La rentrée entre enthousiasme et appréhension

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Cette rentrée, constate-t-on, fait bien des vagues. Chez les parents, les avis sont partagés. Même si en majorité, ils attendent que leurs enfants rejoignent au plus vite l’école dans des conditions sereines, certains brandissent la carte des difficultés, principalement financière, rencontrées à l’approche de l’Aïd El-Fitr. Mohamed H. dira à ce propos : “Je suis fonctionnaire et père de trois enfants qu’il faut habiller pour la rentrée scolaire en attendant les listes des affaires et livres scolaires, mais le plus important est de mettre tous les atouts du côté de nos enfants pour leur réussite.” K., un autre parent, plus inquiet par la multitude de dispositions distillées quotidiennement à propos de la nouvelle année scolaire, dira : “Les nouvelles dispositions sont annoncées et du coup une certaine forme d’inquiétude a gagné des parents, les enfants et même les enseignants qui semblent perdus dans cette profusion d’annonces.” Nombreux sont les parents d’élèves qui appréhendent l’incidence des nouvelles réformes ministérielles qui ont touché le calendrier scolaire, notamment la période des examens, sur le rendement scolaire des élèves. A ce propos, il y a lieu de savoir que l’année scolaire qui s’achevait habituellement au mois de mai, s’étendra dorénavant jusqu’au mois de juin. “Comment voulez-vous que nos enfants puissent suivre et assimiler des cours en pleine canicule ? Auparavant, les compositions se faisaient avant le mois de juin, les premières semaines de ce dernier étant traditionnellement consacrées aux différents examens”, confiera, inquiet, un parent d’élèves. Quant à Z. M. résidant à Sidi-Aïch, il dira : “Je suppose que le premier et le deuxième trimestre ne verront aucune perturbation dans la scolarité, vu qu’ils fonctionneront selon l’ancien système. Par contre, le problème va certainement se poser au début du troisième trimestre. Nos enfants ont donc intérêt à se faire assister par les cours privés pour être au rendez-vous des examens. J’ai une fille qui passe cette année en terminale et je vais lui consacrer un budget spécial pour bénéficier d’une assistance dans ses cours. Ces cours privés lui permettront de mieux se préparer. Nous savons que l’année passée, de nombreux établissements secondaires ont clôturé tardivement leur année scolaire et si cela venait à se reproduire encore cette année, les élèves n’auront pas assez de temps pour se préparer”. Une parente d’élève avouera : “Sincèrement, les choses ne sont pas assez claires, pour nous, parents d’élèves, et je pense aussi qu’il en est de même pour la famille de l’éducation. J’invite donc la tutelle à fournir un effort pour vulgariser ces changements et leurs incidences sur la scolarité de nos enfants et leur avenir. J’ai deux enfants qui vont passer le baccalauréat cette année…” Un enseignant du lycée à Sidi-Aïch expliquera à ce propos : “Initialement, ces changements n’étaient pas prévus. Ils sont intervenus à la suite du changement du week-end. Ils vont avoir un impact sur le déroulement des cours et les rendez-vous des examens vont se distancer. En ce qui nous concerne et en tant qu’enseignants, nous sommes tenus d’appliquer ces nouvelles mesures. Ce que nous craignons le plus, ce sont les absences récurrentes des élèves qui, habituellement commencent avec la première semaine du mois de mai et touchent particulièrement les classes de terminale. C’est la raison pour laquelle, nous avons tout intérêt à déployer les efforts nécessaires, afin de clôturer le programme avant la fin du mois de mai”

Le tablier de la discorde

Les représentants du ministère de l’Education ont soutenu que la décision d’unifier la couleur des tabliers est d’une importance “cruciale”. Un inspecteur dépêché par la tutelle pour expliquer “l’imminence” de ce choix a affirmé que “le port d’un tablier d’une même couleur instaure la discipline au sein de l’école et introduit de l’harmonie dans ses rangs”. Un autre responsable au ministère de l’Education nationale a dit mieux : “Le port du tablier permet de faire la différence entre celui qui cherche le savoir et celui qui fait autre chose.”

En évoquant la question de l’obligation du port de la blouse par les élèves des différents paliers. M. Benbouzid a affirmé avoir instruit les chefs d’établissements scolaires d’être plus souples à l’égard des élèves qui n’ont pas encore trouvé de blouses selon les couleurs exigées par l’instruction ministérielle, leur accordant un délai d’une semaine, mais pas au-delà. Comme il a insisté sur l’octroi de la prime de 3000 DA au profit des élèves issus de familles nécessiteuses à même de leur permettre de se procurer la blouse demandée. La rentrée scolaire a néanmoins enregistré dès le premier jour ses premières prises de bec entre le personnel encadrant et les parents d’élèves. “Nous avons cherché partout, dans tous les magasins mais ont n’a pas trouvé de tablier bleu pour nos enfants”, se plaignait hier une mère d’un élève de deuxième année. Une jeune dame qui a accompagné son fils, a expliqué qu’elle s’est même déplacé dans des entreprises de confection mais, a-t-elle précisé, “leurs responsables nous ont répondu qu’ils n’avaient même pas eu le temps de ramener le tissu qu’il faut pour fabriquer ces tabliers bleus”. L’uniformisation du tablier semble susciter beaucoup de remous de la part des parents d’élèves qui ne savent plus comment ni quoi faire pour appliquer cette décision ministérielle, appelée à entrer en vigueur cette année. Après une semaine seulement de la rentrée, certains ne savent même plus quelle est la description exacte du tablier “réglementaire” pour les filles ou pour les garçons et surtout où se le procureur. La décision d’uniformisation du tablier, instituée par Benbouzid, le ministre de l’Education, ne fait pas l’unanimité notamment des parents d’élèves et des vendeurs traditionnels de ces articles. Une autre maman, ayant, des enfants scolarisés, partage cet avis : “Nous sommes complètement perdus dans cette histoire. Nous n’avons aucun détail, aucune information précise dans cette nouvelle mesure. Un vendeur m’a recommandé un tablier à manches longues pour ma fille, alors que j’allais acheter un sans manches. Il faut dire qu’un tablier avec des manches longues n’est pas du tout du goût de ma fille, scolarisée dans le moyen.” Un directeur d’un établissement scolaire dans la wilaya de Béjaïa dira à son tour : “La publication ministérielle, annoncée en juillet dernier, à propos du tablier uniformisé, concerne uniquement sa couleur correspondant à chaque cycle, avec des manches longues.” Il est a souligner que l’uniformisation du tablier scolaire recommande aux filles des tabliers roses pour les cycles primaire et moyen, des blouses bleues et noires pour le secondaire et les élèves ne doivent pas couper les manches de leurs tabliers, donc les blouses avec manche sont obligatoires sinon c’est le renvoi!

La surcharge des classes décriée

La nouvelle rentrée scolaire, à l’instar des cinq ou six précédentes, n’est pas synonyme, du moins à Béjaïa, que de retrouvailles entre camarades et collègues et d’entame des cours. Elle révèle aussi un grand malaise plusieurs fois décrié, mais qui, volontairement ou non, est laissé en l’état par les responsables centraux. Il s’agit de la surcharge constatée des salles de cours, un souci dont plusieurs directeurs d’établissement pâtissent alors que leurs doléances semblent rester sans écho jusqu’à présent. En effet, au moment où le ministère de tutelle dépense chaque année des sommes faramineuses pour tenter de trouver (toujours en vain) le programme idéal d’enseignement pour les trois paliers, il se trouve qu’il tourne le dos à des problèmes aussi délicats que le programme en soi. Car il faut reconnaître que, même s’il à le meilleur enseignant en face de lui, muni du meilleur programme d’enseignement qui soit, l’apprenant ne retiendra jamais grand-chose, si, en classe, il n’est pas mis dans de bonnes conditions. Et c’est malheureusement le cas constaté dans certaines écoles, collèges et lycées de la wilaya de Béjaïa. Sur la périphérie directe de la ville, il est navrant de voir que des écoles primaires fonctionnent encore avec le système de la double vacation. Pis encore, dans ces mêmes établissements, les classes d’une seule vacation sont très surchargées, avec trois élèves à partager la même table. Peuvent-ils suivre les cours dans ces conditions ? Peuvent-ils écrire tout en étant aussi serrés les uns contre les autres ? Et que fait-on des risques de contamination en cas de maladie de l’un des élèves ? Et paradoxalement, en tête du nouveau programme d’enseignement, le ministère été catégorique en plaçant le cours de la grippe porcine en tête. Pour ce qui est de la surcharge des classes au niveau du moyen et du secondaire, certains enseignants l’imputent aux dernières décisions de la tutelle. “Alors que le ministre lance sur tous les toits que le nombre d’élèves en classe ne saurait dépasser les 27 ou 30 tout au plus, je me retrouve, cette année, avec cinq classes de 42, 44 et 45 élèves que je dois éduquer et à qui je dois enseigner, préparer des cours, des examens, corriger les épreuves de ces examens, remplir leurs fiches, leurs bulletins etc. En plus, je dois supporter les humeurs du directeur et l’insolence des élèves que je ne peux même pas punir ou exclure car la loi et le règlement me l’interdisent. Entre-temps, ce sont les bons élèves et les élèves moyens qui veulent apprendre, qui paient les pots cassés”, déclare, furieuse, cette enseignante du secondaire. A propos du calendrier scolaire fixé d’avance par la tutelle, deux enseignants, diront : “Nous avons été notifiés du nouveau calendrier scolaire pour l’année 2009-10, cette semaine seulement. Et comme première réaction, nous avons constaté que les programmes sont plus ou moins allégés, mais nous craignons tout de même que l’avancement des programmes accuse un retard. Nous avons également noté que plusieurs filières, scientifiques et techniques, vont voir l’introduction de l’outil informatique”. La nouvelle décision du ministre de l’Education portant sur l’annulation des devoirs oraux a surpris bien des enseignants. B. K.,16 ans, élève de première année secondaire, déclarera : “Je viens d’accéder au cycle secondaire et j’ai entendu dire que les dates des devoirs seront fixées. C’est une bonne chose. Cela nous permettra au moins de bien réviser avant de faire un devoir ou une composition et éviter ainsi d’avoir plus de deux devoirs par jour. Cela diminuera également le stress et l’angoisse, surtout pour les élèves qui, tout comme moi, viennent de passer au cycle secondaire et évitera également à certains professeurs de jongler avec les dates comme ils veulent. L’année dernière, un professeur de physique nous a fait le devoir la veille des compositions.” Un parent d’élève affirmera pour sa part : “A la suite de la mise en vigueur des nouvelles réformes, mes enfants ne supportaient plus les examens intensifs et inopinés. Avec la nouvelle décision ministérielle, je pense que les choses seront plus organisées et les élèves plus à l’aise.” A ce même sujet, un professeur du lycée Ibn-Sina à Béjaïa affirmera que “le nouveau programme n’arrangera pas tous les enseignants et ce, en raison des cours intensifs, il y a aussi cette annulation des devoirs oraux qui nous déplaît énormément”.

Samy H.

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