Guantanamo, pourquoi ?

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Il aurait pu s’enfermer, comme la plupart de ses confrères en pareil cas, dans la raison professionnelle et s’enthousiasmer “comme tout le monde” pour la fermeture de Guantanamo. Mais cet avocat français, qui défend pourtant un détenu innocent, incarcéré dans cette prison sur une dénonciation calomnieuse, appelle l’opinion à tempérer ses ardeurs et à ne pas oublier l’essentiel.

Pour autant, cet avocat ne remet pas en cause la suppression de ce camp de détention spécial dont il dénonce l’ouverture, dit-il, “dans l’europhie de la lutte antiterroriste qui semblait tout permettre à George W. Bush.”

Et “l’essentiel”, comme il l’a déclaré avec beaucoup de pertinence et de conviction, est d’éviter de tomber dans ce piège pernicieux qui consiste à dédouaner le terrorisme sous prétexte qu’il y a eu de l’abus dans le traitement de terroristes ou qu’il y a des personnes injustement accusées et punies. En plus clair, Guantanamo “la honte” ne devrait pas faire oublier le Word Trade Center “incarnation de l’horreur.” Il ne faut surtout pas que Bush, dont le mandat calamiteux vient de se terminer dans une formidable rupture historique, soit retenu comme l’exemple de fermeté à l’égard de la nébuleuse terroriste internationale. Ou encore plus grave, suggérer que Barack Obama, qui a promis la fermeture de Guantanamo dans sa campagne et qui a tenu parole en faisant même sa première mesure de président élu, va renoncer à la lutte antiterroriste comme une des priorités de son programme.

En projetant un retrait “échéancé” des troupes américaines d’Irak et une réorientation des forces vers l’Afghanistan, Barack Obama a pourtant été trop clair pour laisser planer quelque doute : les Etats-Unis doivent cesser d’être le gendarme injuste et agressif du monde, mais il n’est pas question de céder le moindre pouce au terrorisme.

Au contraire, il s’agit d’être plus efficace, en évitant les abus genre Guantanamo et en renonçant à l’agression genre Irak. Et Barack Obama a tout confirmé dans son discours d’investiture en tendant la main au monde musulman à qui il propose d’inaugurer une nouvelle ère de coopération “ dans le respect des intérêts mutuels”, mais aussi en avertissant le mouvement terroriste qu’il “ ne lui fait pas peur”.

Que tous ceux qui voient dans la fermeture de Guantanamo la preuve que le terrorisme est une invention de l’esprit ( ou de Bush) reviennent sur terre, Obama a l’intention de moraliser le combat qui en viendra à bout, les leaders terroristes le savent, eux qui viennent déjà d’annoncer la couleur.

Ils savent que l’ennemi sera plus redoutable en devenant plus crédible et regrettent déjà Bush qui leur a donné tant d’alibis. Y compris ceux qui les présentent parfois comme des victimes, ce que notre avocat semble appréhender dans “l’euphorie de la fermeture de Guantanamo.”

S.L

laourisliman@gmail.com

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