Le Festival culturel national de la musique et de la chanson amazighes s’achèvera aujourd’hui et cela après le passage sur scène devant le jury des trois lauréats de la Kabylie, les groupes Mazal et Numidia de Bgayet ainsi que Tagmat de Boumerdès. Ils étaient programmés pour l’après-midi d’hier.
Le 22 décembre dernier a vu le passage devant le jury des troupes musicales targuies qui ont séduit le public. Toutefois, il est utile de signaler que durant le concours après le passage des troupes chaouies et mozabines, certaines troupes ont joué des reprises alors que le règlement du concours stipule que les artistes-candidats doivent présenter leurs propres créations.
Le jury tiendra-t-il compte de cela ? En effet, à titre d’exemple, une troupe chaouie a repris une chanson d’Aïssa El-Djermouni et une autre, mozabite, n’a fait que modifier le texte d’une musique appartenant à un chanteur mozabite connu. Sinon, la soirée a été animée par la star chaouie Hassan Dadi, et cela après des représentations traditionnelles locales touarègues.
Farida Aït Ferroukh anime une conférence
La matinée, par contre, a été réservée aux conférences-débats. Farida Aït Ferroukh, anthropologue berbérisante a commencé par déclarer qu’il faudrait se réapproprier le mot “berbère” sans être complexé car, selon elle, il est totalement faux de penser qu’il vient de “barbare”.
Ensuite, Farida Aït Ferroukh parlera longuement de la chanson kabyle qui a pu s’imposer en quantité et en qualité. Elle en retracera l’historique de 1926 avec la naissance de l’Etoile Nord-Africaine, la crise berbériste de 1947 à 1949 durant laquelle des militants de la cause amazighe ont été exécutés pour berbérisme, le congrès de la Soummam en 1956 et Abane Ramdane, qui sera lui aussi assassiné, les maquis du FFS en 1963, jusqu’au printemps berbère de 1980 et le Printemps noir de 2001.
Durant toutes ces périodes, la chanson kabyle a eu des thèmes suivant les conjonctures. Farida Aït Ferroukh reviendra sur les époques de Taos Amrouche et de Mohamed Iguerbouchène. La première pensait que l’Algérie allait lui ouvrir les portes en 1969. Malheureusement, c’est le contraire qui se produira puisque les portes lui ont été fermées. Quant à Mohamed Iguerbouchène, il commencera à écrire des pièces musicales originales dès l’âge de 18 ans. A partir de 1965, la chanson devient pratiquement le seul moyen d’expression pour les Kabyles. Voilà ce qui explique les chansons engagées de Ferhat Mehenni avec son groupe Imazighen Imoula. Lounis Aït Menguellet fera la même chose. C’est pour cette raison que Kateb Yacine appellera les chanteurs engagés “les maquisards de la chansons”. Farida Aït Ferroukh évoquera aussi la chanson A vava inouva écrite par Ben Mohamed et chantée par Idir. Elle sera traduite en 17 langues et la chanson kabyle atteint ainsi une renommée internationale. A propos d’Idir, de son vrai nom Hamid Cheriet, il n’avait aucune intention de faire une carrière artistique de chanteur et tout le monde connaît son histoire. Il improvisera à la Radio son nom d’artistes pour chanter à la place de Nouara qui n’avait pas pu venir. D’ailleurs, ses parents ne le savaient pas et un jour sa mère lui dit : “Il y a un chanteur qui passe à la Radio et il a une belle voix.”
Avant cette époque, il faut également souligner que certains chanteurs, à l’instar de Cheikh El Hasnaoui, Slimane Azem et Alloua Zerrouki, ne chantaient pas uniquement en kabyle, mais aussi en arabe. De plus, les circonstances ont fait que des années 1980 à 1990, la plupart de grandes figures de la chanson kabyle étaient établies en France. Arrive 1990 et le silence des stars kabyles telles que Nouara pour ne citer qu’elle. Ensuite, l’Algérie connaîtra la douloureuse décennie noire avec le terrorisme. Actuellement, la chanson kabyle traverse une mauvaise période puisque les producteurs ont décidé d’arrêter la chanson de qualité sous prétexte qu’elle ne se vend pas.
Farida Aït Ferroukh parlera ensuite de la Radio qui a joué un grand rôle dans la promotion de la chanson kabyle. Elle insistera d’ailleurs sur la mobilisation de beaucoup d’artistes, à l’instar de Kamel Hamadi, qui ont sauvé la Radio d’Alger qui allait être fermée. Celle de Bougie également a joué un grand rôle puisqu’elle était animée par Cheikh Saddek El Bjaoui et son ami et compagnon Abdelouahab Abjaoui. Et de clôtuer sa communication par la chanson amazighe en général.
De Tamanrasset, Amastan S.