Des jeunes s’agglutinent devant la devanture du cinéma Caméra. Un nouveau film marocain est annoncé en grande pompe. Il s’agit de Casablanca by night. Ce sont les jeunes qui sont les plus curieux de savoir de quoi traite ce long métrage. Plusieurs photos montrant des séquences du film sont affichées. Deux séances sont proposées quotidiennement, l’une à 14h et la seconde à 21h. En face de la salle de cinéma, la terrasse du café Rex est pleine à craquer. Seule une table est libre mais elle est dépourvue de chaises. Il est 20 heures et l’animation en ville ne fait que commencer. Comme Fès, Meknès vit pendant la nuit. De visu, nous constatons qu’il y a moins de touristes qu’à Fès. Le nombre d’hôtels n’est pas élevé non plus. Il s’agit plutôt d’une ville discrète, surtout la Nouvelle Ville. La médina, située à vingt minutes de marche, est plus peuplée par les touristes et même par les autochtones.
Double vie dans une ville double
En début de soirée, en parcourant le Boulevard Hassan II, on constate qu’il y a plus de mouvement que durant le jour. Une discothèque située à l’entrée de la ville, en venant de la Médina, diffuse à grands décibels de la musique moderne. Des jeunes garçons et des jeunes filles, vêtus à l’occidentale et ne dépassant pas vingt cinq ans, s’apprêtent à se rendre dans l’enceinte de l’établissement qui ferme à minuit. Pour pouvoir passer une soirée, il faudrait avoir les poches pleines puisque même pour avoir droit à l’accès, il faudrait débourser une somme relativement importante. Les familles, c’est de l’autre côté de la ville qu’elles se retrouvent (comme à Fès, l’ambiance en moins) en début de soirée, au jardin sis en face de l’hôtel de ville. Des jeunes filles, traditionnellement habillées, accompagnées des parents, des frères et des enfants sont assises à même le sol. Les adultes discutent tandis que les enfants courent dans tous les sens. L’unique librairie est ouverte jusqu’à une heure tardive. Beaucoup de clients passent de longues minutes entre les rayons, bien garnis. De nombreux exemplaires de « Le Zahir », dernier roman de Paulo Coello occupent une grande partie du comptoir. Les prix des livres sont relativement chers. Grosso modo, la Nouvelle Ville de Meknès n’a rien de spécial. Ceci explique qu’elle ne soit pas un lieu d’attraction pour les touristes. Ces derniers se rendent, dès leur arrivée, à la Médina où il y a tant de choses à découvrir. La cité est divisée en trois quartiers : la médina (vieille ville), la ville impériale où se trouvent les jardins, et les édifices royaux. Enfin, la nouvelle ville, construite sous le protectorat, abrite le centre économique de la ville. Meknès a été bâtie au cœur d’une très belle région, au pied du Massif montagneux du Zerhoun. Par l’autoroute, Meknès est très facilement accessible depuis Casablanca et Rabat. Par Fès, une heure et demie nous a suffi pour nous y rendre par bus. Il n’y a que soixante cinq kilomètres entre les deux cités. Pour traverser la Médina, dont les mûrs sont très élevés, on peut marcher pendant des heures. Les touristes louent des calèches, ce qui rend la visite moins fatigante.
Au recto des prospectus la chaleur humaine
Comme pour les autres villes du Maroc, les guides sont faits pour dire aux touristes étrangers combien la région mérite qu’on s’y attarde. L’un des prospectus de Meknès encense cette dernière en ces termes: « le visiteur revient toujours avec une sensation de rêve, une impression d’avoir enfourché la fameuse machine à explorer le temps. Mais il restera toujours aussi ébloui par la dextérité des orfèvres, l’habileté des marchands, la précision des sculpteurs de bois et le tintamarre sympathique des souks. Ville de la démesure qui mobilisa des milliers d’architectes, d’ingénieurs, d’artistes, Meknès offre aujourd’hui toute sa noblesse dans un panorama inaltéré. Elle vous accueille au soleil couchant, lorsque la cité impériale s’enflamme, réverbérant à l’infini l’ocre jaune de ses remparts. Vous invite à partager la fraîcheur de ses somptueux jardins. Et vous émeut, à Moulay-Idriss, sur le tombeau du fondateur de la première dynastie, autant qu’à Volubilis, sur les ruines de l’antique cité romaine ».Une grande banderole annonce la tenue à la mi-août, ici même à Meknès, d’un festival du film maghrébin. Le jour de notre arrivée s’est déroulée la dernière soirée d’un autre festival qui a été abrité à Volubilis, à 27 kilomètres du centre ville. « Les touristes de toutes nationalités viennent chaque été découvrir les secrets de Meknès », nous dit Chirihan, réceptionniste pendant les week-ends à l’hôtel Le Maroc, qui fait face à une salle de cinéma fermée. Notre interlocutrice dira que ce sont les Français qui viennent le plus dans leur ville. Mais il y a aussi des Anglais, des Espagnols, des Allemands…Des touristes en provenance des pays arabes sont rares, précise-t-elle. Elle a remarqué la venue parfois de touristes syriens. Comme dans toutes les villes touristiques marocaines, il n’est pas aisé de trouver une chambre d’hôtel. Tous les établissements affichent complet dès midi au plus tard. En l’absence d’un guide, il est très difficile de visiter l’immense Médina car les sites historiques sont très nombreux.
Vestiges au formation du présent
En dépit de l’existence de plaques d’indication, il demeure impossible de comprendre tout ce que ces vestiges veulent dire. A côté des fabuleux monuments comme le palais Dar El Makhzen, la Mosquée Sidi Saïd, Bab El Berdaïne, Bab El Khémis, Bab El Mansour, Bab Jemâa En Nouar, le Mausolée Moulay Ismaïl et la Kouba El Khayatine, Meknès offre une vue impressionnante sur le bassin de l’Agdal. Non loin de Meknès, Volubilis, la ville romaine, offre un spectacle aussi enchanteur. Il est difficile de détacher les yeux de certains paysages. La cité romaine, entourée d’un rempart de 2,5 Km percé de six portes, était prospère jusqu’au IV eme siècle, avec notamment des mosaïques, des sculptures, des ustensiles de cuisine. La grandeur architecturale atteste de la valeur du témoignage de ce riche passé. Toujours à l’instar des autres cités, ce riche passé n’a point entravé la modernité venue s’y greffer. Dans l’ancienne ville, on trouve toutes les commodités de la vie moderne. Des navettes de bus et de petits taxis assurent sans interruption les déplacements entre les différents sites. Le seul site vers lequel le transport n’est pas assuré est Volubilis. Ceci a d’ailleurs privé les nombreux touristes et citoyens non véhiculés d’assister au festival qui vient de se terminer.
A. M.