Les femmes, toutes générations confondues aussi, y étaient présentes en force. La grand-mère, celle qui a digéré » qim-d a tamghart 3zizen, tidet ur tebdi ghef snat « , a tenu à se déplacer dans une salle d’habitude exclusivement masculine plurielle. Le décor planté promet déjà une Tamghra à la kabyle avec ou sans « ay aberwaq lhal idaq ». Nous retrouvons ces figures familières qui refusent de plier et décidées » ad jguglen deg wussan, yal ass ad as-fken lkar-is ».
Au premier rang, nous apercevons d’autres figures familières, celles qui représentent l’autorité locale dont celle qui se sent visée par « senduyt aman a wid yestufan « .
Nous retrouvons aussi, Zayna, une vielle amie de la Dépêche. Elle était heureuse de nous retrouver. Elle s’inquiétera de la disparition de » Comme celui qui danse pour un aveugle « . Zayna est installée en France. Elle y retournera bientôt en emportant » deg walen-is ayen ur tzer ara » chez Fafa. Vingt et une heures. Seuls les sièges et les instruments de musique meublent la scène. Lounis et ses musiciens n’ont toujours pas fait leur entrée. Il faut attendre que les tarawih finissent. Peut être pas.
Nous rebalayons la salle du regard. Nous reconstatons que la vie était là dans toute sa splendeur. Et nous nous disons que c’est grâce à cette beauté qui résiste que la vie n’a pas basculé dans les abysses. Et puis un tonnerre d’applaudissements accompagne l’apparition de Djaffar, le fils de son père, Rabeh Tissilya, et Said Ghezli, les musiciens. Un autre tonnerre de bruits saluera l’apparition de Lounis. Les youyous fusent de partout. L’artiste se rapproche du micro. Il va dire quelque chose. La salle se raccroche à ses lèvres. La mouche on l’entend voler. Pas très bavard, Ait Menguellet expédie timidement les salutations qu’il termine par » voilà ! « . La non bête de scène invite, sans s’attarder sur les selamalecs, sa guitare : » qim deg urebi-iw, kkes-iyi lxiq a tin hemlex… « . Que tameghra commence !
Au grand bonheur des nostalgiques des années d’or, Ait Menguellet choisira, pour commencer, un morceau de » Tiregwa « . Nous surprenons les grand-mères accompagner des bouts des lèvres le chantre. On imagine la charge émotionnelle qui déborde de leurs êtres. Une ovation saupoudrée de youyous made in Djurdjura salue la dernière note de la première chanson. L’artiste enchaînera avec » telt yam di le3mer-iw « . Le » Ass amenzu ul-iw yezha/ am zun yelli-d s tesarut/ yugi a yettu am tin yezra/ ifaq s lwerd di tefsut » sera repris en chœur et toujours des bouts des lèvres par une salle agréablement conquise. Lounis ne lâchera pas les années d’or. Il déterrera » taktabt n lhub » qui ira droit dans les cœurs de tous ces amoureux qui n’ont jamais osé dire » je t’aime « , zik-nni. L’artiste ne lâche toujours pas le répertoire. Ce qui fera dire à une jeune fille : » Lounis serait-il nostalgique à ce point ou serait-il amoureux de nouveau ? « . Peu importe ses états d’âme. Le public est envoûté et en redemande. Puisant toujours dans les anciennes chansons, Aït Menguellet abordera une autre thématique, celle qualifiée à tort de politique, puisque l’artiste ne fera que raconter la vie lorsqu’il invite sa dulcinée » arju-iyi, arju-yi ! », du Boris Vian version tamedyazt.
» Senduyt aman a wid yestufan » sera pratiquement la seule chanson qui échappera aux années d’or. Mais c’était du Aït Menguellet pur sucre.
» JSK » répondra à l’envie de se mouvoir des jeunes occupant le balcon de la salle.
Lounis saluera son public avec la traditionnelle » keccini ruh nek ad qimegh « .
Sur scène, Omar Reghal, le directeur de la culture invitera l’hôte de Bouira à patienter un instant, le temps qu’il faut pour que le maire, le président de l’association des entrepreneurs qui avait sponsorisé le spectacle et madame Saoudi, la députée de Bouira, rejoignent l’artiste sur scène, lui remettre des cadeaux symboliques et lui exprimer le bonheur de Bouira de recevoir un Monsieur de la chanson algérienne.
T. Ould Amar
