Le régime alimentaire des Algériens ne correspond plus aux normes mondiales de la santé. Cet état de fait est dû au pouvoir d’achat du citoyen qui ne cesse de se dégrader. Même si la plupart d’entre eux gagnent un dollar par jour, la moitié ne consomme pas de viande et de fruits. En effet, la consommation de pattes, pain et lait dépasse de dix fois la consommation de nos voisins pour les mêmes produits. En outre, il convient de savoir que les Algériens consomment en moyenne 200 kg de céréales par an, occupant ainsi la première place au monde. Ils consomment 30 fois plus de lait que le Français, 25 fois plus que le Marocain et 15 fois plus que le Tunisien. Quant au pain, le volume de consommation des Algériens a augmenté de 33.2 mg par personne en 1980, à 40 kg en 1990, 46,5 en 2000, et on prévoit à l’horizon 2010 50 kg par personne.
Cela a créé une situation nouvelle, à savoir la hausse du budget familial réservé à la consommation, variant ainsi entre 55 et 60 % mensuellement, alors qu’en France il se situe entre 15 et 17 %. Une nouvelle habitude est apparue chez les Algériens. La majorité des pauvres est orientée vers la consommation quotidienne de pâtes industrielles vu leur prix abordable.
A cet effet, les experts algériens en économie affirment que l’Algérien demeure loin de la culture alimentaire, citant à titre d’exemple les pays de l’Europe de Sud, qui consomment le poisson pour mieux affronter le froid, les pays du nord de la Méditerranée tels que l’Espagne, l’Italie et la Grèce qui ont un régime alimentaire varié, les Asiatiques qui consomment le riz au lieu du pain. Chez nous, le consommateur se contente de couscous, de pain et de lait, des produits “à faible bénéfice” qui sont généralement à la portée de tout le monde. Et pour cause, la production nationale ne couvre qu’entre 20 à 30% des besoins. Elle se noie dans une dépendance en enregistrant des chiffres qui font peur et qui ne cessent d’augmenter, étant donné que la facture d’importation des produits alimentaires est passée de 2,4 milliards dollars en 2001 à plus de 3 milliards en 2005, pour atteindre 8 milliards en 2008. Les exportations algériennes des produits alimentaires, elles, ne dépassent pas généralement les 80 millions de dollars, durant les deux dernières années. Ce chiffre n’a même pas atteint le tableau le moins cher de Picasso dont le temps consommé pour son dessin n’a pas dépassé les 2 heures. D’autre part, et selon une étude effectuée par le Conseil national économique et social (CNES), il s’avère que 56 % des citoyens font l’impasse sur la consommation de la viande et des fruits.
Quel avenir pour la sécurité alimentaire des Algériens ?
Malheureusement, rien ne se profile à l’horizon, d’autant que les experts économiques sont unanimes à dire que l’avenir alimentaire des Algériens est menacé par par la mauvaise gestion et une planification hasardeuse de notre économie. Cette situation est due, en premier lieu, à la nature de notre économie, qui présente en elle-même une menace à notre sécurité alimentaire, du fait qu’elle s’appuie à 98% sur la rente pétrolière, ce qui a rendu notre économie tributaire des prix du brut qui jouent au yo-yo, ce qui se répercute négativement sur le pouvoir d’achat des Algériens. En outre, la sécheresse et la désertification arriveront, selon les prévisions des experts, aux portes de la wilaya de Médéa, distante de 75 km de la capitale, dans 20 ans. Enfin, en 2020, nous serons 40,5 millions d’Algériens, ce qui obligera le gouvernement à sacrifier des milliers d’hectares de terres agricoles. Cela va se répercuter négativement sur la production agricole, surtout quand on sait que de grandes villes comme Alger et Oran ont entamé déjà cette sale besogne, en transformant officiellement des terres agricoles en projet de millions de logements, au détriment de notre patrimoine agricole d’antan. Dans le même sillage, il faut savoir que notre espace agricole est très limité. Les terres agricoles qui représentaient 0,20 ha par habitant en 2000 ne seront que 0,19 en 2010, et ne représenteront que 0,17 en 2020. Les wilayas d’Oran, Alger et Annaba ont perdu près de 71 % de terres agricoles en 30 ans, cédées généralement pour des constructions anarchiques.
L’autosatisfaction alimentaire est le seul moyen d’assurer un avenir aux Algériens. Notre gouvernement est appelé à revoir sa stratégie, qui montre au fil de temps sa limite et son échec.
Yahia Maouchi