Faciliter l’accès à la ressource financière

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Ce nouvel instrument d’accompagnement financier des entreprises est issu de la restructuration de la Banque algérienne de développement (BEA), structure chargée traditionnellement de la gestion des prêts extérieurs destinés au développement des infrastructures et équipement publics. En s’inscrivant dans « la dynamique de soutien financier à l’investissement », comme le souligne le ministre des Finances, Karim Djoudi, ce Fonds doté de 150 milliards de dinars est chargé, d’après le ministre, « d’apporter les ressources financières supplémentaires et de répondre aux attentes des investisseurs par une approche nouvelle ». A ce jour, les crédits bancaires mobilisés pour financer l’économie se montent à 2 600 milliards de dinars, soit une croissance annuelle de 15%. C’est en complémentarité de ces crédits que le FNI sera mobilisé avec, il est vrai, quelques avantages comme la possibilité de prêts consensuels à des taux réduits, mais aussi une possibilité de garantie par l’État. Le ministre des Finances précise que ce sont des financements à long terme destinés à encourager les investissements directs étrangers (IDE) ainsi que les investissements nationaux. À moyen terme, le FNI pourra intervenir pour un seuil minimal de 1 000 milliards de dinars.

Il y a lieu de noter l’observation d’un expert, le Dr Lamiri, qui a participé au début du mois en cours à un colloque algéro-frano-québécois sur « L’entreprenariat et la PME algérienne face au défi de la mondialisation ». Dr Lamiri, Pdg de l’INSIM, révèle que les financements bancaires sont dédiés, entre 40 à 45 %, à des entreprises publiques à capacité réduite de remboursement, et entre 5 et 9 % aux petites et moyennes entreprises. Les PME se trouvent ainsi pénalisées par un système de financement que les règles prudentielles entraînent vers une inexplicable rigidité. À la même occasion, le professeur canadien André Joyal, de l’Institut de recherche sur la PME a mis en exergue le rôle que peuvent jouer les petites et moyennes entreprises dans la résistance à l’effondrement des économies nationales dans le contexte actuel de la crise mondiale. Pour ce faire, l’État, en tant qu’instance de régulation et d’encouragement, est censé assumer magistralement son rôle. « L’État doit être meilleur dans son fonctionnement, facilitateur, partenaire efficace des entreprises », estime-t-il.

Réticences et entraves

Les pouvoirs publics se sont penchés sur l’identification des divers et nombreux blocages qui ont hypothéqué jusqu’ici les grands flux d’investissement que notre pays est en droit d’attendre dans une conjoncture exceptionnellement propice sur le plan des finances publiques et de l’équilibre des grands agrégats économiques. Le traitement des dossiers par l’ANDI (Agence nationale du développement de l’investissement) ne semble pas donner tous les résultats escomptés. Et pour cause, le passage au crible de cette Agence des différents dossiers qui atterrissent sur son bureau se limitait à faire valoir les avantages (fiscaux, douaniers, taux d’intérêt des crédits,…) accordés par l’État aux candidats à l’investissement. De nombreux projets validés par cette institution qui travaille pour le compte de l’État n’ont pas pu voir le jour des années après leur validation en raison des lenteurs, entraves et dysfonctionnements qui caractérisent les autres institutions chargées d’encadrer l’investissement (banques, caisses de garantie, services de la wilaya pour ce qui a trait au foncier industriel,…). En tout cas, face à tous ces aléas, le gouvernement a initié un nouveau code des investissements qui est à l’état de gestation, mais qui est censé casser les barrières qui s’opposent aux investissements nationaux et étrangers massifs. Le phénomène de l’économie informelle qui ronge depuis des décennies le reste des autres activités relevant de l’économie structurée a aussi été appréhendé par le président de la République comme un facteur de blocage de l’investissement Ainsi, outre les mesures et réglementations destinées à lutter contre le blanchiment d’argent, la contrebande, la contrefaçon et la corruption, le président Bouteflika mettra en exergue « les réformes en cours qui ont permis une meilleure bancarisation de l’économie, la réduction de la pression fiscale, la libéralisation du commerce extérieur, la convertibilité commerciale de la monnaie nationale, la simplification des formalités douanières ». Ce sont des facteurs, assure Bouteflika, « qui doivent concourir à l’assèchement des activités dans la sphère informelle ». En tout cas, avec le nombre de personnes qu’il emploie-environ un millions trois cent mille- et l’éventail des activités qu’il embrasse, le secteur de l’informel ne peut laisser indifférents ni les pouvoirs publics, ni les vrais acteurs de la vie économique légalement installés, ni les services des Impôts et Caisses sociales pour qui le manque à gagner se chiffre en centaines de milliards de dinars (évasion fiscale) ni, à plus forte raison, l’opposition politique et les monde syndical.

Les investissements extérieurs en stand-by

À l’occasion de l’installation du Fonds national d’investissement, le ministre des Finances a révélé que la moyenne du rythme des investissements directs étrangers en Algérie est de 1 milliard de dollars par an. Cette donnée, tout en révélant l’ampleur des investissements d’un pays et son degré d’attractivité, ne constituent pas, aux yeux de certains partenaires économiques nationaux, une condition sine qua non pour se lancer dans des opérations d’investissement dans leur propre pays.

En octobre 2008, un programme d’investissement euro-méditerranéen, appelé “Invest in Med”, a été lancé à partir de la Tunisie. Ce programme qui touchera notre pays visera à mettre en relation les partenaires et acteurs économiques à travers les rencontres d’affaires et les conférences, comme il s’emploiera à mettre en place des opérations d’assistance, des sessions de formation et d’études.

Pour mener efficacement ces actions, ce programme d’investissement ciblera des “niches sectorielles” précises ou des domaines “transversaux” à l’image des jeunes entrepreneurs et des femmes, la micro-entreprise, le partenariat public/privé et la promotion des PME.

Plus que le milliard de dollars dont a fait état le ministre des Finances, dans des conditions idéales du climat d’investissement, l’Algérie pourrait accueillir des IDE de l’ordre de 5 à 6 milliards de dollars d’après les spécialistes.

Comme a eu à le déplorer le président de la République lui-même, dans la phase actuelle, ce sont plutôt les opérations purement commerciales (représentations en Algérie de firmes de construction automobile, de fabrication de médicaments) qui font l’actualité de l’investissement en Algérie. En tout cas, dans le rapport de la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (CNUCED) sur l’investissement dans le monde en 2008, notre pays se retrouve dans la position de huitième en Afrique en matière d’attractivité pour les investissements étrangers.

Ces derniers étaient de 1,6 milliard de dollars en 2007 en direction de l’Algérie, selon l’institution onusienne. L’Algérie vient bien après le Nigeria (12,5 mds de $), l’Egypte (11,6 mds de $), l’Afrique du Sud (5,2 mds de $), la Maroc (2,6 mds de $), la Libye (2,5 de $) et le Soudan (2,4 de $).

Pour toute l’Afrique, les IDE représentent 53 milliards de dollars en 2007. L’Algérie en a capté à peine 3 %.

Il est vrai que le critère des IDE a été fort discuté en Algérie pour savoir s’il constitue une base logique de réflexion sur les vrais investissements porteurs de richesses et de possibilités de création d’emplois dans le pays.

Cependant, ce signal demeure un sérieux critère en matière du degré d’attractivité pour les entreprises étrangères, donc du climat des affaires dans le pays.

La fin de la défiance ?

A la fin de l’année dernière, deux signaux venus de deux autres institutions ont probablement valeur d’ “avertissement”.

Transparency International (TI) s’inquiète des ravages de la corruption et classe Algérie à la 99e place sur un panel de 180 pays.

La Banque mondiale, elle, met notre pays à la 125e place sur un ensemble de 178 pays étudiés sur le plan du climat des affaires. Un rapport plus récent (septembre 2008) émanant de la même institution renvoie l’Algérie à la…132e place.

Il faut dire que la convergence des ces deux cotations (corruption et climat des affaires) n’est nullement le fait du hasard ; une infernale relation dialectique jette ses ponts entre les deux phénomènes : climat des affaires lourd, empêtré dans une légendaire bureaucratie et dissuadant les investissements, d’une part, et corruption à grande échelle ayant gangrené le corps de la société et miné la pyramide déjà vermoulue des principaux rouages de l’administration, d’autre part.

Cette faiblesse chronique des gros investissements en Algérie relativise évidemment le constat d’ouverture sur le marché des investissements et traîne dans son sillage la symptomatologie d’une économie qui n’arrive pas encore à sortir des ornières de la rente où elle engluée depuis au moins trois décennies. C’est Ahmed Ouyahia qui explique : « les structures de l’État n’ont jamais eu à gérer autant d’argent.

Ceci a engendré du gaspillage, un comportement, je dirais, d’enfant gâté, en plus de l’existence de la corruption et de détournements, conjugués aux effets de la crise nationale que l’Algérie a subie, qui a fait que des groupes d’intérêts se sont renforcés et ont engrangés des gains illicites ».

Si des responsables, au rang de ministres, réfutent toute idée de retombée de la crise financière mondiale sur l’Algérie, Ahmed Ouyahia met de la nuance en soutenant que : « Le système bancaire national, du fait de son retard, est relativement épargné.

L’économie nationale cependant risque d’en pâtir à cause du ralentissement de la croissance mondiale engendré par cette crise, notamment la baisse de la demande sur le pétrole, dont les exportations constituant la quasi-totalité des ressources en devises de l’Algérie ».

Ainsi, les limites du “miracle” pétrolier sont chaque jour mises en évidence. Après des ascensions successives qui ont fait monter le baril jusqu’à 145 dollars, l’or noir risque de revoir les bas-fonds d’une dangereuse dépression.

L’OPEP entrevoit déjà une énième réduction de la production à partir du mois prochain de façon à juguler la chute des prix.

Nouvel impôt sur les bénéfices des sociétés étrangères

La politique nationale d’investissement, particulièrement son côté partenariat avec l’étranger, a fait l’objet de sévères critiques de la part du président de la République à la rentrée sociale passée.

Ces observations ont été exprimées publiquement face aux maires regroupés à Alger.

Quelques semaines après, une mesure- insinuée par Bouteflika dans le sillage de la nouvelle conception de l’investissement étranger en Algérie- a été prise par le Chef du gouvernement ; elle concerne l’établissement d’une taxe qui grèvera les dividendes réalisés par les entreprises étrangères exerçant en Algérie. Les transferts d’argent- exonérés de toute imposition- effectués par ces entreprises vers leurs pays d’origine ont été qualifiés, bien tardivement, de “fuite de capitaux”. Des analystes ont, depuis quelques années déjà, tiré la sonnette d’alarme quant à cette fuite considérable de capitaux qui pénalise l’Algérie.

C’est l’Assemblée nationale populaire qui a ainsi pris en charge la promulgation de cette mesure dans le cadre de la de Finances 2009.

L’article de la loi de Finance considère les bénéfices transférables des succursales et autres installations aux sociétés-mères établies à l’étranger comme dividendes qui doivent être soumis à une taxe de 15 %.

Les sociétés étrangères exerçant en Algérie sont censées, d’après la nouvelle loi, créer une filiale ou une succursale, ou bien une autre entité professionnelle au sens fiscal.

Amar Naït Messaoud

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