Hibernation

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La fièvre associative connaît un net refroidissement. On peut les compter sur les doigts d’une seule main, les associations qui continuent à activer contre vents et marrés et avec une relative performance sur le plan fonctionnel et un réel impact sur la société. Dans la wilaya de Bgayet, nombre d’entre celles qui ont eu le vent en poupe durant les premières années d’euphorie ont réalisé par la suite que fonder et faire fonctionner une association pour le bien de la collectivité n’est pas de tout repos, de même que s’ériger en partenaire des institutions dans la gestion des questions liées au développement est loin d’être une sinécure. Censés être une courroie de transmission entre les pouvoirs publics et la société, le tissu associatif n’a pas pu s’affirmer en creuset réel de mobilisation permanente ni en force effective de proposition, encore moins, un relais crédible des aspirations citoyennes. Mais peut-on raisonnablement aspirer à être performant et jouer un rôle tampon entre le pouvoir, les partis politiques et la société quand l’outillage méthodologique fait cruellement défaut ?

Comment peut-on devenir un capital social qui crée des idées, canalise l’opinion et influe sur la classe politique quand la compétence managériale si indispensable, laisse à désirer chez la plupart des animateurs du mouvement ? Un membre fondateur d’une association qui a pignon sur rue à Akbou, invoque la modicité des financements octroyés par l’Etat pour expliquer les difficultés de leur association qui, avoue-t-il, a dû ravaler ses velléités émancipatrice pour survivre. “Accepter le compromis ou passer à la trappe”, résume-t-il. Et ce n’est pas les moyens de pression qui manquent : encadrement des associations par des notabilités, intronisation des opportunistes et autres personnages obséquieux, maniables à souhait, etc. Des associations ont alors vite fait de troquer leur mission d’utilité publique contre celle d’utilité politique.

L’intrusion du politique a créé des clivages monstres qui ont précipité la chute de ces structures pour se muer en appendices de quelques chapelles politiques. Des associations qui ont tenté d’échapper à l’infamie de l’asservissement sont vouées à la disgrâce avant de tomber en déshérence. Evoquant le volet juridique, en l’occurrence la loi 90/31 régissant la vie associative, un juriste parle d’un “marquage à la culotte”. “Pourquoi, dénonce-t-il, on délivre un récépissé d’enregistrement au lieu d’un agrément en bonne et due forme si ce n’est pour avoir la mainmise sur ces associations”. D’après lui, la conception globalisante qu’a le pouvoir de l’ordre social et les a priori défavorables envers le mouvement associatif ont tué dans l’œuf toute idée d’autonomisation des groupes sociaux, d’où l’apathie et la mort lente qui affectent nombre de ces associations.

N. Maouche

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