Une histoire, des artistes, et une quête de développement

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Et combien de jeunes venus d’ailleurs ont-ils appris la Chariaâ et le Fiqh dans cette vaste contrée aux paysages féeriques? En ce début du mois de juillet, qui coïncide avec la célébration du quarante-sixième anniversaire de l’Indépendance chèrement acquise, nous nous sommes rendus dans cette vaste contrée pour la faire découvrir à nos lecteurs. Nous avons pris le CW04 fraîchement bitumé de Draâ El Mizan en passant par Frikat, une autre localité, qui nous rappelle le colonel Amar Ouamrane, en admirant cette belle plaine où les moissonneuses-batteuses ronronnent encore. Arrivé au chef-lieu, notre ami Mouloud, membre de la Fondation Matoub-Lounès nous accompagne jusque dans le bureau du maire. En dépit de l’exiguïté de cette mairie; Rabah Makhlouf, Lounis Mohamed Arezki, son premier adjoint et Ali Chebni, son deuxième adjoint étaient en train de peaufiner le programme des festivités concocté pour le 5-Juillet. Une photo accrochée au mur montre les trois élus indépendants se tenant par la main avec pour unique objectif l’avenir de Bounouh.

Bounouh est une municipalité créée lors du découpage administratif de 1985. Elle a des frontières avec Aïn Zaouia, Frikat et même Bouira. Ses élus gèrent une population de dix mille habitants réparties entre vingt-trois villages. Sa surface est de vingt-sept lilomètres carrés dont 80% sont en zone rurale. C’est une région à vocation agricole de montagnes elle recèle aussi des sites montagneux qui pourraient devenir, à l’avenir, un pôle touristique. Il n’échape à personne que Bounouh possède l’une des plus prestigieuses zaouias du pays. C’est la zaouia Cheikh Benabderahmane. Cheikh Sidi Mohamed Ben Abderahmane serait un descendant de la fille du Prophète Mohamed (QQSL), Fatima Ezzahra. Selon une petite recherche, on a pu reconstituer sa lignée. Il s’agit de Cheikh Sidi Mohamed Ben Abderahmane Ben Ahmed Ben Youcef Ben Abi Kacem Ben Ali Ibrahim Ben Abderahmane Ben Ahmed ben El Hussein ben Mohamed ben El Hussein ben Fatima Ezzahra, fille du Prophète Mohamed (QQSL). Il est né aux environs de 1715 au village Baâli dans la commune de Bounouh. Il commença ses études à la zaouia de Cheikh Essedik Ouarab Nath Irathen, ensuite il se déplaça à Alger, puis à l’université d’El Azhar au Caire (Egypte). Il passera un quart de siècle à apprendre la chariaâ et les sciences de l’islam. A apprendra le fiqh chez Cheikh Mohamed Salem El Hafnaoui. Découvrant en lui de nombreuses capacités, ce dernier le chargera d’une mission au Soudan pour aider les gens de ce pays à suivre le chemin de Dieu en leur apprenant le Coran et la Sunna. Après cette mission, il retournera en Egypte où il continua à prier auprès de son maître. En 1769, il rentra en Algérie. C’était donc à Ath Smaïl qu’il édifiera une zaouia où il dispensera l’enseignement du Coran et apprendre aux disciples la méthode El Khaloutia. Après quelques années, il resentit le besoin de dispenser son savoir à un large public. Il installa alors à El Hama (Alger) où il édifia sa zaouia. En homme pieux, notre cheikh recommandait aux gens de suivre le Coran et la Sunna du Prophète Mohamed (QQSL). Il mourut en 1793 après avoir réussi sa noble mission. Aujourd’hui ces zaouias de Bounouh et d’Alger sont toujours des lieux de pèlerinage pour beaucoup de gens notamment durant les fêtes religieuses. Après cette page d’histoire, nous demandons au maire de nous parler des ambitions et des problèmes rencontrés pour diriger cette municipalité en quête d’un développement meilleur pour améliorer les conditions de vie de sa population. Tout comme la mjorité des communes rurales de Kabylie, Bounouh enregistre un manque dans l’alimentation en eau potable. Actuellement, les villages et le chef-lieu sont alimentés à partir de captage de sources et forages de Helouane et de Thala Oullili. Makhlouf Rabah nous dira que le problème sera réglé une fois que l’eau arrivera du barrage de Koudiat Asserdoun(Bouira. “Maintenant, nous nous attelons à la réfection de tout le réseau d’AEP. Nous avons aussi procédé à l’extension de Thala Oullili vers la station de refoulement de Tizi n’Chréa”, a-t-il souligné tout en évoquant le branchement électrique de cette station. Il a constaté tout de même une amélioration sensible. Pas moins de cinq réservoirs d’eau sont réalisés en attendant l’arrivée de l’eau à partir du barrage Koudiat Asserdoun de Bouira.

Eau potable, un problème en attente de solutions

Proposé par l’APC, le village de Helouane à quelques jets de pierre de Tala Guilef a été retenu dans le cadre du développement rural. Ainsi, ce village a bénéficié d’opérations dans les PCD et les PSD. Au total, quarante quatre millions de dinars sont destinés à désenclaver cette localité et amélioré le cadre de vie des villageois ont été dégagés, une manière de limiter leur exode. D’abord, il y a lieu peut-êtres de dire que la route qui relie Helouane au chef-lieu est bitumée en béton bitumineux. C’est la fin d’un calvaire qui n’a que trop duré pour cette population. Dans le même programme (PCD), le village a bénéficié d’une aire de jeux. Alors que dans les PSD, Rabah Makhlouf, en sa qualité de maire, nous dira qu’au moins six autres opérations sont retenues pour ce village. “Opération de l’éclairage public, assainissement, aménagement de routes, pistes agricoles, électrification des maisons éparses et bien sûr un bus pour le ramassage scolaire”, a-t-il expliqué. Et cette précision : “Il n’y a pas seulement ces infrastructures de base qui sont venues à point nommé soulager les habitants de Helaouane, mais il faut dire aussi que trente six dossiers individuels sont déposés afin de permettre aux demandeurs de lancer des activités diverses”. Avec tout ce qui est programmés pour ce village, on peut dire qu’un pas est franchi pour son désenclavement. Et c’est sur ce principe que sont initiés les PPDRI.

L’aide à l’habitat rural en bonne voie, mais…

“Notre commune a besoin d’un programme plus important en raison de la pauvreté de nos concitoyens. Nous avons au total plus de deux mille demandes en instance”, ce sont par ces déclarations que le P/APC a abordé ce volet. A Bounouh, trois cent soixante aides sociales ont été attribuées dans le cadre de l‘habitat rural. Parmi ce chiffre, cent quatre-vingt d’entre elles ont été réceptionnées alors que trois cent cinquante-huit sont en cours de réalisation. Même si c’est peut-être important, le maire et ses adjoints jugent que c’est insuffisant. Tout en parlant du logement rural. Lounis Mohamed Arezki, le premier adjoint, est intervenu pour nous informer que vingt logements ont été distribués dans la transparence malgré le nombre élevé de demandeurs. “Nous avons traité les soixante et onze demandes. Il n’ y a eu aucune contestation”, a affirmé de son côté le deuxième adjoint. Actuellement, les responsables locaux s’attellent à arracher la levée de la réquisition des douze logements APC/CNEP réservés pour accueillir une brigade de gendarmerie. “Le wali de Tizi-Ouzou nous a promis de faire en sorte à ce que ce projet soit lancé, ainsi que leur désendettement”, a signifié le maire. Par ailleurs, lors de notre virée au chef-lieu, il nous a été donné de constater que le nouveau siège de l’APC est en voie d’achèvement. “En principe, il sera fin prêt pour la fin de l’année”, a enchaîné le P/APC.

Le maire parle des maigres réalisations

“ Nous avons réceptionné deux salles de soins, l’une à Helaouane et l’autre à Ath Talha ainsi que deux foyers pour jeunes respectivement à Halouane et à Ivouhathène. Je ne peux pas oublier de vous annoncer le programme de cinquante-cinq locaux commerciaux pour les jeunes chômeurs, un CEM à Ivouhathène, et dix logements en construction”, a-t-il déclaré avant d’évoquer les réalisation à venir. “La bibliothèque communale sera lancée incessamment”, a-t-il mentionné dans dans son intervention. Les élus de cette APC ont ajouté que toutes les opérations inscrites dans le cadre des PCD soit lancées, réceptionnées ou encore en cours de réalisation. Le maire de Bounouh tient aussi à l’inscription d’un projet de gaz de ville pour sa municipalité. Alors que l’opération d’aménagement urbain est en cours. Dans un autre registre, à l’instar des communes de la wilaya, celle de Bounouh souffre énormément du manque de ramassage scolaire. “Nous devons assurer le transport à tous les collégiens ainsi qu’aux lycéens qui vont à Boghni. Notre parc roulant reste insuffisant pour accomplir cette mission”, nous a expliqué Lounis Mohamed Arezki, un cadre de l’éducation et premier adjoint au maire. Et d’étoffer son idée sur ce qui diminuerait cette pression sur son équipe. “La seule solution est de nous inscrire un lycée. Après l’étude de l’effectif des élèves au secondaire, j’ai obtenu un chiffre de sept cent quarante-cinq élèves. La norme est largement dépassée”, nous a-t-il confié. les élus souhaitent, à défaut d’un lycée pour leur commune, voir les responsables concernés inscrire un lycée intercommunal qui recevra les élèves des trois communes (Bounouh, Frikat et Aïn Zaouia). En tout cas, les élèves de Bounouh sont réellement défavorisés quand on sait qu’ils doivent faire quotidiennement jusqu’à vingt-cinq kilomètres par jour. La commune de Bounouh jouie de paysages, splendides, féeriques. Malheureusement, l’enclavement de ces sites ne permet pas pour le moment, d’exploiter cette richesse. “Si la Direction des travaux publics nous inscrit le bitumage et l’élargissement de la route allant du CW 4 au CW 6 du côté de Bouira, ce sera une opportunité de développer notre commune”, nous a fait savoir Rabah Makhlouf. Et de nous confier : “De nombreux investisseurs sont déjà prêts à réaliser un village touristique à Tizi-Oudjaâboub. Il faut voir ces décors magnifiques. C’est juste en face de Tala Guilef”. Ce projet tient à cœur aux élus de Bounouh lesquels veulent marquer de leur empreinte ce mandat. Le tourisme est possible dans cette vaste contrée qui fait face à Tala Guilef, et par ricochet au Parc naturel du Djurdjura. Ce dernier n’est qu’à quelques encablures de cette localité enchanteresse. “Une commune qui n’a pas d’équipe de football n’est pas digne de ce nom”, cette expression émane du deuxième adjoint au maire, Ali Chabni. “Nous avons tout fait pour lancer IRB Bounouh. Notre objectif est d’encadrer pas moins de cent jeunes en dépit de nos moyens dérisoires. Nous avons accompagné cette équipe jusqu’au bout. Et nous l’accompagnons toujours”, a-t-il enchaîné. Pour le maire, l’urgence est d’avoir un stade et une salle omnisports. Pour rappel, l’IRB Bounouh a évolué la saison écoulée dans le championnat de wilaya, toujours en dehors de ses bases à Assi Youcef. Bien qu’elle soit mal classée; l’essentiel est d’avoir réussi le pari. Il faudrait même dire que ses minimes ont infligé une sévère correction à leurs homologues de la JSK. Une façon de dire que l’avenir de ces jeunots est prometteur.

Enfin, une stèle dediée Matoub, à Farid Ali et à Moh Saïd Oubélaïd…

En faisant le tour de ce qui caractérise la commune de Bounouh, on ne peut oublier de rendre hommage à ses artistes. Fidèles au combat de Lounès, ses amies et ses fans ont pensé tout à lui réserver une grande place aux côtés de ses aînés : Farid Ali et Moh Saïd Oubélaïd. Tous deux comme Lounès Matoub, ont chanté l’Algérie, l’amour, thirougza et clamé haut et fort leur amazighité. Ce 5-Juillet a été marqué par l’inauguration de cette stèle tant attendue. D’autres artistes étaient au rendez-vous pour marquer cet événement unique à Bounouh. “C’est une initiatives louable à plus d’un titre. C’est un devoir pour chacun de nous de rendre hommage à ces artistes. Nous remercions l’APC actuelle qui a adhéré à cette initiative. C’est un grand honneur pour nous” nous a déclaré Mouloud, un membre de la Fondation Matoub-Lounès. Effectivement, le sentiment était dans tous les cœurs des jeunes de Bounouh. Un grand bravo spécialement pour à Dalil Makhloufi, président de l’association Tagmats de Lyon lequel ne ménage aucun effort pour la restauration des stèles de Matoub dégradées au fil des ans. Avant de laisser derrière nous tout ce bon monde qui a contribué à réaliser ce modeste reportage sur la commune de Bounouh, nous avons fait une virée dans un café où les jeunes attablés à la terrasse discutaient à bâtons ronpus : le football, les haragas et bien sûr leurs soucis quotidiens… “A quand la sortie de ce tunnel ? Nous n’avons rien dire…”, nous ont-ils répondu gentiment à une question que nous leur avons posée au sujet de l’avenir… Nous avons quitté Bounouh tout en souhaitant que Cheikh Benabderahmane continue à veiller sur cette région qui aspire à un désenclavement et à un développement à la grandeur de ses héros en ce quarante-sixième anniversaire de l’Indépendance

Amar Ouramdane

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