Leila n’est pas comme les autres

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Le pont Sayeh, cette horreur architecturale de Bouira, est connue pour son bouchon stressant, ses flics assurant la fluidité de la circulation, ses rails, sa station taxi et… “sa” Leila, le seul “événement” vivant du pont. La jeune fille souffre de difformités congénitales et d’hydrocéphalie. Sa corpulence, sa frimousse, son sourire, toujours au rendez-vous, ne cadrent pas avec son âge : elle n’est pas loin de la trentaine. Et même si sa condition suscité forcément de la compassion, elle ne semble pas s’apitoyer sur son sort. Leila semble même heureuse. Vous ne la verrez jamais abattue. Elle est toujours souriante. C’est d’ailleurs ce sourire d’ange qui a conquis les Bouiris qui l’ont tout de suite adopté. Leila est connue en dehors du chef-lieu de la wilaya. En fait, elle est plus populaire que le maire et le président de l’assemblée de wilaya.Leila ne se déplace pas beaucoup. Pour ce faire, elle est obligée de fournir un effort physique considérable qui finit toujours par l’anéantir. Alors, elle préfère s’affaler à même le trottoir. Sa tête plus lourde que son corps penche toujours de côté. Elle souffre, mais le sourire est toujours là. Elle ne s’en départit jamais. Emouvante avec son “s’bah l’khir khouya !”, elle ne laisse aucun passant indifférent. Mais que peut faire le passant, à part lui rendre le sourire et déposer une pièce de monnaie dans sa main. Leila n’habite pas le pont Sayeh, même si elle lui colle comme un décor. Elle habite Aïn Bessem, 25 km au sud de Bouira. Chaque matin, sa mère la conduit à l’arrêt des bus et ne rentre chez elle qu’une fois Leila embarquée. Arrivée à Bouira, et après une dépense d’énergie considérable, elle se lâche sur le trottoir. Le soir, Leila est la dernière à rentrer chez elle. Des fois c’est sa maman qui vient la récupérer. A vrai dire, la maman vient récupérer l’argent que Leila a gagné pour la journée.

T. O. A.

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