Et le combat continue

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Surnommé Madjid, Kamel Amzal, jeune militant des causes justes payera, au péril de sa vie, ses engagements politiques sincères. Lui qui fut parmi les premières cibles de la barbarie islamiste était ce jeune étudiant qui débarqua à Alger pour des études d’interprétariat en espagnol. Selon des témoignages de ses proches amis, Kamel Amzal, issu d’une famille modeste de Tiferdoud, à Ain El Hammam,  » était un garçon généreux, humble, ambitieux et surtout engagé « .

Prenant conscience de sa réalité culturelle et politique depuis les événements d’avril 80, Kamel, un féru de l’art, de la lecture… se donnait corps et âme à sa cause, qui est celle de toute cette génération de militants qui brisèrent la chape de plomb imposée par un régime scélérat et têtu. Le Printemps berbère réveillait en lui, cette force de militant qui le mena vers de nouveaux horizons de luttes. Convaincu, Kamel Amzal avait une vision révolutionnaire du combat identitaire dont il s’inscrivait.

Kamel, victime de la répression du pouvoir

Les années qui suivirent le Printemps berbère, n’étaient pas de tout repos pour les militants démocratiques et notamment ceux de la mouvance berbèriste. Ainsi, la répression du pouvoir en place de l’époque s’abattait, exclusivement sur cette frange de militants qui dérangeait la quiétude du pouvoir et de ses alliés islamistes. Cette chasse à l’homme déclenchée contre les militants démocratiques ouvrait la voie aux intégrismes de tout bord, générée par un climat de crainte permanente et de terreur islamiste, omniprésente contre les forces progressistes.

Ce choix périlleux du pouvoir préparait déjà le lit douillet à la barbarie islamiste qui n’épargnera pas, quelques années après, même l’Algérien lambda, de la violence du discours, sinon de la lame de l’épée. Pour en finir souvent par le viol des femmes et l’embrochement des bébés. Cette répression  » sélective  » charriait aussi une nouvelle figuration politique. Après le bras de fer qui opposait les militants progressistes et les adhérents des mouvements de masses satellites du pouvoir, les hordes islamistes commençaient déjà à se structurer à partir d’idées extrémistes religieuses.

Cet épisode qui laissa libre cours au mouvement intégriste de prendre forme en tant qu’ aventure politique, avait aussi encouragé ce mouvement à accaparer des comités de cités universitaires, de campus et autres types d’associations autonomes. On les appelait, à l’époque, les frères musulmans « . Ces monstres qui germèrent par la grâce d’une répression dirigée contre le mouvement berbèriste et moderniste résumait son projet basé sur la violence inouïe que projetait ses militants. Les mouvements autonomes broyés à coups de haches et de sabres, témoigneront de la cruauté d’un mouvement qui endeuille jusqu’à présent, des dizaines de nations dans le monde.

Lassouli Fateh-Ellah, l’assassin de Kamel Amzal

Après avoir fêté ses 20 ans, avec ses amis à la cité universitaire de Ben Aknoun, Kamel Amzal, qui était un élément très actif au sein du comité autonome de la cité, participait aux différentes AG que le comité organisait afin de donner une assise à ce même comité. Ainsi, une réunion s’est tenue, le 1er novembre au réfectoire de la cité appelant, par voie d’affiches, les étudiants à une assemblée générale. Une vingtaine d’étudiants progressistes placardaient les murs de la cité avec cet appel. Alors que les étudiants démocratiques empruntaient cette voie pacifique et de transparence afin de mettre sur pied un comité autonome et représentatif, les frères musulmans de leur côté, réunissaient  » les fidèles  » dans l’enceinte de la mosquée pour préparer une aventure périlleuse qui coûtera la vie à un jeune militant. En effet, selon des témoignages, le muezzin, étudiant de son état, exhortait  » les invités à se préparer  » pour l’aventure. Aussitôt les étudiants sortaient pour afficher l’appel, une cohorte de militants vêtus en kamis, jean et baskets leur sautait dessus avec haches, coutelas et autres armes prohibées. Une scène d’horreur s’en est suivie. Stupéfiaient, les étudiants découvrirent, le corps de Kamel gisant dans une marre de sang. La nouvelle de son assassinat faisait le tour des cités et campus. Son assassin était Lassouli Fateh-Ellah, fils d’un commissaire de Police. Il sera condamné, à l’issu d’un simulacre de procès,  » sans la présence de l’avocat principal de sa famille « , regrette toujours cette dernière, à huit ans de prison.

Le même assassin de Kamel sera gracié quelques années après par le président Chadli Ben Djeddid, pour se retrouver, vers le début des années 90, membre actif au sein du parti dissous, Fis. Tout comme la plupart de ses co-équipiers au sein du Fis, il rejoignit le maquis et il sera abattu par les forces de sécurité en 1995, sur la route menant de Yakouren vers Tizi Ouzou.

26 ans après le lâche assassinat, Lassouli Fateh-Ellah creusait une tombe à un jeune militant, mais, il ne s’est pas aperçu qu’il ouvrait les portes de l’Histoire à un homme de convictions. Lassouli Fateh-Ellah et sa bande de terroristes ont ouvert la voie, en assassinant Kamel, à une aventure qui n’a pas encore connu son épilogue. En l’assassinant, il lui ont offert l’éternité. Les idéaux pour lesquels il s’est sacrifié resteront, à jamais, la quête de liberté et de démocratie dans un pays voué, malheureusement, aux griffes de la barbarie islamiste.

Mohamed Mouloudj

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