Les mots, un antidote à la douleur

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Cruel destin que celui de H’nifa qu’une société bigote jusqu’à la bêtise sacrifia sur l’autel des anachronismes. A peine sa puberté consommée, son géniteur de père la maria contre son gré à un homme qui fit étalage de toute sa pulsion violante.

Il en usa sans modération contre le frêle corps de H’nifa. La diva de la chanson kabylie sera terriblement marquée par les stigmates indélébiles de ce double traumatisme.

La chanson sera alors pour elle, une sorte d’antidote pour vomir son amertume et libérer son âme endolorie.

“Allah, ya rebbi ferredj” (ô Dieu, étends sur moi ta miséricorde) sera le premier disque de H’nifa enregistré en 1953 chez Marconi, après avoir fait ses débuts dans la chorale kabyle de la radio sous l’impulsion du regretté Cheikh Nordine. La même année marque le départ de H’nifa en exil. Elle avait 29 ans.

Elle s’établit à Paris où elle rejoint une pléiade d’artistes algériens tels que Misoum, Bahia Farah, Kamel Hamadi et Taleb Rabah.

En 1956, Zoubida Ighil Larbaâ (le vrai nom de H’nifa) intègre la fédération de France du FLN où elle se charge des collectes d’argent et de dons pour les enfants de martyrs et de prisonniers.

En 1958, elle fait partie de la chorale patriotique de Cherif Kheddam et enregistre plusieurs titres, dont le fameux “A Yemma Taazizt” (ô mère chérie) sur des textes de Kamel Hamadi. Elle rentre à Alger pour enregistrer plusieurs autres chansons et notamment “Machi d’leghna” (ce n’est pas de la chanson) qui résume toute sa thématique basée sur les épreuves de la vie. Elle donne son dernier concert en novembre 1978 à la mutualité de Paris aux côtés de Sliman Azem, Idir et Ferhat Imazighen Imoula.

La fille du village Ighil Mahni (Azzefoun) meurt dans l’anonymat le plus total en septembre 1981 en banlieue parisienne où elle fut enterrée avant que sa fille, aidée par des artistes, ne fasse rapatrier son corps au cimetière El Alia.

H’nifa a légué à la postérité une œuvre riche de près de 200 chansons, sans oublier ses participations dans le cinéma avec des rôles dans le feuilleton “L’incendie” de Mustapha Badie et “Les chevaux du soleil”, film français tiré du roman de Jules Roy.

N. Maouche

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