L’agoraphobie règne à Bouira

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Une semaine s’est écoulée depuis le double attentat à la voiture piégée qui a ciblé les travailleurs de la société d’ingénierie SNC LAVALIN ainsi que le siège du secteur militaire de la ville de Bouira. Un double attentat revendiqué par la branche d’Al Qaida qui s’est soldé par la mort de 12 jeunes algériens ravis aux leurs à la fleur de l’âge. Depuis, pas une journée ne se passe sans que de fausses informations ne circulent en faisant état d’un acte terroriste à travers la wilaya. La ville, traumatisée et meurtrie dans sa chair a certes été largement sécurisée au lendemain du double attentat, mais ces mesures prises par les services de sécurité n’ont pas suffi à rassurer les Bouiris. Les citoyens vivent dans un climat de psychose si l’on s’en fie à leurs déclarations, et surtout au vu de leurs habitudes quotidiennes qui ont changé. Les rues sont quasi désertes les premières heures de la matinée, et le mouvement de foule habituel ne commence que vers les 7 h. Au niveau du marché de la gare routière de Bouira, les fripiers habituellement pris d’assaut par les clients, à l’approche de la rentrée scolaire ne font plus recette. L’espace qui sert de marché n’attire plus les foules et les rares passants pressent le pas lorsqu’ils doivent le traverser. Les marchands de fruits et légumes qui tiennent des étals sur le marché pâtissent aussi de cette situation.  » Les citoyens ne viennent plus comme avant ; pourtant, à quelques jours de la rentrée scolaire et du début de Ramadhan les affaires devraient marcher !  » s’exclame un marchand ambulant étranger à la région et visiblement décontenancé par la tournure des évènements. Il est vrai que jamais de mémoire de Bouiri, les marchés n’auront autant été boudés, voire désertés par les citoyens, surtout à la veille du mois sacré qui coïncide de surcroît avec la rentrée scolaire. Mais les marchés ne sont pas seulement les lieux qu’on essaye d’éviter : même les lieux publics ne connaissent pas autant d’affluence qu’auparavant. Les cafés maures par exemple étaitent jusqu’à la semaine dernière très fréquentés, notamment en fin de journée, et ce jusque tard dans la soirée. Une sorte d’agoraphobie généralisée. Le double attentat perpétré en plein cœur de la ville mercredi dernier a réussi à changer les habitudes les plus ancrées dans les mœurs bouiri. Les communes de la wilaya ne sont pas en reste de cette agoraphobie généralisée, notamment les villages dont sont issus les victimes du double attentat. A Takerboust, chef-lieu de la commune d’Aghbalou située à 60 kilomètres à l’est de la ville de Bouira, le village est encore sous le choc après la perte de deux des siens. Même les nombreuses fêtes de mariages qui devaient se dérouler dans cette localité durant la semaine ont été tout bonnement reportées. Une marque de sympathie et de compassion de la part des villageois envers les familles éprouvées par le deuil. En plus de “frapper aveugles” et d’endeuiller des familles entières, le terrorisme intégriste continue de chambouler les mœurs et coutumes respectées jusque-là. Le double attentat du 20 août 2008 restera à coup sûr ancré dans les esprits des habitants de Bouira, lesquels auront visiblement du mal à reprendre normalement le cours de leur vie.

Anzar O

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