Des infrastructures à l’abandon

Partager

Que reste-t-il aujourd’hui de ce village où des citoyens non résidents venaient s’approvisionner au niveau de l’ex-Souk El Fellah achalandé de produits de consommation tant demandés ou encore auprès de l’ex.Sempac jusqu’à la fin des années 80 ? Apparemment rien sauf peut être ces habitations initialement attribuées aux fellahs qui au fil des années ont changé d’occupants. Car la plupart d’entre elles ont été revendues en raison du retour des bénéficiaires dans leurs villages après la création des EAC. Dans une virée sur les lieux, il nous a été donné de relever un délabrement avancé des infrastructures prévues tel le Hammam ou encore le Centre culturel et bien sûr d’autres structures que nous allons évoquer. A l’entrée du VAS, un carré des martyrs qui est certes bien entretenu, mais présente une anomalie qui saute aux yeux. Les tombes ne portent pas de nom. Même le mémorial ne porte rien saut peut être l’écriteau “carré des martyrs de Tizi Ghennif, gloire à nos martyrs”. D’ailleurs, cela a suscité une polémique au sein de la famille révolutionnaire. L’association des fils de chahid a beau réagir en vue d’obtenir la liste des martyrs enterrés dans ce lieu. En vain. “Nous avons demandé la liste. Nous n’avons rien obtenu à ce sujet. Le combat continue. Nous allons tout entreprendre jusqu’à avoir cette liste. Quarante-six ans après l’Indépendance, des martyrs non encore identifiés ?”, s’interroge un fils de chahid. Dans ce carré des martyrs, on compte pas moins de cinquante sépultures, dans chacune d’elles-dit-on-il y a au moins les ossements de cinq personnes. En tout cas, a ajouté un autre fils de chahid, les recherches sont en bonne voie. “Nous allons avoir cette liste”, a-t-il insisté. Après avoir quitté ce lieu ô combien symbolique qui démontre que la population s’est engagée corps et âme pour le recouvrement de l’Indépendance, nous découvrons le quotidien des habitants.

Les accès délabrés

Les artères du village sont entièrement délabrées. Il est même difficile de circuler aisément : nids-de-poule, crevasses partout, bitume recouvert de poussière, gravats… Un villageois est venu à notre rencontre : “on ne va pas dire qu’on est délaissé, mais abandonné à notre sort”, Effectivement, notre interlocuteur n’a pas tort de nous répondre de la sorte. Les accès ne sont pas réfectionnés depuis des lustres. A en croire ce citoyen, les automobilistes refusent de les emprunter. “Les quelques fourgons qui font la navette entre le village et Tizi Gheniff nous déposent à l’entrée du quartier de peur d’user leur matériel”, a enchaîné un autre intervenant. Pour les habitants de ce VAS, leur localité n’est jamais inscrite pour bénéficier d’un quelconque projet à l’exception du gaz de ville.

Unité de soins et mosquée encore opérationnelles

Les habitants regrettent de voir les autres infrastructures abandonnées, ils ont quand même une petite chance : ils ont leur unité de soins qui continue à leur rendre de petits services tels les pansements et les injections. Juste à côté, la mosquée. Ce lieu de culte assez spacieux est bien entretenu par l’association religieuse. D’ailleurs, en raison de sa propreté et peut être même de la bonne qualité des prêches dispensés par l’imam, nombreux sont les fidèles qui y vont pour accomplir leur devoir religieux notamment les vendredis pour fuir la promiscuité des mosquées de la région.

A quand la réouverture du bureau postal ?

“L’histoire de cette poste est longue. Je ne peux vous la raconter. Elle est fermée depuis plus de dix ans”, nous a affirmé un citoyen. Les résidants du VAS doivent se déplacer jusqu’à Tizi Gheniff pour retirer une lettre recommandée ou un quelconque courrier moyennant des dépenses supplémentaires en ces années de vaches maigres. “Nous n’avons cessé à aucun moment de réclamer sa réouverture. En vain. A chaque fois, on nous invoque des prétextes incompréhensibles”, a avoué le premier intervenant. Dans cet ordre d’idées, il faut souligner que ce bureau postal n’est pas exclusivement destiné pour le VAS, mais aussi pour Adila et Morroko. “Nombreuses sont les personnes qui ont perdu leur courrier déposé n’importe où dans des épiceries et dans les cafés du coin”, a mentionné dans son intervention une troisième personne faisant partie d’un groupe de jeunes accostés devant le Centre culturel fermé lui aussi, et habité aujourd’hui. Tout en continuant notre visite dans ce village entièrement défiguré par le rajout d’autres constructions. Un autre interlocuteur nous fait savoir que le Centre culturel dont se chargeaient à un moment donné deux associations a subi le même sort.Aucune activité dans cette infrastructure culturelle si bien que les jeunes du village ont déjà commencé à goûter aux mauvais vices tels les stupéfiants et l’alcool. Le VAS, a fort heureusement, bénéficié d’un projet de gaz naturel. Cela a d’ailleurs soulagé les habitants qui doivent se déplacer parfois jusqu’à Tizi Ghennif uniquement pour une bouteille de gaz. Quant à l’eau potable, ils la reçoivent une fois par semaine quand le programme est respecté. Notons aussi qu’après un bras de fer avec les autorités de Tizi Ghennif notamment en 2006, les citoyens ont fermé le dépotoir qui arrivait jusqu’aux portes des maisons. “Nous avons lutté des années pour obtenir le déplacement de la décharge”, a enchaîné notre accompagnateur qui nous montre la plaine qui entoure ce lieu. Justement, en face, nous aperçûmes un bidonville.

Un bidonville… depuis vingt-cinq ans

Notre guide nous relate alors l’histoire du bidonville. “Au début des années 80, des familles ont été expulsées d’Alger. A leur arrivée sur le territoire de leur commune, les autorités d’alors les ont abritées provisoirement dans des tentes au niveau du stade. Peu de temps après, elles ont été déplacées vers cet endroit”, nous a-t-il expliqué. Depuis maintenant vingt-cinq ans, ces pauvres citoyens vivent dans des conditions des plus lamentables. En effet, selon des témoins, l’affaire a été à maintes reprises soumise à tous les exécutifs qui se sont succédé à la tête de cette municipalité. En vain. On peut encore voir ces habitations en parpaing et bien sûr le manque de toutes les commodités nécessaires à une vie normale. “Ce sont des cellules construites en parpaing qui s’est usé au fil des ans. Elles n’ont ni ossature métallique ni des toits convenables. En été comme en hiver, on souffre. La poussière et la boue arrivent même dans nos lits”, fulmine un habitant de ce bidonville. Les citoyens ont écrit même au président de la République. “Nous appelons au secours. Nous sommes des Algériens comme les autres. Chaque jour, on voit à la télé des centaines de familles bénéficier de logements. Où est notre droit ?”, s’est interrogé une autre personne. Avant de quitter ce bidonville, de nombreux citoyens nous supplièrent en vue de faire passer cet appel. “Monsieur le président de la République, nous savons que vous faites tout pour améliorer le quotidien des Algériens où qu’ils se trouvent, nous vous lançons une invitation afin de venir nous voir pour vérifier de vos propres yeux ce que nous endurons. Nous sommes convaincus que vous serez outré par notre situation”, ont-ils parlé d’une seule voix car ils savent que c’est là leur dernier recours après avoir suivi toutes les voies légales. Nous quittons ce bidonville ainsi que le village agricole socialiste en espérant un jour revoir toutes les structures laissées à l’abandon reprendre de service et des immeubles prendre la place de ce bidonville.

Amar Ouramdane

Partager