Tizi-Ouzou agonise

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Le cadre de vie de la population de Tizi-Ouzou ne cesse de subir une dégradation à tous les niveaux, cela va de l’hygiène et de l’entretien de l’environnement jusqu’au banditisme et l’insécurité.

Les citoyens et les familles se retrouvent noyés dans d’inextricables situations, et par la force de l’habitude, se complaisent et trouvent normal ce qui se passe.

Les pouvoirs publics de leur côté ont beau miroiter des volontés de redressement, les réalités de tous les jours, mettent à nu ces politiques volontaristes sans effet palpable. De leur côté, les forces de sécurité, tous corps confondus, s’evertuent à plus de présence en éxécutant un plan d’intervention à même d’atténuer un tant soit peu les dérives inquiétantes de jour comme de nuit. La société fait face, de manière impuissante, à la rudesse de la vie, le chômage qui connaît une élévation exponentielle, le pouvoir d’achat en totale érosion, la paupérisation va crescendo, la prostitution florissante, les lieux de débauche s’inventent et se créent à tout bout de champ, y compris dans les coins et recoins les plus reculés, à tout cela se greffe la consommation de la drogue, qui se commercialise en quantité industrielle, jusqu’à faire de la région sa plaque tournante. Tout ce constat est un secret de Polichinelle, rien ne se fait dans la clandestinité, il n’y a pas un citoyen, une autorité, un élément des services de sécurité, un élu, qui ne soit au fait de ces fléaux trop apparents pour ne pas être vus. Tizi est en attente, qui a trop duré, d’un sursaut citoyen et politique afin de redorer son blason et devenir une ville, une région, attractives où il fera bon de vivre, de visiter, de passer ses vacances, surtout que nous sommes aux portes de l’été.

Alerte rouge sur les suicides et la criminalité

La déperdition scolaire, le chômage, le rêve d’un paradis perdu, l’absence de réalisme ont généré un désespoir de vivre chez les jeunes de la région, sans repères et sans lisibilité quant à leur avenir, à telle enseigne qu’ils se rabattent sur des solutions inacceptables.

La wilaya de Tizi-Ouzou, pour la période de janvier à mai 2008, a connu l’effroyable nombre de suicides le plus haut d’Algérie. Plus de 36 cas de suicides sont répertoriés pour les seuls cinq premiers mois de l’année en cours.

L’année 2007, pas moins de 48 jeunes ont décidé de mettre fin à leurs jours, cas frappés d’une crise de perspective et sans espoir de déceler la moindre amorce de changement d’un sort réduit à d’incessantes lamentations jusqu’à devenir asociable, isolé et marginal. L’autre comportement qui domine aussi chez nos jeunes est la violence physique. Pour le premier trimestre 2008, les statistiques criminelles arrêtées, nous livrent plus de 25 cas de violences, atteintes aux personnes, deux homicides volontaires, 11 cas relevant de coups et blessures volontaires.

Les agressions physiques, surtout en centre-ville de Tizi-Ouzou, ont connu un pic alarmant, jusqu’à interpeller 134 personnes impliquées dans ces agressions dont 105 sont mises sous mandat de dépôt par les services de sécurité. Les vols de portables aux passants à des heures tardives de la soirée, des bijoux portés par des femmes attirent les jeunes délinquants qui procèdent à des attaques en bonne et due forme, au vu et au su de tout le monde, sans trouver salut auprès de qui que ce soit. Les services de sécurité ont inventorié, toujours pour les 5 premiers mois de 2008, pas moins de 12 vols dont 4 qualifiés. Il y a eu, suite aux renseignement et investigations recueillis, le démantèlement de 5 réseaux de banditisme et l’arrestation d’un gérant de lieu de débauche avec fermeture de l’établissement. Les cas de vol de véhicules ne sont pas en reste : on recense 34 voitures volées et sans trace à ce jour durant l’année 2008. Les accidents de la route font ravage à Tizi-Ouzou où l’on dénombre 21 morts et plus de 106 blessés nécessitant un séjour à l’hôpital, en moyenne il s’agit de 4 morts / mois.

Le terrorisme boucle la boucle

La wilaya de Tizi-Ouzou, par son relief accidenté, son massif forestier, sa situation géographique ouvrant accès à plusieurs wilayas, est choisie par les terroristes comme zone de repli. La fréquence des actes terroristes dans la région commence sérieusement à inquiéter, par rapport aux autres régions du pays dont l’accalmie et la reprise en main du terrain par les forces de sécurité ne sont plus à démontrer. Nonobstant les opérations de ratissage menées avec tact par les forces combinées, il n’en demeure pas moins que les terroristes continuent de signer leur présence dans la région. Il est impossible de s’aventurer de jour comme de nuit dans les localités avoisinantes aux forêts de Sidi-Ali Bounab, Amejoudh, Yakouren, Mizrana, Takhoukht, Boumhani. Les kidnappings opérés par les terroristes dans la région, ayant ciblé des entrepreneurs, totalisent une rançon globale dépassant les 50 milliards de dinars. C’est un pactole par lequel les recrutements dans les rangs des terroristes se font et assurent leur redéploiement.

Tizi attend un salut

Jusqu’à quand cette situation va-t-elle perdurer? C’est la question qui taraude les esprits des citoyens à Tizi-Ouzou. Dans les jours à venir, une association citoyenne est en passe d’être créée afin de peser sur l’urgence d’une prise en charge effective de cette situation alarmante. La force publique, les élus sont attendus de pied ferme afin d’arrêter cette dérive suicidaire d’une région lasse d’être incertaine et qui a plutôt besoin d’un véritable plan Marshall pour relancer son économie, s’occuper de son développement local, même si à maintes reprises, des enveloppes financières sont pompeusement annoncées mais rien ne s’est profilé à l’horizon, la région s’éteint dans le silence et l’indifférence des premiers concernés, ses enfants.

Khaled Zahem

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