La Dépêche de Kabylie : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ? ll Meziane Moulahoum : Je suis un jeune natif de Boumahni (Tizi Ouzou) dans la Kabylie profonde. J’ai eu l’œil braqué vers les arts martiaux dès l’âge précoce. L’idée de pratiquer le sport m’est venue durant les années 1980 où j’essayais, dans un premier temps, de toucher à tous les arts martiaux. Au début de la décennie écoulée, en 1991, et au bout de ma formation à l’INFS/STS, j’ai réalisé un mémoire de fin d’études sur la rénovation des arts traditionnels berbères (thiqar). Depuis,et avec l’arrivée de l’expert coréen Pak Bong Dok, 6e dan en 1993, je me suis définitivement reconverti en athlète de taekwondo, version ITF. Dès lors, avec un encadrement de qualité, des athlètes commençaient à faire sensation, notamment lors du championnat d’Algérie organisé à la Coupole du complexe Mohamed-Boudiaf.
Etant spécialiste en taekwondo, pouvez-vous nous donner un aperçu sur ce sport en Algérie ?ll Jadis, soit avant 1994, taekwondo ITF était sous l’égide de la Fédération algérienne de karaté do et de taekwondo. Cependant, nos athlètes étaient carrément délaissés par les responsables de la FAKT lors du championnat du monde qui s’est déroulé, en 1994, à Terran Gano (Malaisie). L’Algérie était représentée par Kamel Aït Amour et moi-même qui avons participé à ce challenge sans entraîneur. C’est à partir de là que des dissenssions entre la commission ITF et la FAKT commençaient à faire leur chemin. Dès notre retour, nous avons avisé les responsables de la FAKT en leur exposant nos problèmes, en vain.
Vous dites que les responsables de la FAKT n’accordent aucun intérêt au taekwondo, version ITF. Quel a été donc le sort de cette discipline après 1994 ?ll La décision était toute simple. Puisque la commission ITF était délaissée et marginalisée par la FAKT, nous avons directement songé à la création d’une structure indépendante à la FAKT. Il s’agit de l’ATA, Amazigh taekwondo association, qui a vu le jour peu de temps après. Seulement, le point noir était, force est de constater, l’absence d’agrément. On a maintes fois déposé le dossier mais ce dernier butait sur des blocages multiples allant même jusqu’a interdire la pratique de la discipline en Algérie. Les activités de l’ATA se limitaient par la force des choses à la Kabylie où les compétitions se déroulaient à Tizi Ouzou avec la participation de 18 clubs qui travaillaient en partenariat avec l’ATA. Cette dernière est le représentant officiel de l’Algérie à l’échelle internationale. Ainsi, en solo, sans aucun soutien de l’Etat, l’ATA a participé au championnat du monde en 1996 où elle a décroché la 4e place devant 34 pays. Je dis bien sans aucun apport des pouvoirs publics. C’était moi-même qui avais pris en charge nos athlètes. Nous avons également pris part au championnat du monde seniors en Russie, en 1997, où nous avons franchi le 2e tour. Il est à rappeler aussi, qu’en 1995, on devait participer au championnat du monde juniors mais à cause du comportement d’un dirigeant, Amar Lakhal en l’occurrence, qui a accaparé le document officiel (l’invitation), on a été contraint de ne pas y prendre part à la dernière minute.
Maintenant, pouvez-vous nous parler des perspectives de l’ATA ?ll Je pense qu’avec la mise en œuvre sur le terrain d’un protocole d’accord signé depuis longtemps entre l’Algérie et la Corée du Nord, le taekwondo ITF arrive à s’épanouir et transcender les obstacles administratifs car le problème demeure toujours d’actualité. Le taekwondo ITF n’est pas pris en charge par l’Etat. Il y a des obstacles à tous les niveaux. Pour revenir à l’ATA, notre objectif immédiat, c’est de remettre les choses sur orbite après une hibernation due essentiellement aux agissements irréfléchis d’un ex-membre de l’association, Hadj Moussa Arezki, qui a piétiné les principes du taekwondo pour confisquer les archives et le materiel de l’ATA. Il y a également d’autres raisons ayant poussé l’ATA à surseoir à ses activités pendant plusieurs années. Aujourd’hui, j’espère redémarrer la discipline, avec des jeunes, armés d’une volonté inflexible et d’une motivation inouïe, sous de bons auspices et en respect des principes du taekwondo. Je vous informe également que l’ATA prendra part avec une dizaine d’athlètes aux 14e championnats du monde par équipe et en individuel, prévus du 24 au 31 août prochains en Allemagne.
Maintenant, par quoi voulez-vous conclure ?ll Je dirais pour conclure que le taekwondo ITF dans notre pays reste toujours à l’état embryonnaire et qu’il a besoin de paix, de sacrifices et d’un apport de chacun de nous pour qu’il se développe loin des querelles de leadership. Autrement dit, il s’agit de travailler dans le respect du règlement inférieur de l’ATA et de l’ITF.
Interview réalisée par Hafid Azzouzi