Bouteflika », qui cherche un bouc émissaire aux problèmes actuels de l’Algérie. Depuis les accords d’Evian, les relations entre Paris et Alger ne se sont jamais apaisées, un mélange de douleur, mémoire, d’histoires personnelles et de contrats d’entreprises. Nos deux pays se détestent, se souviennent, se jalousent mais ils restent irrémédiablement proches et ne cessent jamais d’échanger » écrit, Jean-Pierre Tuquoi. Il nous raconte ici une saga de famille passionnante et inattendue, dont Chirac, Bouteflika et Sarkozy sont les principaux protagonistes.
Kafia Aït Allouache