Le kidnapping, commode et inépuisable

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Le jeune homme de trente-deux ans, dont la presse ne donne, pour des raisons tout à fait compréhensibles, que les initiales a été kidnappé puis relâché « près de son domicile », de Aïn Zaouia. L’opinion, depuis quelque temps, s’est habituée à apprendre la libération des personnes enlevées plus que leur rapt. Parce que l’horreur du kidnapping s’est banalisée, « l’événement » en termes d’intérêt informatif est moins dans l’acte que dans son dénouement. Heureux ? Certainement, si on considère qu’un homme qui revient après que sa vie eut été mise dans une équation criminelle est toujours un soulagement. Énième victime d’un mode opératoire terroriste ou mafieux, le jeune « M. K., de Aïn Zaouia », comme beaucoup d’autres avant lui, n’est pas relâché comme ça, parce que ses ravisseurs sont revenus à de meilleurs sentiments, mais parce que la rançon a été payée.

Les exemples ne manquent pas où des « négociations » des « intermédiations », des « contacts » et des « sommes » revendiquées, revues, réunies et remises ont été rapportés dans le détail.

Tout se sait en fait dans ces petits espaces d’opération où on ne peut pas cacher grand-chose. Tout, y compris les complicités et les lâchetés locales. Et si, dans ces contrées si ramassées tout finit par se voir, tout ne finit pas par se dire. Plus d’une cinquantaine d’enlèvements sur un axe en mouchoir de poche, « le travail », en plus de sa rentabilité, devrait être bien confortable. Pour que cela continue avec autant de régularité et d’assurance, pour qu’on raccompagne les otages jusque dans leur jardin, c’est que les ravisseurs ne devaient pas avoir à s’inquiéter. Bien sûr, les familles ont toutes les raisons de prendre un maximum de précautions pour ne pas mettre la vie des leurs en danger, mais il est tout de même inquiétant qu’on ne sache rien de ce qui a pu être tenté par les services de sécurité pour qu’un kidnapping ne soit pas fatalement sanctionné par le remise de la rançon qui n’est, tout compte fait, pas une assurance tous risques contre le pire. Surtout que les terroristes ont ceci de commun avec les autres criminels : ils ne reculent que si on les combat. Et il ne doivent jamais sentir qu’il y a un terrain qui leur soit conquis ou un type de combat où ils seraient imbattables. Or sur ce terrain précis, il semble bien que rien de vraiment sérieux n’a été tenté pour les décourager. Il faut bien se rendre à l’évidence, les choses, depuis deux ou trois ans, en sont là : on cible un homme dont la famille a les moyens de sauver sa vie, on l’enlève et on vient quelques jours après prendre la mallette, toujours au rendez-vous parce qu’il n’y a pas moyen de faire autrement. Et si personne n’a été tué jusque-là, c’est pour ne pas tarir une source qui ne donne aucunement l’impression de pouvoir s’épuiser. Et ça continue.

S. L.

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