Dossier proposé par Nabila Belbachir
La Dépêche de Kabylie : Avant de commencer, nous aimerions bien que vous nous fassiez une présentation de l’Office national de l’assainissement ?
Karim Hasni : L’Office national de l’assainissement (ONA) est un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). Il a été créé en 2001 par le décret exécutif n° 01-102. Il est placé sous la tutelle du ministre des Ressources en eau. Bien avant sa création, il existait déjà neuf établissements régionaux et 25 épédemias. Les 9 établissements étaient sous tutelle, ils ont été dissous après une année, exactement en 2002. Viendra après le transfert d’activités. Je veux dire, par là, le transfert de l’eau potable vers l’Algérienne des eaux (ADE) et le transfert de l’activité assainissement vers l’ONA. Les deux organismes, l’ONA et l’ADE, ont été créés en 2001. Les deux structures ont préparé le transfert des neuf établissements régionaux vers l’ONA et l’ADE.
Pourquoi donc cette restructuration ?
Les neuf établissements, déjà existants, s’occupaient beaucoup plus de l’eau potable en délaissant, toutefois, un peu le volet de l’assainissement. L’Etat pour cerner les problèmes de l’assainissement et pour pallier les pénuries organisationnelles a créé ces deux établissements qui interviennent à l’échelle nationale. En 2007 il y a eu la dissolution des 25 épédemias qui étaient sous la tutelle du ministère des Collectivités locales. Donc le pouvoir décisionnel en matière d’eau potable a été centralisé au niveau de l’ADE et celui de l’assainissement à l’ONA.
C’est quoi cette vision dont vous parlez ?
D’abord à l’époque, nous nous sommes occupés beaucoup plus de l’eau potable et avons délaissé le volet assainissement, c’est pour cela que nous avons donc créé ces deux établissements pour rééquilibrer les travaux. En plus cette vision du secteur coïncide avec la création des Sociétés par actions (SPA) actuellement au niveau de 11 villes. Il y a celles d’Alger, Oran, Annaba-El Taref et enfin Constantine. Plus tard, nous aurons 11 SPA et ce, durant le cours et moyen termes pour avoir un seul interlocuteur parce qu’auparavant chacun agissait à sa guise.
Pour quelle raison avez-vous créé ces deux organismes, l’ONA et l’ADE ?
Nos missions principales sont la gestion, l’exploitation et la maintenance des systèmes d’assainissement à travers le territoire national. Ce dernier est composé de réseau d’assainissement, des stations de relevage et des stations d’épuration. Donc nous nous sommes organisés en 5 agences régionales, Alger, Chlef, Oran, Constantine, et Ouargla. Nous avons aussi comme organe de contrôle un conseil d’orientation et de surveillance qui joue le rôle de conseil d’administration au niveau de ces cinq agences. Actuellement l’ONA gère un certain nombre de stations d’épuration (STEP) qui fonctionnent à l’échelle nationale ainsi que des projets, comme celui de Ouargla, et ce au compte de l’Etat.
Sur quelle base s’est effectué le découpage ?
Il se fait, bien évidemment, par bassin hydrographique des régions.
Revenons aux SPA, pourquoi leur création et à quoi servent-elles ?
Nous avons remarqué que les entreprises algériennes ont un problème de management et de gestion, donc nous avons signé de contrats de management avec des grands opérateurs, ayant de l’expérience dans les domaines de l’assainissement, la production, la distribution volet commercial et la gestion des systèmes d’assainissement pour également apporter une nouvelle vision au secteur, notamment, pour l’amélioration du volet gestion. Si je prends l’eau potable par exemple, ce produit est basé sur le transfert du savoir-faire en matière de production et distribution, du volet commercial parce que la plupart de la population consomme de l’eau gratuitement, là il faut que l’entreprise récupère ses dépenses. En matière d’assainissement, nous sommes en train de travailler sur le curage des réseaux d’assainissement et sur les révisions de gestion des stations d’épuration.
La célébration de la Journée mondiale de l’eau cette année sera célébrée par l’ONA : pourquoi selon vous ?
Tout simplement, parce que cette année, le thème porte sur l’assainissement. Nous voulons montrer et expliquer le travail de l’assainissement, se déroulant sous terre, nous ne le voyons pas. L’assainissement est un patrimoine sous-estimé. Ce dernier est composé de réseaux d’assainissement. Si je prends l’exemple de la wilaya d’Alger, il y a 3 200 km de réseaux, dont 400 km de réseaux visitables, de tunnels d’égout.
A l’échelle nationale nous sommes à près de 3 800 km. En Kabylie, si je prends la wilaya de Tizi Ouzou, elle est pratiquement viabilisée à 100%, et il y a une grande partie des villages en train de réaliser des réseaux d’assainissements. Nous avons les stations d’épuration de Béjaïa, de Bouira et de Tizi Ouzou, et bientôt une nouvelle à Azazga. Elle est déjà inscrite et l’étude a été lancée en attendant l’appel d’offres national et international qui sera lancé par les autorités de la wilaya pour sa réalisation, ce sera une grande station qui prendra en charge tout le massif de Azazga. Pour votre information, le système d’assainissement de Tizi Ouzou a été certifié en ISO 14001 version 2004. L’unité de cette wilaya est devenue mondiale, citée comme exemple notamment par le ministre des Ressources en eau. C’est une STEP modèle et moderne, et ce dans tous ses aspects. Elle est bien gérée et bien entretenue. Pour la sauvegarde, il faut bien gérer.
Quel est le coût des investissements de l’ONA et quelles sont vos réalisations ?
L’Algérie a dépassé les 70 milliards de dollars. Le taux de raccordement à dépassé les 90 % entre les villes aux réseaux d’assainissement. La vision du secteur dans le domaine de l’assainissement repose sur trois priorités : Réaliser des stations d’épuration en amont des barrages en exploitation. Réaliser des STEP en amont des barrages en construction pour les protéger et enfin réaliser des STEP en aval des villes dépassant les 100 000/habitants et ce pour protéger le littoral algérien soit 1200 km. Plus tard, nous envisageons la réalisation des STEP dans les villes de moins de 100 000/habitants. En protégeons le littoral, nous créons des postes d’emploi, nous développons le tourisme et les loisirs. L’essentiel pour nous, c’est de ne pas perdre les eaux usées, on protège le milieu récepteur, la mer et les oueds, et ainsi on évite les MTH lesquelles coûtent à l’Etat 130 000 DA par malade.
l’ONA est partie prenante, le reste est le travail des collectivités locales.
A travers cette journée mondiale, nous lançons un appel aux collégiens et écoliers, parce que, le message passe rapidement par eux ; alors nous essayons de les sensibiliser pour mieux protéger l’environnement.
Quels sont vos projets pour l’avenir ?
Nous sommes sur un travail avec le ministre de tutelle concernant le projet de Ouargla et avec le ministre de l’Education pour donner des cours d’épuration et d’assainissement au niveau des écoles, ainsi que celui de l’Ansej pour créer des pépinières. C’est à travers cette vulgarisation que le citoyen va indirectement s’impliquer dans la gestion de l’eau et de l’assainissement. Sur ce point, nous sommes également en train de réfléchir à travailler avec l’Ansej pour créer des petites entreprises dans différents domaines. Car une station d’épuration quand elle fonctionne produit des eaux épurées et de la boue qui sert d’engrais pour l’agriculture. Nous sommes également en train de travailler avec certains organismes sur l’eau épurée et ses autres utilisations, à savoir l’agriculture, le nettoyage des territoires et pour les pompiers dans leur lutte contre les incendies et les inondations et certaines industries, au lieu d’utiliser l’eau potable.
Quel est le nombre de stations gérées par l’ONA ?
En 2007, l’ONA gérait 46 stations d’épuration dont 14 lagunes. 191 stations-relevage. Un linéaire de conduite de 21 426 km. Nous sommes présents à travers à peu prés 530 communes. Au niveau d’Alger nous avons créé une SPA nommée SEAAL (une unité d’Alger de l’ONA et ADE formant une SPA appelée SEAAL). Elle est propriété de L’ONA et de ADE. C’est une SPA de droit algérien qui a signé un contrat de management avec SUEZ environnement et avec un opérateur privé pour Annaba-El Taref. CPA, cette SPA a signé un accord avec un opérateur allemand. Pour Oran, c’est la même chose nous avons créé une SPA SEOL, elle a signé un accord avec un opérateur espagnol. Quant à Constantine, nous sommes en cours d’étude.
Comment se déroule l’opération de l’épuration des eaux usées ?
Avant que l’eau n’arrive dans la station d’épuration, l’eau circule à l’intérieur d’un réseau. Celui-ci contient des grilles, des avaloirs, des regards, alors il ne faut pas considérer ce réseau comme une poubelle. Il faut sensibiliser le citoyen sur ce point. Car si on jette des ordures dans un réseau d’assainissement, cela va créer un blocage et une destruction du réseau. Souvent l’eau remonte à la surface, et engendre des MTH. Lorsque l’eau arrive à la station d’épuration, elle est malade, une fois traitée, on peut la réutiliser, soit dans l’agriculture, soit dans l’industrie…. Même quand on la rejette dans la mer, elle ne fera pas de mal, mais si on la rejette dans un oued, il va le régénérer. Il faut informer le citoyen sur le rôle de la station d’épuration et le réseau d’assainissement dans sa vie quotidienne. Il faut aussi que cela rentre dans l’hygiène de vie de la personne.
Quelle est votre devise ?
Pour faire de l’assainissement, il faut être propre. Si vous me permettez d’ajouter: la durée de vie d’un égout n’est pas illimitée, n’attendons pas une catastrophe pour prendre conscience de son existence.